Amputé après les attentats, il obtient sa carte d'invalidité

Djamel, amputé à la suite des attentats du 13 novembre 2015, menaçait d'entamer une grève de la faim pour refus de sa carte d'invalidité. Il a obtenu gain de cause. Pour toutes ces victimes "de guerre", le parcours est-il celui du combattant ?

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Djamel C., amputé à la suite des attentats du 13 novembre 2015, menace d'entamer une grève de la faim parce qu'on lui refuse sa carte d'invalidité. Depuis trois jours, l'info fait la une de tous les médias. Indignés ! Il était attablé à la terrasse de La Belle équipe lorsque des hommes ont ouvert le feu. Djamel a reçu quatre balles et a dû être amputé du pied droit tandis que son bras gauche est paralysé. En tant que victime du terrorisme, et ayant donc obtenu le statut de « victime de guerre », cet entrepreneur de 36 ans est depuis des mois soigné à l'hôpital des Invalides.

Pas de carte d'invalidité

Malgré ses séquelles (il ne peut plus s'habiller seul, ni se tenir debout longtemps et se déplace en fauteuil roulant), il a obtenu le statut de travailleur handicapé (qui lui permet de bénéficier de dispositifs d'insertion spécifiques, d'aides à la recherche d'emploi ou encore d'accéder plus facilement à la fonction publique) mais peine à obtenir sa carte d'invalidité. L'un n'entraînant pas forcement l'autre… Délivrée par la commission des droits de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du lieu de résidence – en l'occurrence la Seine-Saint-Denis –, elle permet d'avoir accès en priorité aux places dans les transports mais aussi de bénéficier de certains avantages fiscaux, comme une demi-part fiscale supplémentaire. A deux reprises, la MDPH 93 lui fait part de son refus.

Intervention de la ministre

Une erreur ? Non, elle a visiblement estimé que son handicap n'entraînait pas une invalidité de 80% et plus, condition sine qua non pour sa délivrance. Alertée, la secrétaire d'Etat chargé de l'Aide aux victimes, Juliette Méadel, obtient, compte tenu des circonstances, une « dérogation ». Malgré son intervention, Djamel reçoit, quelques jours plus tard, un courrier lui apprenant que son invalidité lui est à nouveau refusée. Le Parisien affirme que la directrice de cabinet de la ministre a appelé Djamel personnellement le 1er juillet pour le rassurer, lui demandant par ailleurs de ne pas médiatiser l'affaire. Mais cela ne suffit pas à le convaincre… « C'est insupportable, on nous balade », s'emporte-t-il auprès du Parisien. Il annonce alors vouloir entamer, dès le 4 juillet, une grève de la faim. Sa menace, abondamment relayée par la presse, a visiblement permis d'accélérer son dossier. Le matin même, il reçoit, enfin, son attestation en bonne et due forme. Il doit par ailleurs emménager dans un appartement adapté à Paris d'ici quelques jours.

Des parcours prioritaires

La médiatisation de cette affaire offre l'occasion de s'interroger sur le sort réservé aux victimes d'attentats et surtout sur le parcours administratif, parfois fastidieux, qu'ils doivent emprunter. Le 22 juin, Arnaud Beldon, 42 ans, commissaire de police, qui était présent au Bataclan le 13 novembre 2015 (article en lien ci-dessous), blessé par balle à la colonne vertébrale et, depuis, paraplégique, a été fait chevalier de la légion d'Honneur. Mais au-delà de l'émotion et des honneurs rendus, quelle perspective pour ceux qui ont vécu l'horreur ? Des instructions ont été données pour que tous les dossiers des victimes du 13 novembre soient traités en priorité par les MDPH, dans un délai de deux mois maximum, alors qu'en Seine-Saint-Denis par exemple, les délais sont de 12 à 18 mois en moyenne. Interrogée par La Croix, la MDPH de Paris explique qu'ils « sont signalés et traités en toute urgence. Nous avons mis en place des circuits spécifiques avec les assistantes sociales des Invalides pour les blessés qui sont toujours hospitalisés. La question des cartes d'invalidité n'est pas la plus complexe. » Trouver un logement adapté, se réinsérer dans le milieu professionnel, bénéficier d'un accompagnement pour surmonter le choc post-traumatique… Ce parcours de résilience, de reconstruction et d'inclusion se construit au long cours et engage plusieurs ministères comme celui du logement, du travail ou celui délégué aux personnes handicapées.

Un Fonds de garantie pour les victimes

Dans une interview accordée à  handicap.fr en novembre 2015 (article en lien ci-dessous), Françoise Rudetzki, fondatrice de l'association SOS Attentats, tenait néanmoins à rappeler que, depuis 1985, il existe un Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, financé par une contribution de solidarité nationale assise sur les contrats d'assurance. Et d'expliquer que ce « système unique au monde » propose une prise en charge intégrale de tous les préjudices, qu'ils soient psychologiques, physiques, économiques ou professionnels. Il permet, par exemple, en cas de handicap, d'aménager le lieu de vie, de financer une reconversion professionnelle… Lorsque l'état de santé est stabilisé, des expertises évaluent les séquelles définitives et une indemnisation sous forme d'un capital ou d'une rente.

Si 130 personnes ont perdu la vie le soir du 13 novembre 2015 dans les rues de Paris, 400 ont été blessées. Une vingtaine de victimes sont toujours hospitalisées.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par Handicap.fr. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, sans accord. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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