Il fut une époque, pas si lointaine, où les ESAT (Etablissements et services d'aide par le travail) n'étaient que des "marchands de papier" qui vendaient leurs prestations à des prix prohibitifs et que l'on sollicitait, parfois par charité, au moment de Noël. Mais ces temps ont bien changé et, aujourd'hui, ils revendiquent une belle diversité de services, parfois dans des domaines surprenants et surtout innovants. Des entreprises qui se veulent modernes et créatives pour faire face à la concurrence du milieu ordinaire. C'était en partie le thème du colloque annuel organisé le 5 juin 2014 par le réseau national du secteur du travail protégé et adapté, le GESAT, qui réunit donneurs d'ordres et ESAT-EA pour inciter à explorer des pistes de collaborations et de développement. A cette occasion, Cécile Bertrand-Rallet, directrice des Établissements Ménilmontant, et Benoit Codogno, directeur de l'ESAT de Moulins, ont évoqué ces métiers émergents.
Des pôles diversifiés
« La diversification des activités est importante, selon Cécile Bertrand-Rallet, afin de mieux s'adapter aux besoins des entreprises ». C'est pourquoi, au sein de ses établissements, elle a formé ses travailleurs handicapés dans huit pôles d'activités. Ils révèlent leurs compétences aussi bien en restauration, prestation de services, couture, conditionnement que dans des domaines artistiques, de menuiserie ou de rénovation. La « vitrine CAT » qui est réalisée par ses ESAT propose des produits et des paniers cadeaux de qualité composés de produits gastronomiques tels que foie gras, confitures, biscuits... C'est d'ailleurs aussi, au sein de cet établissement parisien, que le « Café Championnet » a ouvert ses portes en 2011. Le bilan est encourageant : les appels d'offres s'accroissent, la demande augmente et la confiance aussi. « Instaurer ce climat est primordial, explique Cécile. Même si la tâche demandée par le client est minime, le délai et la qualité du travail doivent être respectés pour pouvoir avancer dans la bonne direction ».
La tendance bio
Pour Benoît Codogno, directeur de l'ESAT de Moulins, cette diversification constitue une stratégie indispensable pour séduire davantage de clients. Selon lui, le savoir-faire des travailleurs handicapés apporte une vraie valeur ajoutée au produit, qui lui permet de satisfaire aux exigences de qualité. Son Esat compte, lui aussi, 8 pôles d'activités (conditionnement, nettoyage de locaux, entretien et création d'espaces verts, gravure marquage et signalétique, remplissage ensachage et flaconnage, maraîchage, gestion électronique de documents (GED) et restauration collective). Par ailleurs, il a récemment choisi de s'engager dans une nouvelle démarche en faveur du bio et du diététique. Son restaurant, « L'équilibre », a ouvert ses portes en avril 2013. Tout un symbole ! L'ESAT entretient également un maraîchage biologique à base de légumes qui sont vendus aux restaurants de l'agglomération moulinoise.
L'ESAT, un sentiment d'éclosion
La diversification des compétences et des activités constitue donc un atout majeur pour le réseau GESAT. Pour survivre dans un univers particulièrement concurrentiel, ses établissements n'ont d'autre choix que de se montrer aussi performants que les entreprises du milieu ordinaire. Tandis que, pour les travailleurs, cette ouverture peut contribuer à leur épanouissement personnel, a fortiori lorsque leur emploi confine à l'art. C'est notamment le cas au sein de l'ESAT Évasion, à Sélestat (67), qui a développé des activités à vocation culturelle ou artistique (art plastique, musique ou spectacle) qui, tout en répondant à la demande de la clientèle, permettent d'éveiller, chez le travailleur handicapé, une curiosité et un réel sentiment d'éclosion. Un exemple parmi tant d'autres !