Téléthon : 30 ans après, des percées médicales majeures

30 ans après, le Téléthon peut s'enorgueillir de percées majeures dans la recherche sur les maladies rares, qui concernent 3 millions de Français, mais aussi d'avoir mis au point des outils pouvant soigner des pathologies beaucoup plus courantes.

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Par Elisabeth Zingg

« En 1986, les maladies rares n'intéressaient pas grand monde, pas même le monde universitaire car il fallait près de dix ans pour identifier le gène responsable d'une maladie », raconte Serge Braun, directeur scientifique de l'association AFM-Téléthon, qui organise le 30e Téléthon les 2 et 3 décembre 2016. Grâce aux dons, l'AFM-Téléthon a soutenu 3 000 chercheurs et quelque 6 000 projets qui ont abouti à la publication, dans les années 1990, des premières cartes du génome humain, transmises gratuitement à la communauté scientifique, ce qui a permis le séquençage complet du génome humain en 2003. On connaît aujourd'hui plus de la moitié des gènes responsables des 8 000 maladies rares et les trois-quarts des gènes à l'origine des 300 maladies neuromusculaires, la cible initiale du Téléthon.

Sur les rails de la thérapie génique

Mais les moyens donnés aux chercheurs ont surtout permis de mettre sur les rails la thérapie génique, « une technique lourde et complexe » qui, au départ, n'intéressait pas les laboratoires, rappelle M. Braun. La thérapie génique consiste à apporter un gène médicament dans les cellules anormales du patient, soit par l'intermédiaire d'un vecteur, soit directement dans l'organisme (sang, organe). Elle fait aujourd'hui l'objet de plus de 600 essais dans le monde pour des maladies rares du système immunitaire, de la vision, du sang, du cerveau.

Bébés-bulles

L'efficacité de la thérapie génique a, pour la première fois, été démontrée en 1999 par l'équipe des Pr Alain Fischer et Marina Cavazzana lors d'un essai sur dix « bébés-bulles », des enfants atteints d'un déficit immunitaire sévère d'origine génétique. Depuis cette date et malgré certains revers, la thérapie génique a permis de traiter plusieurs centaines d'enfants dans le monde pour diverses maladies immunitaires d'origine génétique, « avec une efficacité de l'ordre de 90% », selon M. Braun. En mai 2016, l'Agence européenne du médicament (EMA) a pour la première fois donné son feu vert à une thérapie génique mise au point pour ces « bébés-bulles » grâce aux dons, puis rachetée par le laboratoire GSK et commercialisée sous l'appellation Strimvelis. La thérapie génique pourrait aussi aider à lutter contre certaines cécités.

Des avancées déterminantes

Les chercheurs du Téléthon ont également fait avancer la thérapie cellulaire - destinée à régénérer l'organe malade avec des cellules particulières, comme les cellules souches -, en l'appliquant à des maladies rares mais également à des maladies plus courantes, comme les travaux du Pr Philippe Menasché de l'hôpital Georges Pompidou pour réparer le coeur après un infarctus. D'autres recherches visant à « stimuler » ou « bloquer » certains gènes défectueux ont conduit à des « avancées déterminantes » dans la myopathie de Duchenne, la plus fréquente des maladies neuromusculaires chez l'enfant. Mais les médicaments innovants et très coûteux mis au point jusqu'à présent ne concernent qu'une petite partie des malades. C'est le cas de l'eteplirsen (Exondis 51 du laboratoire Sarepta Therapeutics), un médicament autorisé par l'Agence américaine des médicaments FDA en septembre 2016, ou de l'ataluren (Translarna de PTC Therapeutics), qui vient d'obtenir une autorisation conditionnelle en Europe.

Profit pour d'autres maladies

D'autres maladies pourraient à l'avenir profiter des découvertes réalisées grâce au Téléthon : les chercheurs pensent notamment aux maladies neurodégénératives, à l'épilepsie ou au traitement des grands brûlés. Un essai de transfert de gène dans le cerveau de malades atteints de Parkinson est en cours pour restaurer la production de dopamine qui leur fait défaut. Les recherches menées sur la progéria, une maladie extrêmement rare (deux personnes touchées en France), marquée par un vieillissement accéléré dès l'enfance, pourraient de leur côté fournir des informations précieuses sur le vieillissement normal. C'est ce que pense le Dr Xavier Nissan qui vient de montrer qu'un antidiabétique courant, la metformine, pouvait contrer la production d'une protéine toxique, la progérine, présente dans des cellules de patients atteints de progéria, lors de travaux menés en laboratoire. « On retrouve cette protéine chez les plus de 50-60 ans et on pense qu'elle pourrait être l'un des mécanismes du vieillissement », relève-t-il.

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