Lorsqu'on parle accessibilité du bâti aux personnes handicapées, on imagine, en général, qu'une rampe, un plan incliné ou un ascenseur suffit à faciliter la vie du plus grand nombre. Le handicap moteur, seulement le handicap moteur ? Or elle concerne évidemment les autres handicaps, et notamment la déficience visuelle.
Les Aveugles de France se mobilisent
Après l'Association Valentin Haüy en avril 2014 (lire article complet en lien ci-dessous), c'est au tour de la Fédération des aveugles et handicapés visuels de France (FAF) de se mobiliser sur cette question. Elle a activement participé au processus de concertation relatif au projet d'ordonnance portant sur l'accessibilité à travers la Commission accessibilité du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées), orchestré par le Secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, avec l'ensemble des parties prenantes.
Des décrets vidés de leur sens
Mais, après plusieurs semaines de négociations menées durant l'automne et l'hiver 2013-2014, le gouvernement a présenté, le 19 juin 2014, un texte (paru le 11 juillet au Journal officiel) qui, selon elle, ne correspond absolument pas aux attentes en matière d'accessibilité pour les personnes déficientes visuelles alors même qu'un certain nombre de consensus avaient pu être trouvés à ce sujet. A ce titre, Vincent Michel, président de la FAF, s'étonne qu'une ordonnance remette en cause la loi handicap votée par le Parlement voilà près de 10 ans : « Il serait tout de même curieux que le Parti socialiste, alors dirigé par François Hollande, qui ne trouvait pas cette loi assez avant-gardiste, la vide aujourd'hui d'une large partie de sa substance par le procédé de l'ordonnance ».
Les points noirs
Parmi les points noirs, les bandes d'éveil de vigilance des escaliers des ERP (établissements recevant du public) connues par toutes les personnes déficientes visuelles ont été remplacées par la possibilité d'installer à la place un simple repère tactile. C'est, selon la FAF, une « aberration » ; « à l'avenir, les architectes pourront se satisfaire du minimum en la matière et apposer des repères qui n'en sont pas. » De la même manière, lors des négociations précédentes, dites de « concertation », le gouvernement s'était engagé à mettre en place un dispositif de rappel du numéro des bâtiments à côté des cadres de porte. Or il semble qu'aucune apposition de la sorte n'ait été intégrée : pas de taille de caractère et de relief minimum indiqués, ce qui signifie que ces signalétiques ne pourront toujours pas être lues par les personnes déficientes visuelles. Et de donner d'autres exemples de situations inconfortables, voire de mises en danger…
Et pourquoi pas un boycott de la CNH ?
Forte de ce constat, la FAF dénonce des « promesses sans lendemain, systématiquement contredites par les projets de décrets et d'arrêtés proposés par l'administration. » Des points de mésentente sur le fond comme sur la forme puisque Vincent Michel s'étonne également de la manière dont ont été conduites ces nouvelles négociations : « Les associations ont reçu le vendredi à 20h un projet d'arrêtés de 40 pages en version inaccessible aux déficients visuels pour une réunion décisive le lundi matin suivant à 9h ! ». Le contrat de confiance entre les politiques et les associations est-il pour autant remis en cause ? « Oui » de l'aveu de la FAF qui va jusqu'à se demander si elle consentira à participer à la Conférence nationale du handicap (CNH) prévue en fin d'année.
En attendant, elle exige un texte réellement persuasif et contraignant qui ne permette plus de pouvoir déroger à la norme. « Un préalable indispensable pour avancer vers une société plus juste et solidaire, attendue, selon elle, depuis plus de 40 ans ! ».