Une mère s'est vu refuser par sa hiérarchie des dons de congés (ou de « permission » dans l'Armée) de ses collègues pour s'occuper de son enfant autiste sévère alors qu'elle est affectée au sein de la gendarmerie de Deauville (Calvados). Le 19 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Nantes lui a donné raison, contraignant le ministère de l'Intérieur à rétablir ses droits. On explique la situation…
Don de RTT, ça veut dire quoi ?
Rappelons tout d'abord que, depuis 2015, les fonctionnaires peuvent donner des jours de RTT ou de congé à un collègue pour lui permettre de rester auprès de son enfant de moins de 20 ans « atteint d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité rendant indispensable une présence soutenue », une mesure qui était déjà effective pour les salariés du privé dans le cadre de la loi Mathys de 2014 (article en lien ci-dessous). Ils peuvent ainsi « renoncer anonymement et sans contrepartie à tout jour de repos non pris (...) au bénéfice d'un autre agent public relevant du même employeur ». Le bénéficiaire, lui, garde sa rémunération. Depuis 2018, un décret étend ce dispositif à tout proche aidant salarié en charge d'une personne handicapée, âgée ou en perte d'autonomie, dans le privé comme dans le public (article en lien ci-dessous).
Trop de jours de permission
Le début de l'affaire remonte à novembre 2015. A l'époque, cette capitaine demande à bénéficier de dons de jours de permission par ses collègues ; le commandant de gendarmerie de Basse-Normandie lui en accorde cinq. Deux mois plus tard, elle réitère sa demande. Refusée ! Pour quel motif ? Le ministère de l'Intérieur juge que cette militaire a bénéficié de dons de la part de ses collègues, équivalents à 17 jours en 2015, et qu'elle dispose encore de 42,5 jours de permission, ce qui est suffisant.
Une victoire en 2 temps
Cette maman décide alors de s'en remettre à la justice. Dans un premier temps, le 1er février 2019, la plaignante est déboutée par le tribunal administratif de Caen, et ce malgré l'avis contraire du rapporteur public qui estime que la décision du ministère va à l'encontre d'une « solidarité spontanée entre agents ». « Le bénéfice de dons de jours (...) n'apparaît pas nécessaire » ont, à l'époque, estimé les juges. Elle tente à nouveau sa chance deux ans plus tard, en appel. Cette fois-ci, le verdict lui est favorable (en lien ci-dessous). Sur le plan légal, les juges nantais ont considéré que ces dons n'étaient pas conditionnés à l'épuisement des droits à permission de la demandeuse. La Cour a indiqué : « L'employeur, lorsque les conditions tenant au donateur et au bénéficiaire du don sont remplies, ne peut s'opposer à une demande régulièrement formulée que pour un motif tiré des nécessités du service, à l'exclusion de tout autre motif ». Or, selon le magistrat, l'absence de la gradée n'aurait eu aucun impact sur le fonctionnement du service. Le jugement de première instance a donc été annulé pour « excès de pouvoir » et l'Etat condamné à verser à la gendarme 1 200 euros au titre de ses frais d'instance. Rompez !