50 % des personnes handicapées ont renoncé à des soins dentaires, selon une étude LADAPT/IFOP rendue publique le 17 février 2022, soit 22 % de plus que la population générale. La veille, Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap, affirmait qu'elles « ne devraient pas avoir à choisir entre être soignées et être accompagnées », en préambule du colloque « Améliorer l'accès à la santé des personnes en situation de handicap » ; l'occasion d'inaugurer « une banque d'expériences » qui rassemble dix-huit actions locales. Parmi elles, deux dispositifs innovants apportent des solutions dans le secteur dentaire où les besoins sont criants. En effet, 90 % des personnes handicapées déclarent ressentir des douleurs aux gencives contre 35 % pour la population générale ; les enfants handicapés seraient, quant à eux, quatre fois plus sujets aux caries* (article en lien ci-dessous).
Un cabinet dentaire dans l'IME
« La plupart du temps, c'est un casse-tête pour prendre un rendez-vous. Les personnes sont orientées à l'hôpital où les soins s'effectuent sous anesthésie générale », précise Sophie de Nicolaï, directrice de la CPAM (Caisse primaire d'assurance maladie) du Vaucluse. Cette antenne a donc mis en place en 2019 un parcours de soins et de prévention bucco-dentaire à destination des jeunes (enfants et ado) des instituts médico-éducatifs (IME) du département. Les enfants bénéficient de dépistages réalisés par un chirurgien-dentiste du centre d'examen de santé de la caisse, dépêché sur place, ou de soins, si nécessaires, avec prise de rendez-vous pour des actes médicaux complémentaires. Cet examen fait l'objet d'un bilan détaillé à l'attention des parents sur la suite à donner. La prise en charge peut être assurée, en cas de besoin, par la CPAM, notamment dans le cadre du programme MT'Dents, qui accorde aux enfants dès trois ans un soin chez le dentiste offert, auquel ceux en situation de handicap peinent souvent à accéder. Ce dispositif IME permet donc de « diminuer l'appréhension du côté des patients mais aussi des professionnels de santé qui ne sont pas toujours formés pour accueillir les patients handicapés », ajoute Sophie de Nicolaï. L'expérimentation est « positive » du point de vue de l'Assurance maladie qui aimerait la développer plus largement.
Le « Breizh bucco bus »
Plus à l'Ouest, un drôle de bus couleur vert d'eau s'est élancé sur les routes du Finistère. « Breizh bucco bus » a été imaginé par la fondation Ildys en partenariat avec le CHU de Brest et les établissements médico-sociaux du département. Ce bus itinérant va, là aussi, vers le patient et stationne sur les parkings des IME, des foyers d'accueil médicalisés (FAM), des maisons d'accueil spécialisées (MAS) ou des EHPAD du département. Ce cabinet roulant propose un parcours complet, de la formation de référents bucco-dentaires au dépistage, en passant par la réalisation de soins. Depuis sa mise en service en octobre 2021, plus de 5 000 actes de soins y ont été réalisés. « Ce n'est pas un environnement hospitalier, donc ces critères d'apaisement contribuent à ce que les soins se passent au mieux », souligne Michel Mogan, directeur au sein de la fondation Ildys. L'expérimentation doit s'achever en 2026. « L'idée, c'est de vérifier dans cinq ans si ce dispositif est viable. Pour l'instant, nous sommes très satisfaits », poursuit-il.
* Selon Dr Martine Hennequin, audition publique de la Haute autorité de santé « accès aux soins des personnes en situation de handicap », octobre 2018