En France, 6 000 jeunes adultes handicapés sont maintenus dans des établissements pour enfants dans l'attente de places adaptées à leur situation et surtout à leur âge. Ce dispositif « faute de mieux » existe depuis 1989, grâce au combat mené par le comédien Michel Creton. L'amendement (Article 22 de la Loi n°89-18 du 13 janvier 1989) portant son nom permet le maintien temporaire dans leur établissement de jeunes handicapés atteignant l'âge de 20 ans lorsqu'ils ont une orientation par la CDAPH vers un établissement pour adultes mais sont dans l'attente d'une place.
Plus 20% de 2006 à 2010
Une étude sur ce sujet vient de paraître dans la collection « Études et résultats » (n°946, janvier 2016, en lien ci-dessous) de la DRESS (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques). Dernière analyse en date, elle se base sur des chiffres de 2010 mais, 5 ans après, la situation n'a certainement pas vraiment évolué. Ils étaient près de 5 000 jeunes adultes concernés par ce dispositif en 2006, date de la précédente enquête. Leur nombre a donc augmenté de 20% en quatre ans, tandis que le nombre de places en établissements pour enfants handicapés restait stable au cours de la même période. 6 000 jeunes aujourd'hui, cela équivaut à 5,6% des usagers des établissements pour enfants handicapés. Ils sont surtout présents dans les instituts médico-éducatifs, les établissements pour enfants et adolescents polyhandicapés et pour déficients moteurs.
Quels profils ?
Il apparait que ce maintien dans l'établissement d'origine dure de plus en plus longtemps. Environ 71% des jeunes relevant de l'amendement Creton ont entre 18 et 21 ans au moment de l'enquête et 4,6% ont 25 ans ou plus. Seuls quelques cas exceptionnels (0,5%) ont plus de 30 ans mais la situation pourrait s'aggraver dans un futur proche puisqu'en Corse, Provence – Alpes-Côte d'Azur, Midi-Pyrénées, Picardie et Alsace, ils sont au moins 10% à avoir 25 ans ou plus. Les deux tiers ont 20 ou 21 ans et 59% sont des garçons. Ils sont plus souvent atteints d'un handicap lourd que l'ensemble des enfants accueillis en établissements et sont plus nombreux à présenter une déficience associée. Leur autonomie est moindre : 61% ne savent pas lire et 39% courent un risque vital en l'absence d'une surveillance constante ou d'une aide technique. Près des deux tiers ne sont pas scolarisés.
Et après, quelles solutions ?
À la sortie de l'établissement pour enfants handicapés, un quart de ces jeunes adultes sont accueillis en foyer occupationnel ou de vie. Ils sont toutefois 43% à exercer une activité professionnelle, presque toujours dans le secteur protégé (établissements et services d'aide par le travail, entreprises adaptées). 6% (soit 230 personnes), auxquels il faut sans doute ajouter une partie des non-réponses et des 8% correspondant à une « autre situation », se retrouvent à domicile, sans aucune prise en charge ou orientation médico-sociale. Un peu moins de 200 autres sont dans l'attente d'un emploi, d'une place en foyer, en MAS (Maison d'accueil spécialisée) ou en FAM (Foyer d'accueil médicalisé). Les jeunes qui ont quitté leur établissement pour se retrouver « à domicile, sans activité, sans prise en charge et sans orientation médico-sociale » sont majoritairement des déficients intellectuels (58% des ex-bénéficiaires de l'amendement Creton, 56% des autres jeunes).