"Ciivise des jeunes": 15 ados contre les violences sexuelles

15 adolescents, dont 2 avec un handicap, se sont réunis à Paris pour améliorer la protection des mineurs face aux violences sexuelles, dans le cadre d'une Ciivise des jeunes, qui se réunira désormais 1 fois par mois pour formuler ses préconisations.

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Une jeune femme prostrée fait « stop » avec sa main.

Par Catherine Fay-De-Lestrac

"Être une fille, c'est être une proie."
La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles (Ciivise) a réuni, le 18 janvier 2025, au siège des ministères sociaux à Paris, un groupe d'adolescents pour s'inspirer de leur expérience et réfléchir avec eux à la meilleure manière de protéger les mineurs contre les violences sexuelles.

15 adolescents dont 2 en situation de handicap...

Quinze adolescents de 14 à 17 ans, de banlieue, de province ou d'outremer, ont été sélectionnés par la Ciivise après s'être portés volontaires. Certains ont été victimes ou témoins d'inceste, d'autres non. Deux sont en situation de handicap, trois viennent de la Protection de l'enfance, des catégories plus vulnérables aux violences sexuelles.

... brisent les tabous et portent la voix de leur génération

Ils se sentent investis de la mission de porter la voix de leur génération auprès de cette commission, chargée de conseiller les pouvoirs publics pour protéger les mineurs de la pédocriminalité. Ses travaux ont commencé en mars 2021 dans le sillage de la publication du livre de Camille Kouchner, La Familia grande. "Depuis que les gens savent que je fais partie de ce groupe, un grand nombre de jeunes victimes d'inceste sont venues me confier leur histoire. Cela a levé le tabou pour eux, je vois qu'ils sont tellement nombreux", explique à l'AFP une jeune d'outremer, qui comme les autres a requis l'anonymat.

Réfléchir ensemble à un "système idéal"

160 000 mineurs sont victimes d'inceste chaque année en France, selon la Ciivise. Mais cette "Ciivise des jeunes" se penche aussi sur les violences sexuelles en ligne, un fléau qu'ils vivent au quotidien. Le matin, ils réfléchissent en petits groupes à la définition de mots : inceste, agression sexuelle, abus sexuels, pédophilie/pédocriminalité, consentement, sextorsion, revenge porn, tabou... L'après-midi, un groupe analyse le système existant de prise en charge des victimes, quand un autre imagine ce que serait un système idéal. Comment en parler à l'école, à quelle fréquence devraient avoir lieu des séances d'éducation sexuelle, quels adultes former ?

Des agressions sexuelles "massives" sur Internet 

"Cela fait deux ans que j'ai porté plainte pour inceste et l'affaire est toujours en instruction. Participer à ce groupe m'apaise et me donne l'impression d'agir", confie un mineur à l'AFP. "Les adultes qui ne soutiennent pas la Ciivise vivent dans un autre monde que les jeunes, ils ne réalisent pas à quel point c'est courant", estime un adolescent de banlieue parisienne. Les agressions sexuelles sur Internet sont "massives", selon eux. "Toutes les filles reçoivent des photos de pénis et des propositions sexuelles. Mais les jeunes n'osent pas en parler à leurs parents", observe un jeune.

Ciivise : des préconisations mensuelles

Deux viennent de Mayotte, deux de La Réunion, alors que la prévalence de l'inceste est importante en outremer. "Les gens vivent en famille élargie avec des oncles et des beaux-pères, il y a énormément d'abus", témoigne l'une d'entre eux.

La Ciivise des jeunes se réunira une fois par mois en visio-conférence puis exposera ses préconisations aux membres de la Ciivise en juillet. Parmi les sujets sur lesquels ils donneront leur avis : "Qu'est-ce qui fait défaut dans la protection des mineurs contre les violences sexuelles ? Est-ce facile de signaler ? Sont-ils écoutés ? Faut-il améliorer la législation ?", explique Samuel Comblez, membre de la Ciivise.

Prendre en compte l'avis des enfants

"Nous ne voulons pas être seulement une commission d'adultes experts mais, conformément à la Convention européenne des Droits de l'enfant, que les mineurs soient consultés sur les décisions qui les concernent", explique le directeur général adjoint de e-Enfance. Ce sont généralement les parents qui parlent au nom de leurs enfants, mais dans le cas de l'inceste les parents ne vont pas porter leur parole, souligne-t-on à la Ciivise. Beaucoup de ces jeunes sont engagés dans des associations ou des structures comme des conseils municipaux des enfants. "On nous demande notre avis, mais le prend-on en compte ? Dans le conseil des enfants j'ai voulu parler d'égalité garçons-filles et d'écologie mais on m'a dit de parler plutôt de culture", témoigne une adolescente.

© doidam10

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