Discrimination au travail: les victimes réagissent davantage

13e bilan des discriminations dans l'emploi mené par le Défenseur des droits. Le handicap et l'état de santé constituent un motif majeur. Les victimes sont de plus en plus nombreuses à mener des démarches pour se défendre.

• Par
Illustration article Discrimination au travail: les victimes réagissent davantage

Age, handicap, sexe, origine, religion, état de santé, apparence physique, orientation sexuelle… font parfois obstacle à l'emploi. C'est ce qui ressort de la 13ème édition du baromètre de la perception des discriminations dans l'emploi du Défenseur des droits (DDD) et de l'Organisation internationale du travail (OIT), publié le 1er décembre 2020*.

Et le handicap ?

Ce baromètre met en évidence l'ampleur des discriminations en France, ainsi que leurs conséquences négatives et durables sur les individus. Conformément aux précédentes éditions, trois groupes sociaux apparaissent particulièrement exposés aux propos et comportements stigmatisants dans la sphère professionnelle : les femmes en situation de handicap (68 %), celles de moins de 50 ans perçues comme non blanches (69 %) et les hommes homosexuels ou bisexuels (70 %). Même si ce chiffre est en recul de sept points, 23 % des personnes déclarent avoir été victimes de discrimination(s) ou de harcèlement discriminatoire dans l'emploi, sans différence significative selon le secteur d'activité. 41 % des personnes interrogées déclarent avoir déjà été victimes d'au moins un propos ou comportement discriminant. Les critères de discrimination les plus souvent évoqués sont l'apparence physique (dans 40 % des cas), le sexe (40 %) et l'état de santé (30 %). Le fait d'être en situation de handicap ou d'avoir une maladie chronique multiplie par trois le risque d'être victime de discrimination au travail par rapport à un individu blanc, hétérosexuel et en bonne santé, constate ce baromètre. « Ce qu'on perçoit sur ces huit dernières années, c'est une hausse des discriminations déclarées liées au handicap », explique George Pau-Langevin, nommée le 13 novembre 2020 adjointe au Défenseur des droits en charge des discriminations (article en lien ci-dessous), rappelant que le handicap reste, en 2020, pour la 3e année consécutive, le premier motif de saisines tous domaines confondus auprès de l'institution (article en lien ci-dessous).

Impacts négatifs

Près de la moitié des personnes discriminées ont connu des conséquences négatives sur leur emploi. 19 % ont été licenciées ou non renouvelées après les faits et 14 % ont reçu un avertissement ou un blâme, ou ont été mutées contre leur gré. Pour la première fois, ce baromètre détaille les conséquences délétères et durables de ces expériences répétées sur les individus. Ainsi, 70 % des victimes pensent qu'elles seront à nouveau touchées au cours de leur carrière et 22 % ont renoncé à soumettre leur candidature à une offre d'emploi. Ces expériences peuvent également engendrer des séquelles émotionnelles, psychologiques et physiques, ainsi qu'une altération des relations familiales et sociales. Près de la moitié évoquent notamment un sentiment de fatigue, de tristesse, de déprime ou une dégradation de l'état de santé.

Plus de démarches intentées

Point positif néanmoins, les trois quarts des personnes ayant été confrontées à une discrimination déclarent avoir entrepris des démarches à la suite des faits, soit deux fois plus qu'en 2013. Parmi le quart qui n'ont rien dit, 68 % évoquent la peur de représailles, 60 % indiquent qu'elles ne savaient pas quoi faire et 56 % pensent que cela n'aurait rien changé. Si le dialogue avec la direction reste la démarche la plus effectuée (53 % des cas), le recours à un avocat ou l'engagement de procédures contentieuses, pratiques marginales en 2013 (dans chaque cas, 8 % des personnes discriminées dans le privé y ont eu recours et environ 4 % dans le public) sont devenues plus courantes. Le recours aux représentants du personnel ou à un syndicat connaît aussi une forte hausse.

Un enjeu majeur

« Le combat contre les discriminations doit se jouer en amont et en continuum dès les attitudes hostiles, ces signaux faibles (blagues sexistes ou racistes par exemple), qui mènent au harcèlement », explique George Pau-Langevin. Ainsi, seules 0,1 % des personnes ont déclaré avoir été victimes de discriminations sans mentionner d'autres faits antérieurs. Elle appelle « les employeurs et administrations à la vigilance car c'est leur devoir d'éviter l'empoisonnement des relations au travail ». Le DDD émet, quant à lui, plusieurs recommandations, notamment la création d'un Observatoire de la discrimination et l'organisation d'une grande campagne nationale sur ce thème. Le tout doit s'inscrire, selon Mme Pau-Langevin, dans une « politique globale et coordonnée » pour, au-delà des nombreuses chartes de la diversité, « renforcer l'obligation d'agir ». « La discrimination est un enjeu majeur du débat sur la relation professionnelle », ajoute Cyril Cosme, du bureau de l'OIT en France.


* L'enquête a été conduite par téléphone du 6 février au 14 mai 2020 par l'institut BVA auprès de deux échantillons représentatifs de 590 salariés et de 500 agents de la fonction publique, constitués selon la méthode des quotas

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr.Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle détenus par Handicap.fr. Par conséquent, aucune de ces informations ne peut être reproduite, sans accord. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
Commentaires1 Réagissez à cet article

Thèmes :

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.