La justice a été officiellement saisie par l'Association de défense des victimes de la Dépakine, le 12 mai 2017. Une première action de groupe exercée dans le domaine de la santé. Comme l'a révélé la radio France Inter, cette démarche, portée par l'Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du Syndrome de l'anti-convulsivant (Apesac), vise à faire reconnaître la responsabilité civile du groupe pharmaceutique dans les malformations ou retards de développement survenus chez des enfants dont les mères avaient reçu de la Dépakine, un traitement anti-épileptique à base d'acide valproïque.
400 millions d'euros pour indemniser ?
Dans son assignation, consultée par l'AFP, l'association, qui défend 2 000 enfants, demande à ce que le juge ordonne la consignation par le groupe de la somme de 400 millions d'euros pour faire face à d'éventuelles demandes d'indemnisations dans le cadre de la procédure. « Des malformations physiques et des troubles neuro-développementaux sont décrits depuis 1970, sans que ces informations soient portées à la connaissance des femmes en âge de procréer avant mai 2015, sous l'impulsion de l'Apesac », explique l'association dans son assignation. Cette démarche collective, qu'elle avait annoncée en décembre 2016, s'appuie notamment sur quatorze cas individuels de mères qui avaient reçu ce traitement durant leur grossesse entre 1977 et 2015.
Cause de grave malformations
Une fois le dossier audiencé, le tribunal devra établir une éventuelle « faute de vigilance » du laboratoire ou sa responsabilité dans la commercialisation d'un « produit défectueux ». Sanofi a « toujours respecté ses obligations d'informer sur les effets nocifs de son antiépileptique sur le fœtus, à mesure des avancées des connaissances scientifiques », a déclaré la semaine dernière Olivier Brandicourt, le directeur général du géant pharmaceutique français. La Dépakine et ses dérivés ont provoqué depuis 1967 des malformations congénitales graves chez 2 150 à 4 100 enfants, dont les mères avaient pris ces traitements lorsqu'elles étaient enceintes, selon une première évaluation de l'Agence du médicament et de l'Assurance maladie, publiée fin avril.
Vers une condamnation du laboratoire
En prenant en compte les enfants souffrant de retard de développement (troubles autistiques, psychomoteurs, etc.), le chiffre pourrait monter à 14 000 victimes, selon l'estimation de l'épidémiologiste Catherine Hill. Cette action de groupe vient s'ajouter à l'enquête pénale de deux juges d'instruction, à des procédures civiles individuelles et aux futures demandes d'indemnisation devant l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). « L'objectif est d'obtenir la condamnation du laboratoire par tous les moyens judiciaires », a expliqué à l'AFP l'avocat Charles Joseph-Oudin, également en pointe dans la défense des victimes du Mediator.
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