Cassandre a 20 ans, une jeune fille encore toute droite. Mais qu'en sera-t-il dans 10 ou 20 ans ? Car, voilà, Cassandre est vendeuse dans un magasin de prêt-à-porter parisien. Une enseigne fun, jeune et cool ! Mais qui interdit à ses employés de poser ne serait-ce qu'un quart de fesse de la journée, même en caisse. Huit heures debout, juste une petite pause pour manger. Alors, quand son dos la fait trop souffrir, son seul recours c'est d'aller s'asseoir sur la cuvette des toilettes, pour souffler ! La médecine du travail déplore mais n'apporte aucune réponse.
Des fabriques à handicap
Un quotidien partagé par des centaines de milliers de Français qui, au nom du travail, s'usent, s'abiment et viennent grossir, quelques décennies plus tard, les rangs des travailleurs handicapés. Faut-il encore une fois le rappeler, les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont la première cause de maladie professionnelle en France et représentent un enjeu humain et économique considérable pour les entreprises. Des handicaps invisibles, que certaines organisations patronales préfèrent donc ne pas voir. Après moi le déluge... Dans l'urgence, priorité à la cadence ! Et peu importe si la marque jeune et cool est en réalité une « fabrique à handicap ». Est-ce si compliqué de comprendre que l'intérêt que l'on porte à ses employés et le confort qu'on leur accorde est un gage de productivité et donc de rentabilité ? Faire travailler à la caresse plutôt qu'au bâton.
Une norme internationale dédiée
Certains s'y emploient, adeptes de la certification OHSAS 18001, comme « Occupational health and safety assessment series ». Créé en 1996, ce référentiel international, certifié par AFNOR, précise les exigences que doit satisfaire un système de management de la Santé et la sécurité au travail (SST) pour permettre de maîtriser les risques et améliorer les performances dans ce domaine. Quelques entreprises françaises, comme Areva, BNP Paribas, Philips France ont déjà obtenu cette certification.
La FDJ sur le front du confort
Janvier 2015 : c'est au tour de la FDJ (Française des jeux) pour différents sites et notamment son siège de Boulogne-Billancourt. Elle a mis en place un système de management et une concertation étroite et « participative » avec tous les acteurs de l'entreprise. Pour Augustin Aghmate, responsable des environnements de travail à la FDJ, « cette certification est une manifestation supplémentaire de la volonté de la FDJ de reconnaître le bien-être au travail de ses collaborateurs comme un vecteur de performance durable. » Cette mobilisation s'inscrit dans la politique RH globale de l'entreprise ; rappelons que la mission « diversité » de la FDJ se mobilise activement depuis des années en faveur de l'emploi des personnes handicapées, sous l'impulsion de Bruno Ponty, récemment décédé (lire article en lien).
Quelques exemples à suivre
Mais, en clair, ça ressemble à quoi une entreprise qui mise sur la sécurité et le confort ? Pour la FDJ, c'est par exemple respecter les panneaux de signalisation (zone fumeur, locaux réservés aux personnes autorisées…), veiller à ne pas bloquer une issue de secours ou signaler à l'administration du site toute défaillance d'un équipement ou d'une installation technique, ou tout risque potentiel. Mais, c'est aussi, en référence au « syndrome Cassandre », adopter les bons comportements en termes de geste et posture ou veiller à maintenir les espaces de travail rangés et propres, en évitant, par exemple, de stocker des cartons au-dessus des armoires pour limiter les risques de chute. C'est enfin se tenir informé, être proactif en la matière, partager les idées et participer aux sessions de sensibilisation.
Et pour quels bénéfices ?
Des bénéfices réels évidemment pour l'entreprise qui, en limitant les risques pour ses employés, réduit les coûts financiers directs et indirects tels que les dommages de ressources matérielles, les temps d'interruption ou de panne, les congés maladie, voire la dépression. Une belle opportunité aussi en termes d'image puisque les entreprises démontrent ainsi à leurs tiers, partenaires, donneurs d'ordres et clients, leur engagement à créer un environnement de travail plus sûr. C'est surtout entrer dans une dynamique d'amélioration continue. Le ministère du Travail a mis en place un site dédié « Travailler mieux » qui propose, selon ses propres mots, « de vraies bonnes méthodes » pour prévenir, notamment, les TMS (lien vers le guide ci-dessous). Que du bon sens ! Mais qui, au risque de contredire le proverbe, n'est pas toujours la chose la mieux partagée au monde !