« Je ne veux pas bénéficier de la RQTH (ndlr : reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) car je ne me perçois pas comme une personne handicapée ». Virginie, 27 ans, a un diabète de type 1. Depuis l'annonce de sa maladie à l'âge de 10 ans, elle ne s'est jamais « sentie handicapée ». Un point en commun avec Gérard Raymond, président de la Fédération française des diabétiques (FFD) ; « Ce n'est pas de la discrimination, assure-t-il lors des États généraux du diabète, le 7 novembre 2018. C'est simplement un fait ». Mais tous les diabétiques n'ont pas cette « chance ». Selon l'enquête de la FFD « Mon diabète et moi », seule une personne sur deux déclare « assez bien vivre avec la maladie ». L'équation est simple : sur 3,7 millions de diabétiques, la moitié rencontre des difficultés au quotidien. Soucieuse d'accompagner au mieux chacun d'entre eux, la FFD a formulé quinze propositions au gouvernement et aux différents acteurs de santé, le 12 novembre 2018, à l'Assemblée nationale, deux jours avant la Journée mondiale dédiée. L'objectif : améliorer la qualité de vie des patients et assurer une meilleure prise en charge du diabète.
Facteur de discrimination dans l'emploi
AVC, troubles de la vision, infarctus, amputation... Les conséquences du diabète peuvent être dramatiques si elles ne sont pas prises en charge rapidement. Ces complications ont alors un impact direct sur la vie professionnelle. La majorité des auditionnés déclarent d'ailleurs « moins bien vivre leur diabète au travail que dans la vie privée ». En cause notamment : la discrimination liée à leur maladie. Fatigue, crises d'hypo et d'hyperglycémie, irritabilité... Ces symptômes ajoutés aux piqûres d'insuline, nécessaires en cas de crises, effraient certains employeurs. Pourtant, le Code du travail stipule qu'aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé. Mais la réalité est tout autre : période d'essai brusquement arrêtée, refus de promotion, voire « placardisation »... Les situations de discrimination ne manquent pas. Certains métiers leur sont même interdits : pompier, marin, policier, personnel navigant commercial, gendarmerie, douane, contrôleur de la Sncf... La FFD dénonce des « textes réglementaires obsolètes totalement déconnectés des évolutions thérapeutiques et technologiques (progrès insuliniques, auto-surveillance glycémique...) ». Les choses vont-elles évoluer dans ce domaine à l'instar de l'assouplissement du 6 novembre 2018 qui ne contraint plus les personnes diabétiques à déclarer leur maladie lorsqu'elles veulent passer leur permis de conduire, au motif, auparavant, qu'elles pouvaient être considérées comme dangereuses au volant ? Inaptes à l'emploi également ?
Handicap ? Pas handicap ?
Dans ce contexte, certains préfèrent dissimuler, d'autant que la maladie est le plus souvent invisible ; et ceux qui choisissent de l'évoquer ne souhaitent pas employer le terme « handicap ». « On a peur que ce soit un frein à l'embauche, explique Virginie. Le diabète aide beaucoup de personnes à se surpasser, on en fait une force et on ne veut pas que ça soit perçu comme un 'handicap'. » Une maladie invalidante alors ? La frontière est poreuse. La RQTH est-elle indiquée dans ce cas ? L'association évoque le nombre croissant d'employeurs qui demandent, voire imposent, aux salariés diabétiques de faire une demande pour respecter leur obligation d'emploi. Pour Virginie et Raymond Gérard, c'est « non » d'office, une option qu'ils considèrent comme « inadaptée » : « Nous ne nous reconnaissons pas dans ce statut », détaillent-ils. Alors ils ont eu l'idée d'en créer un nouveau. L'une des quinze propositions de la FFD consiste à élaborer un statut intermédiaire à la RQTH pour les personnes en affection longue durée (ALD). « Avec un diabète équilibré et sans complication, une personne atteinte peut mener une vie professionnelle 'normale' et ne pas voir sa 'productivité' diminuée ». Ce statut spécifique lui permettrait de « bénéficier d'autorisation d'heures d'absences rémunérées pour leur suivi médical ».
Consulter le médecin du travail
« Il n'y a aucune obligation légale de déclarer sa maladie à son employeur. Toutefois, il est recommandé d'en parler au médecin du travail », précise le site de l'Assurance maladie. Il estime les capacités de l'employé à occuper un poste donné et peut intervenir auprès de l'employeur pour réaliser des aménagements. Plus d'un million de diabétiques occupent un emploi, certains en cumulent même plusieurs. Virginie, technicienne de laboratoire, est également « youtubeuse ». Et ne s'arrête pas là ! Elle a aussi créé une boutique en ligne d'accessoires pour personnes atteintes de diabète. Histoire, selon elle, de le rendre « plus fun ».
*Affection longue durée