Un chômage qui augmente deux fois plus vite que la moyenne, de faibles qualifications : les associations tirent la sonnette d'alarme à l'occasion de la 18e semaine de l'emploi des personnes handicapées, qui s'ouvre le 17 novembre dans un contexte "critique". "Les données sont alarmantes, avec un doublement historique en six ans du nombre de chômeurs", résume Prosper Teboul, directeur général de l'Association des paralysés de France (APF).
Chômage : +10 % en un an !
Fin 2013, 413 421 personnes handicapées étaient à la recherche d'un emploi, une hausse de 11,5% en un an et un doublement par rapport à la fin 2007. Les personnes handicapées sont encore plus touchées par la crise que les autres : un demandeur d'emploi sur deux est chômeur de longue durée, près d'un sur deux est âgé de plus de 50 ans, leur taux de chômage est de 22%. "Une personne handicapée qui perd son emploi met en moyenne quatre ans avant de reprendre pied dans l'emploi", selon le président de l'APF, Alain Rochon. La situation ne s'est pas améliorée cette année puisque la France comptait fin juin 427 947 demandeurs d'emploi handicapés, une hausse de 10,6% sur un an, deux fois plus rapide que la hausse de l'ensemble des chômeurs (+5,2%), selon le dernier bilan de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) basé sur les données de Pôle emploi.
Tous handicaps concernés
L'Agefiph rappelle que les personnes souffrant d'un handicap lourd ne sont pas les seules concernées. "Les personnes en fauteuil ne représentent que 2% des personnes handicapées", souligne-t-elle en citant l'exemple d'un cuisinier qui suite à un accident, souffre d'un problème aux genoux l'empêchant de rester debout toute la journée. L'Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (Adapt), qui a créé cette semaine de sensibilisation, l'a axée cette année sur "la sécurisation des parcours", de la scolarisation à la vie professionnelle.
Trop de ruptures dans leur parcours
"De l'école primaire au collège, du collège au lycée, du lycée à l'école professionnelle, à l'université ou dans une école supérieure, à chaque fois qu'il y a passage, il y a un risque de rupture pour un jeune handicapé", souligne le directeur de l'Adapt, Eric Blanchet. 29% des demandeurs d'emplois handicapés ont un niveau inférieur au CAP, selon Adapt. "Pour les adultes, le risque de rupture est la perte d'emploi suite à un accident, où à une maladie invalidante ou professionnelle", ajoute M. Blanchet. Ceci nécessite de mettre en place un accompagnement, aussi bien de la personne handicapée que de l'entreprise qui va l'employer, souligne-t-il.
Exclus de la formation professionnelle
Moins qualifiées que le reste de la population, les personnes handicapés ont aussi plus de mal à accéder à la formation professionnelle. "Le système de formation professionnelle est en train d'exclure les handicapés. En trois ans, l'accès a été divisé par deux", s'inquiète Yves Barou, président de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). Le gouvernement a fait adopter, lors de l'examen du projet de budget 2015 à l'Assemblée, un prélèvement de 29 millions d'euros sur les réserves du fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Une ponction équivalente est prévue sur l'Agefiph, qui oeuvre pour l'insertion dans les entreprises privées. Aux yeux des associations, cela "ne pourra que fragiliser les actions engagées envers les personnes en situation de handicap". Le gouvernement pour sa part fait valoir que ces sommes sont destinées à financer des emplois aidés, dont bénéficient également les personnes
handicapées.
Conférence nationale du handicap en décembre 2014
La prochaine Conférence nationale du handicap (CNH), qui doit se tenir "en décembre" 2014, comportera un volet sur l'emploi, souligne le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées. Pour préparer ce rendez-vous, un forum régional sur l'emploi doit se tenir à Dijon le 1er décembre, en présence du ministre du Travail François Rebsamen. "Nous voulons des actions réelles et concrètes, pas un compte-rendu de différents rapports", souligne M. Rochon. Les entreprises de plus de 20 salariés ont l'obligation d'employer 6% de personnes handicapées, sous peine de pénalités financières. Mais selon l'APF, ce taux est "autour de 4,5%" dans le public et proche de 3% dans le privé.