Mauvaise alimentation = dépression ? Plusieurs travaux ont déjà établi un lien entre la consommation des aliments ultra-transformés et des maladies métaboliques (obésité, malnutrition...) ou encore des cancers. Une nouvelle étude, publiée en mars 2023, révèle également un risque accru de symptômes dépressifs en cas de surconsommation de barres chocolatées, brioches, bâtons de surimi et autres préparations alimentaires prêtes à l'emploi et présentées comme « pratiques et rapides à consommer ».
Favorisent le stress oxydatif et l'inflammation
L'équipe de Tasnime Akbaraly, chercheuse Inserm au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations à Paris, est à l'origine de cette découverte. Travaillant sur les liens entre alimentation et santé mentale depuis une quinzaine d'années, elle a déjà montré qu'un régime « déséquilibré », notamment de type « occidental » (riche en acides gras et pauvre en fruits et légumes), est associé à un surrisque de dépression. En 2023, dans son viseur : les aliments ultra-transformés. Leur particularité ? Ils peuvent être assez éloignés de la matière première dont ils sont issus. Leur préparation nécessite en effet d'importantes transformations physiques, chimiques ou biologiques, obtenues par différents procédés, ainsi que l'ajout d'additifs de types émulsifiants, exhausteurs ou encore antioxydants afin de modifier texture, goût ou durée de conservation… « Ces produits favorisent ainsi le stress oxydatif et l'inflammation et modifient le microbiote intestinal ou encore l'expression du génome. Il n'est donc pas exclu qu'ils aient un impact sur la santé mentale, connue pour être sensible à ces différents facteurs », explique la chercheuse.
30 % de risque supplémentaire
4 554 participants (dont 74 % d'hommes) ont été suivis pendant treize ans. Ceux qui consommaient le plus d'aliments ultra-transformés (soit un tiers de leurs apports totaux) avaient 30 % de risque supplémentaire de présenter des épisodes de symptômes dépressifs récurrents par comparaison avec les participants dont la part des aliments ultra-transformés était inférieure à un cinquième. « Cette association est indépendante des facteurs sociodémographiques, des habitudes de vie ou de la santé globale des individus », précise toutefois Tasnime Akbaraly.
Cuisiner soi-même !
Pour les chercheurs, ces observations sont une « véritable invitation à explorer spécifiquement l'effet sur la santé mentale des différents procédés de transformation alimentaire, des additifs, des émulsifiants et des conservateurs ou encore des emballages ». En attendant, « ces produits ultra-transformés sont déjà fortement déconseillés par les pouvoirs publics, qui recommandent de cuisiner soi-même des aliments dans leur forme la plus naturelle : légumes, viandes, poissons, farine complète… Cette recherche renforce encore la pertinence du message », conclut Tasnime Akbaraly, rappelant que la santé mentale est une priorité de santé publique, a fortiori dans un contexte d'un accroissement des troubles dépressifs depuis la pandémie de Covid-19.