23 % des candidats auraient eu une opportunité d'emploi à la suite de l'édition du DuoDay 2022. Mais entre stage, CDD, CDI, quel pourcentage ? « Difficile de le préciser, consent le ministère délégué aux Personnes handicapées, car nous ne savons pas sur quoi ont débouché ces rencontres à long terme, d'autant que certaines personnes qui ont participé au DuoDay ont rebondi professionnellement en faisant valoir leur expérience et ont été embauchées plus tard par d'autres entreprises ».
Partout, partout !
Le DuoDay 2023, sixième édition, a lieu le 23 novembre 2023, dans le cadre de la Semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées (20 au 26 novembre). Cela n'aura échappé à personne ; sur les plateaux télé, dans les entreprises, dans nos institutions, sur les bancs de l'Assemblée nationale, les duos s'affichent. Elisabeth Borne, en déplacement à l'Insep (institut national du sport), est accompagnée d'Alexis Hanquinquant, champion paralympique de triathlon. Une douzaine de ministres sont à ses côtés, également engagés dans cette action. Cette année, la ministre déléguée aux Personnes handicapées, Fadila Khattabi a, quant à elle, souhaité mettre l'accent sur le handicap invisible, rappelant qu'il concerne 80 % des situations de handicap.
Petit flash back ! Le DuoDay, porté par l'ALGEEI (Association laïque de gestion d'établissements d'éducation et d'insertion), né en Irlande, est arrivé en France en 2015 avec soutien de l'ARS Nouvelle Aquitaine puis du secrétariat d'État aux Personnes handicapées (Sophie Cluzel). Cette initiative consiste, une journée durant, à proposer à une personne handicapée de s'immerger dans le milieu de travail ordinaire en formant un duo avec une personne « valide ».
Une plateforme de détection des talents ?
Après s'être surtout défini comme une opération de sensibilisation de grande envergure qui a le mérite de mettre en lumière un enjeu sociétal majeur, le DuoDay a désormais pour ambition de devenir une « plateforme de détection des talents » et un « véritable levier vers l'emploi ». 80 % des entreprises participantes ont jugé cette expérience positive. Elles ont augmenté de 16 % cette année par rapport à 2022 avec près de 13 550 d'entre elles engagées (+ 17 %) dans la démarche. Parfois plusieurs duos se forment pour un seul employeur, si bien qu'au total, 27 600 binômes ont été recensés, en hausse de 33 % par rapport à 2022. « Si les grandes entreprises répondent bien présentes parce qu'elles sont structurées avec une mission handicap, notre objectif est de faire passer le message aux TPE et PME », poursuit le cabinet de Fadila Khattabi.
Du côté, des personnes handicapées, 45 849 se sont inscrites (+ 33%) pour répondre à 46 128 offres (+ 17,5 %). « Mais toutes n'ont pas matché, précise le cabinet car, comme sur le marché du travail, il faut que l'offre corresponde au profil du postulant ».
Des détracteurs à la dent dure
Ce DuoDay ne serait-il pas l'arbre qui cache la forêt ou la partie émergée de l'iceberg ? Ses détracteurs ont la dent dure, déplorant une « opération de com » et une « mascarade validiste » des entreprises et des pouvoirs publics pour « un jour par an se donner bonne conscience et afficher des sourires radieux ». Car, derrière la vitrine, les entreprises sont-elles réellement prêtes à intégrer des personnes en situation de handicap dans leurs effectifs à long terme ? Un seul jour ne peut suffire à régler des problèmes structurels tels que l'inaccessibilité des lieux de travail et le manque de sensibilisation des employeurs. Plus qu'un one shot hyper médiatisé, c'est un engagement dans la durée qui est réclamé. Le ministère délégué aux Personnes handicapées se dit « conscient des critiques » et entend « tout faire pour en faire une opportunité de sensibilisation des acteurs économiques ».
Si le DuoDay permet aux employeurs de découvrir les atouts et qualités professionnelles de personnes en situation de handicap, pourquoi, dans ce cas, ne pas imaginer un « duo inversé », comme le proposent d'ailleurs déjà certaines associations (Lire : Duo2 : des salariés "valides" en immersion !), en conviant patrons et ministres à passer une journée dans l'environnement d'un travailleur handicapé, en milieu ordinaire ou protégé ? « Cette sensibilisation dans les deux sens pourrait être une évolution à l'avenir », admet le cabinet de Fadila Khattabi. C'est ce qu'ont répondu ses prédécesseurs chaque année… Pour moins de condescendance et plus d'équité ?
© X Aurore Bergé