« Le confinement a fait de moi : une femme de ménage, une infirmière, une secrétaire administrative, une institutrice, une éducatrice spécialisée et un punching-ball ! », explique la mère d'un enfant autiste. Un témoignage parmi tant d'autres qui révèle la précarité de certains aidants contraints de faire face à une situation exceptionnelle, souvent H24. Pour évaluer cet impact et les besoins exprimés à l'issue du déconfinement, le Collectif inter-associatif des aidants familiaux (Ciaaf) a mené l'enquête. 1 032 personnes ont répondu entre le 24 avril et le 25 mai 2020.
3 signaux d'alerte
Constat majeur ? Le rôle déjà essentiel des aidants avant le confinement s'est révélé vital dans la gestion de la crise sanitaire, qui les a impactés dans trois domaines. Elle a tout d'abord fortement accru leur isolement. Si 67 % des répondants étaient accompagnés avant le confinement, seuls 48 % l'ont été durant cette période. Ils ont ainsi dû largement pallier la fermeture des établissements ou la réduction des services d'aide à domicile. Deuxième constat, cet isolement leur a été imposé ; 79 % déclarent ainsi que l'absence de soutien provient d'une cause extérieure. Cette situation a ensuite engendré une intensification des responsabilités : tâches domestiques, suivi médical, surveillance, soutien moral, réalisation d'actes intimes, aide à l'autonomie, soutien scolaire adapté... Ce surinvestissement ayant eu des effets négatifs sur leur santé, ils sont nombreux à constater une nette augmentation de leur épuisement physique et moral.
Un chèque répit de 1 000 euros
Le premier besoin exprimé par les aidants est donc la possibilité de pouvoir bénéficier de séjours de répit sans reste à charge (41,8 %). Cependant, la lourdeur administrative constitue un frein pour plus de la moitié d'entre eux (50,98 %), ainsi que le coût pour 44,53 %. « Aider ne devrait pas rimer avec s'épuiser », témoigne le papa d'un jeune adulte déficient intellectuel. Pour parer à l'urgence, le Ciaaf fait appel à la « solidarité nationale » et réclame, pour les « fantômes, les oubliées (ndlr : des femmes à 77,8 %) de la société », la « mise en place immédiate d'un chèque répit, d'un montant de 1 000 euros et d'une validité d'un an » afin de permettre l'accueil du proche en situation de handicap lors d'un séjour. Il demande également, à court terme, une augmentation des services adaptés, de l'accompagnement professionnel à domicile et des solutions de répit avec hébergement (séjours de vacances, accueil temporaire...). Revendication également portée par le Collectif handicaps qui regroupe 48 associations, et rappelle, à son tour, que « certaines familles ont aussi besoin d'un relais, en particulier après ce temps de confinement ». Or les dispositions sanitaires sont « tellement contraignantes que cela décourage les organisateurs de vacances ». Le collectif assure que « la plupart des séjours adaptés sont annulés ». La pause estivale, ce n'est donc pas encore gagné !
A moins que… Le 800 360 360, tout nouveau numéro vert d'appui mis en place par le gouvernement, est opérationnel depuis le 8 juin 2020 (article en lien ci-dessous). Il vise, via une équipe de proximité, à apporter de l'aide aux personnes en situation de handicap et aux aidants en grande difficulté à la suite du confinement. Mais, expérimental, il n'est pour le moment disponible que dans 24 départements.
Une prime pour service rendu ?
Dans l'enquête du Ciaaf, certains aidants vont même plus loin et réclament « une prime pour service rendu » ; cette aide financière est soutenue par 45,8 % des répondants. « Nous faisons tout le boulot de l'Etat sans salaire, je touche 1,50 euro par jour, c'est vulgaire, inadmissible… SOS ! », s'insurge un papa. Rappelons que, comme les personnels soignants, les professionnels du médico-social se verront attribuer une prime exceptionnelle de 1 000 à 1 500 euros selon leur département pour bons et loyaux services (article en lien ci-dessous). Ce coup de pouce a le don d'exaspérer de nombreux aidants à bout, laissés à l'abandon. Le 16 juin, le Parlement adopte par ailleurs une proposition de loi permettant « aux salariés et agents publics disposant de RTT et de repos d'en faire don aux professionnels de santé et du médico-social en première ligne durant l'épidémie », via des Chèques-vacances. Et, pour les aidants, ni compensation, ni valorisation ?