Equitation handisport : un "bonheur" sur la selle(tte)?

"C'est son instant de bonheur de début de semaine." Polyhandicapée, Léa pratique l'équitation handisport chaque semaine. Une activité bénéfique mais peu répandue car elle nécessite de lourds investissements des clubs.

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Jeune femme penchée sur l’encolure de son cheval.

Par Clara Guillard

"Impeccable."
Du haut de sa fidèle et placide monture nommée Rock n'Roll, Léa rayonne. Cela fait huit ans que, tous les lundis, cette trentenaire polyhandicapée qui se déplace en fauteuil roulant monte à cheval dans le Calvados.

Une activité accessible

"Quand je dis que Léa fait de l'équitation, on me regarde avec des yeux..., mime la mère de la jeune femme, Fabiola Esnouf. On me dit que ce n'est pas possible." "Les gens sont surpris et contents" de constater que cette pratique leur est accessible grâce à quelques outils adaptés, explique Antoine Herpin, 54 ans, fondateur du centre équestre de loisirs La Cour Anteol, situé à Condé-en-Normandie. S'il est trop tôt pour constater un "effet JO", la demande monte régulièrement.  

Un lève-personne et des sangles adaptées

Sur le mur du club house, Antoine est fier de montrer le label violet "Equi handi club" que lui a accordé la Fédération française d'équitation (FFE). En activité depuis 2009, la Cour Anteol accueille des personnes avec des handicaps moteurs, mentaux et sensoriels depuis 2013. Si Léa, polyhandicapée à la suite d'un accident de voiture à 18 mois, peut continuer de vivre sa passion, c'est grâce à un lève-personne électrique fixé à la charpente du manège. A l'aide de sangles, Léa est soulevée de son fauteuil. Antoine approche Rock n'Roll et la fait ensuite descendre doucement sur la selle. 

De "réels bénéfices physiques"

C'est parti pour une demi-heure de balade dans les chemins creux de Normandie. "C'est son instant de bonheur de début de semaine. Ça lui fait voir l'horizon autrement", sourit Fabiola Esnouf. A la joie, s'ajoutent de réels bénéfices physiques. Avec ses cinq chevaux sélectionnés pour leur douceur, Antoine propose tous types d'activité d'éveil, de promenades, de jeux pour des groupes venant par exemple d'Instituts médico-éducatifs (IME) ou d'Ehpad. "J'ai un cavalier atteint de la maladie de Lyme. Au début, il avait besoin d'aide pour sortir du lit. Maintenant, grâce au cheval, il peut se lever tout seul", raconte avec émotion Antoine, en soulignant que l'équitation est "recommandée par les kinés". Léa a quant à elle pu améliorer son tonus, lui permettant de faire davantage de pas, selon sa mère.

"S'occuper de ceux dont personne ne s'occupe"

Une activité aux airs de miracle pour Antoine, qui fut, à 18 ans, brancardier à Lourdes et s'occupait déjà de personnes handicapées et âgées. D'abord voué à reprendre l'entreprise familiale de couverture/plomberie, puis commercial, celui qui avait déjà plusieurs chevaux plaque tout pour fonder son centre équestre et suit une formation pour accueillir des personnes handicapées. "Je voulais m'occuper de ce public dont personne ne s'occupe", explique-t-il, précisant ne faire aucune différence tarifaire avec les "valides". 

Des investissements "très lourds"

Moins de 200 centres équestres en France sont labellisés "Equi handi club" : une goutte d'eau parmi les 6 500 existants. Antoine Herpin est le seul à avoir obtenu le précieux sésame sur l'Orne et le Calvados. "Certains font une heure, une heure trente de route pour venir monter une demi-heure", affirme-t-il. Car les investissements sont très lourds : environ 3 500 euros pour une selle avec dossiers et accoudoirs. C'est encore plus pour la selle bi-place qu'il a fait faire sur mesure pour pouvoir monter avec des personnes qui n'ont pas assez de tonus. Sans compter l'équilève - plateforme transportable qui monte à hauteur voulue, à 6 000 euros... Des dépenses impossibles sans un travail continu de Mme Esnouf, présidente de l'association Handi Anteol qui travaille avec le centre équestre, pour 
monter des dossiers, arracher des subventions. "On est à flux tendu", souffle Fabiola, qui participe aux investissements d'Antoine.

Dys, l'équitation l'a "sauvée"

Seul moniteur, il travaille 7 jours sur 7 et suit entre 30 et 40 personnes handicapées, en plus de ses clients "valides". Mais, cette semaine, il est aidé par une jeune stagiaire de 17 ans, en lycée agricole. "Je suis dyslexique, dysorthographique, bref tous les dys, explique-t-elle. L'équitation m'a permis de développer d'autres sens, ça m'a sauvée." Plus tard, elle veut faire "comme Antoine".

© Stocklib / dasya11 / Photo d'illustration générale

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