Anne est maman d'un élève de terminale multidys. Sans vocation politique ou associative, elle se dit « inquiète » de l'impact de l'épidémie de coronavirus en France sur les modalités d'examen du bac pour les élèves en situation de handicap. Pour les lycéens de terminale générale et technologique, l'édition 2020 aura bien lieu mais sans épreuves écrites. Le bac sera décerné uniquement sur la base du contrôle continu. Autrement dit, précise le ministère, « l'ensemble des épreuves seront validées par la note obtenue dans les disciplines concernées durant les trois trimestres de l'année de terminale, à l'exception des notes obtenues pendant la période de confinement ».
Des épreuves anticipées moins aménagées ?
Et c'est précisément ce qui interroge cette maman : « Les élèves en situation de handicap bénéficiant d'aménagements aux examens (ce qui permet l'égalité des chances) ont rarement ces mêmes aménagements durant leurs contrôles continus et épreuves blanches ». Elle assure que le « handicap génère forcément des absences, souvent très régulières » et « les notes de l'année reflètent rarement le niveau réel de l'élève handicapé ». Selon elle, et de nombreux témoignages de parents et même d'enseignants reçus en ce sens, « c'est souvent la surprise lors des épreuves finales car, aménagées, elles permettent de révéler le potentiel entier de l'élève ».
Une pétition en ligne
Anne souhaite donc que les jurys d'harmonisation des notes tiennent compte du fait que « les aménagements prévus pour les examens finaux n'ont pas été appliqués et que l'élève bénéficie d'un PPS (plan personnalisé de scolarité), d'un PAP (plan d'accompagnement personnalisé) ou d'un PAI (projet d'accueil individualisé) ». Dans ce contexte, elle a écrit à Jean-Michel Blanquer pour lui demander de définir des « conditions particulières pour les élèves handicapés » ; le ministre de l'Education nationale lui a répondu que le « sujet avait attiré son attention ». En parallèle, elle a décidé de mettre en ligne une pétition sur la plateforme Mes Opinions qui, le 17 avril, a recueilli 14 452 signatures.
Le secrétariat d'Etat au Handicap rassure
Contacté par handicap.fr, le secrétariat d'Etat au Handicap se veut rassurant. « Dès l'annonce de la décision, la ministre, Sophie Cluzel, a indiqué que le handicap serait pris en compte dans le cadre des nouvelles modalités ». Ce sujet « bien identifié », selon lui, a d'ailleurs été « souligné par les associations de parents d'élèves avec des troubles DYS ». Son cabinet insiste sur le fait qu'il « n'a pas d'éléments permettant de corroborer le fait que les notes des élèves en situation de handicap à l'épreuve finale seraient supérieures à celles de la moyenne des notes de l'année ». Il ferait même l'hypothèse inverse, « la pression des examens terminaux pouvant être pénalisante en raison de certaines situations de handicap ». Anne juge cette réponse « consternante » : « Si l'on suit cette logique, les aménagements prévus aux examens ne servent en réalité à rien puisque le stress envahit les élèves handicapés... »
Quelles modalités « handicap » en 2020 ?
Pour cette édition 2020, voici les modalités prévues pour les élèves en situation de handicap :
• Pour le troisième trimestre, dans l'hypothèse d'une reprise progressive des cours (à ce stade à partir du 11 mai), les adaptations et les aménagements prévus dans le cadre d'un PAI, PAP ou PPS seront mis en œuvre sans autre avis (médical ou administratif) quelles que soient les modalités d'évaluations. Pour Anne, cette promesse illustre une « méconnaissance de l'incapacité des enseignants à mettre en place des aménagements pour leurs contrôles car ils sont parfois très lourds (salle isolée, secrétaire, reformulation des questions, agrandissement, sur CD-ROM, orthographe non comptée, ordinateur. Ainsi qu'un 1/3 temps qui n'est, selon elle, « quasiment jamais accordé ».
• Concernant plus particulièrement l'examen du livret scolaire, le dossier de chaque élève sera examiné individuellement par un jury de délivrance du diplôme.
• Le jury de délivrance du diplôme se réunit par bassin sous la présidence d'un inspecteur d'académie-inspecteur pédagogique régional avec des membres issus du jury pour analyser le livret scolaire de chacun des candidats. Il étudie les résultats obtenus par chaque candidat sur l'ensemble de l'année et prend connaissance des appréciations formulées par les professeurs qui ont accompagné l'élève dans chaque discipline.
• Le livret scolaire présente, de plus, l'avis de l'équipe pédagogique attribué à chaque élève en vue de l'examen du baccalauréat, ainsi que, le cas échéant, des observations du chef d'établissement au vu des appréciations des enseignants et après échanges avec l'équipe pédagogique, au sein du conseil de classe notamment. Ces analyses sont reprises lors de séance finale du jury qui prononce les résultats.
Selon cette maman, « il est inconcevable d'en rester à une telle réponse, tellement loin de la réalité ». Enfin, dans l'espace des questions-réponses 2020 du site education.gouv.fr, elle juge qu'il « serait judicieux de rajouter un sujet entier à propos du handicap, pour tous les niveaux concernés (brevet, bac, bac pro, cap, bep, BTS...) et non un paragraphe ».