Un couple de professeurs est soupçonné d'avoir détourné 575 000 euros destinés à des associations d'aide aux personnes handicapées qu'ils avaient créées. L'argent a été épargné sur des comptes bancaires et des assurances-vie. L'info tombe le 30 janvier 2016. Même moment, autre affaire, révélée par Le Parisien (article complet en lien ci-dessous) ; le 26 janvier, Jacques Ducastel, ancien directeur de la Fondation Hardy, à Fontenay-Trésigny (77), est placé en garde à vue à la section financière de la police judiciaire de Meaux. Il sera jugé le 31 mai pour détournement de fonds.
Une cave à vin, des ordis, des luminaires…
Il est soupçonné d'avoir détourné 454 000 € entre 2010 et juin 2012 alors qu'il dirigeait cet établissement public médico-social (EPMS) qui accueille 170 résidents handicapés de 5 à 20 ans. Une succession d'achats injustifiés : une palette d'écrans plats et d'ordinateurs, un détecteur de radars routiers, un congélateur, un fauteuil, un four à micro-ondes, une cave à vins… Et pourquoi pas des luminaires, des cuvettes de WC, du carrelage destinés à équiper une maison en Espagne ? Le garage de l'établissement se transforme même en atelier mécanique dans lequel on répare les voitures des amis du directeur au black.
L'ARS découvre des « comptes douteux »
Une quantité innombrable d'achats personnels a été ainsi réglée via le compte de l'établissement, sans que jamais les délibérations du conseil d'administration ne pointent ces malversations. « L'affaire Ducastel » démarre après un contrôle de l'Agence régionale de santé, en mai 2012. Elle découvre des comptes douteux, des dépenses injustifiées comme 25 920 € de frais de déplacements personnels en deux ans et demi. On exige de Jacques Ducastel qu'il quitte ses fonctions et deux plaintes sont déposées, par l'ARS et le nouveau directeur, en 2012 et 2015.
A quand plus de contrôles ?
Cette affaire suscite l'indignation de deux associations parentales indépendantes. Pour Handi'Gnez-vous !, « pendant que les politiques de tous bords et de tous poils hurlent à qui veut l'entendre que les personnes vulnérables et leurs familles coûtent cher à la société, pendant que les prises en charge et l'accompagnement sont refusés sous prétexte de coupe budgétaire dues à l'austérité, d'autres mènent grand train et belle vie sur leurs dos avec la complicité de certains barons locaux et tout cela dans l'omerta la plus totale ! ». Et Céline Boussié, sa présidente, de poursuivre : « On réclame des contrôles à corps et à cris, et si chacun des décideurs du médico-social faisait son job, on n'en arriverait pas à de telles dérives. »
Une pétition pour en finir avec le « business handicap »
Même indignation du côté du Collectif citoyen handicap (CCH) : « Lorsqu'on voit ces sommes détournées au détriment des plus fragiles, il y a plus qu'urgence. » Cette association réclame, comme tant d'autres, de réels contrôles tant sur le bâti que sur les finances. « C'est le rôle de l'ARS mais cela ne fonctionne pas, s'insurge son président, Jean-Luc Duval. D'où notre proposition de faire réaliser ces contrôles et audits par un organisme totalement indépendant composé d'élus, de professionnels, de familles, d'usagers, avec une représentativité dans chaque département. » Ces deux affaires révélées en janvier 2016 laissent présager d'autres cas, certainement étouffés ou passés sous silence. Le CCH dénonce « les nominations qui s'apparentent à de la corruption passive, les rapports IGAS enterrés sans suite, le système pyramidal qui fonctionne sur le copinage… ». Cette association a donc lancé une pétition pour dire non au « handicap business » (en lien ci-dessous).
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