La reprise de l'école a sonné ! Après deux mois de confinement et un déconfinement progressif, tous les élèves devront retourner en classe le 22 juin 2020 « de manière obligatoire », a annoncé le président Macron le 14 juin, y compris les enfants en situation de handicap. Ils auront ainsi deux semaines de cours avant de prendre le large une nouvelle fois pour les vacances estivales. Au programme : un allègement du protocole sanitaire et des retrouvailles, certes éclairs, mais « qui font du bien ! », assure l'association Trisomie 21 France, à l'origine d'une campagne qui vise à rassurer les familles. « Chaque enfant, avec ou sans différence, a le droit d'aller à l'école et de bénéficier de ses apports. Pourtant, beaucoup d'enfants avec trisomie 21 ou trouble du développement intellectuel s'en voient encore privés », déplore-t-elle. Pour faire écho au slogan « aller, à l'école, c'est normal non ? », diffusé les années précédentes à l'occasion de la rentrée scolaire, cette nouvelle campagne mettra en avant le message « retourner à l'école, c'est normal, non ? ».
Des bénéfices psychologiques
Mais il semblerait que, pour de nombreuses familles concernées par le handicap, la réponse soit « non ». Selon une enquête réalisée par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (Cncph) avant le déconfinement, 65,7 % des parents dont l'enfant est habituellement scolarisé en milieu ordinaire n'envisageaient pas de le re-scolariser à compter du 11 mai, préférant attendre la rentrée de septembre. Principaux motifs ? Des craintes concernant les conditions sanitaires et la difficulté de faire respecter les gestes barrière. « Pourtant, l'école pour tous, c'est essentiel », revendique Trisomie 21 France, même sur une très courte période. « Deux semaines, ce n'est pas rien », martelait, de son côté, Jean-Michel Blanquer, le 15 juin sur Europe 1, évoquant des bénéfices « tant sur le plan pédagogique que psychologique ». Position également adoptée par la Haute autorité de santé (Has) qui assure qu'il est « important de rassurer les parents et de favoriser avec eux le retour en classe ou dans les établissements et services médico-sociaux » . L'enjeu : permettre aux jeunes, et aux moins jeunes, de reprendre leurs habitudes, retrouver un rythme scolaire mais aussi une vie sociale, condition sine qua non à leur « santé physique, mentale et leur bien-être », selon la Has.
Revenir aujourd'hui pour préparer demain
Nombre de spécialistes mettent en effet l'accent sur ce que l'école apporte au-delà des apprentissages : relations sociales, entraide, vivre ensemble... « Dans ce contexte épidémique, l'école permet surtout aux enfants d'appliquer au quotidien les gestes de prévention, de les comprendre ensemble et de mieux les intégrer dans le long terme », explique T21 France. C'est aussi l'occasion de reprendre contact avec les enseignants et les accompagnants d'élèves en situation de handicap (Aesh) et de faire un bilan pour repérer les situations nécessitant un accompagnement renforcé, un suivi particulier en septembre. Selon l'association, « reprendre la scolarisation dès maintenant, en toute sécurité, c'est se donner les meilleures chances pour réussir prochaine rentrée » qui se prépare dès maintenant. Ainsi, elle encourage les parents à « rester dans la dynamique de l'école inclusive » dans la mesure où le trouble n'occasionne pas de risque spécifique.
Des mesures sanitaires contraignantes ?
Exit le quota maximum de 15 élèves par classe en primaire et la règle des 4m2. Les élèves devront désormais respecter une distance latérale d'un mètre. Certaines règles seront néanmoins maintenues : lavage régulier des mains, mise à disposition de gel hydroalcoolique, port du masque dès le collège lorsque la distanciation physique n'est pas possible... Des mesures « très contraignantes, surtout pour les enfants en situation de handicap et leurs accompagnateurs », estime l'ancienne ministre Dominique Gillot, aujourd'hui présidente de la Fédération générale des pupilles de l'enseignement public (Fgpep), qu'il est « urgent de lever dans la mesure du raisonnable » à l'école mais aussi durant les colonies de vacances. Selon la FGPEP, ces dernières sont également très impactées par ces mesures sanitaires, alors même qu'elles jouent un rôle crucial dans l'inclusion et la lutte contre les inégalités pour des milliers d'enfants chaque année. Outre son allègement, elle demande une participation de l'Etat afin que les surcoûts liés au protocole ne soient pas à la charge des familles et des organisateurs, déjà lourdement touchés par la crise.
« Les gestes barrières et les nouvelles règles sanitaires ne doivent pas devenir un frein supplémentaire à l'accès des jeunes avec handicap à l'école, aux loisirs, à la culture et ensuite au monde du travail », conclut Nathanaël Raballand, président de Trisomie 21 France. Pourtant, on peut facilement imaginer les difficultés que peut avoir ce public pour intégrer les nouvelles règles sanitaires et sociales. Selon lui, sans réponse appropriée, cela peut amener la société à considérer les personnes concernées comme incapables de se protéger et de protéger les autres et, de ce fait, à les stigmatiser et les isoler davantage.