Croizon : handiglisse, une pratique tout schuss !

Direction la montagne pour une rubrique tout schuss avec Philippe Croizon. Pour sa chronique dans le Magazine de la santé (France 5) du 26 janvier 2015, dont handicap.fr est partenaire, il aborde les joies du handiski.

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La thématique est de saison. Mais skier avec un handicap, est-ce vraiment raisonnable ?
Évidemment, et quel que soit le handicap, physique, mental ou sensoriel. Avec le matériel actuel, la pratique des sports de glisse est accessible même à des personnes tétraplégiques ou atteintes de maladies invalidantes. Et que l'on soit débutant, confirmé ou même compétiteur. Il faut se souvenir des Jeux paralympiques qui ont eu lieu à Sochi en février 2014, avec 12 médailles au compteur, dont cinq titres en or, pour nos sportifs français.

Alors, puisque rien ne vous arrête, vous avez testé le handiski. Expliquez-nous vos sensations ?
Tout simplement liberté et adrénaline. On entame la descente et, dès les premiers virages, les sensations fortes sont au rendez-vous, tandis que l'appréhension s'évapore rapidement. Dans cette position, la seule chose que vous pouvez faire est d'accompagner le mouvement de votre guide en inclinant les épaules sur les virages. Imaginez la joie pour un enfant ou un adulte handicapé de pouvoir partager des moments forts en famille ou avec des amis.

Mais, pour cela, il faut un matériel spécifique…
Oui et c'est là que ça devient compliqué. Des machines qui riment en ski, on en compte un paquet : vertiski, trottiski,  tandemski, dualski ou kartski.  Debout, assis et pourquoi pas couché, en solo ou en tandem. On peut compter sur les idées folles de fabricants hyper créatifs, qui ont commencé par bricoler des prototypes dans leur garage avant de proposer du matériel vraiment performant. L'Antenne handicap d'Aime-La Plagne a certainement été une pionnière dans ce domaine ; elle est née en 1997 sous l'impulsion d'un moniteur, Marc Gostoli.

A quoi ressemblent ces drôles de machines ? Il y a par exemple le GMS.
Oui, principalement pour les personnes lourdement handicapées. Le GMS est un fauteuil stable ; la personne est installée dans un siège baquet et maintenue par des harnais. Il est très maniable mais nécessite un accompagnateur skiant sur ses propres skis.

Et puis un drôle d'engin, le trotti-ski.
Comme son nom l'indique, c'est une sorte de trottinette des neiges. Mais cela suppose que le skieur puisse tenir debout seul, maintenu par un baudrier, même si, au besoin, il peut être accompagné et guidé par une tierce-personne.

Et on peut même pratiquer le snowboard.
Oui avec un bass board, de manière autonome ou avec un accompagnateur pour certaines pathologies. Mais une formation pour la maîtrise de ce matériel est vraiment obligatoire.

Mais, le plus incroyable, c'est probablement le XBI free.
Oui, « free » comme libre qui permet de skier en totale autonomie. C'est tout simplement un siège monté sur deux skis. Impressionnant !

Bon, sur les pistes on a compris mais, par exemple, une personne en fauteuil roulant, elle fait comment après pour se balader dans la neige…
Eh bien là encore, un « géotrouvetou » des glaces, Patrick Mayer, a inventé un système qui permet de transformer le fauteuil roulant en fauteuil glissant. Il s'appelle « Wheel blades ». Ce sont des patins dans lequel on glisse les roues. Et qui peuvent aussi être utilisés sur des poussettes.

Et côté tarifs ?
A titre d'exemple, comptez 80 euros pour deux heures de ski, comprenant la location du matériel et l'encadrement. Par ailleurs, depuis 2002, toutes les stations sont incitées à proposer un tarif spécifique pour les forfaits des skieurs handicapés qui nécessitent la présence d'un accompagnateur ; en général, la délivrance de deux forfaits pour le prix d'un. Il faut préciser tout de même que certaines stations mettent ce matériel à disposition gracieusement. Bien se renseigner avant de partir.

Mais, pour skier, il faut aussi que les stations soient adaptées…
Oui, il faut évidemment que les remontées mais aussi les commerces, les toilettes et les logements soient accessibles. De nombreuses stations françaises ont réellement investi dans cette pratique. On peut citer notamment Méribel ou Courchevel mais aussi des petites stations familiales comme Les-Orre ou Morillon, en Haute-Savoie. Elles organisent chaque année en janvier une journée handiglisse qui permet aux personnes handicapées de s'initier à tous les sports de glisse en compagnie de moniteurs professionnels. Et gratuitement ! Profitez-en, aux Orres, dans les Hautes-Alpes, c'est le 31 janvier.

Où trouver l'info ?
Dans les Alpes, par exemple, les stations se sont regroupées sous la bannière « Handi-Alpes ». Mais il y a aussi un site Savoie-Mont-Blanc handiski. Idem dans les Pyrénées avec un site qui recense toutes les stations qui proposent cette pratique. Et surtout avant de réserver, demandez si la station a le label Tourisme et Handicap qui peut être un gage de confiance.

Parce que le sport est un facteur de reconstruction important, il existe même un stage de ski pour les militaires blessés à la guerre.
Oui, sa 34e édition a eu lieu en janvier 2015. Organisé par le Cercle sportif de l'institution nationale des Invalides, il regroupe des militaires blessés en service et des mal/non-voyants civils adhérents au cercle.

Et, pour certains handicaps, on n'a pas besoin de matériel spécifique mais plutôt de moniteurs formés.
Oui, et c'est le cas à Serre-Chevalier où les moniteurs ont reçu une formation pour accueillir des jeunes autistes. Ils ont mis au point des outils pour faciliter la communication, les repères et l'apprentissage, comme par exemple des pictogrammes.

Et puis, contre toute attente, on peut également skier lorsqu'on est aveugle.
Oui, l'un de mes copains, Didier Roche, aveugle et dirigeant du Restaurant dans le noir, m'expliquait qu'il avait appris à skier d'abord en tandem et que désormais, il pouvait slalomer en autonomie, en suivant un « ouvreur » à la voix.

Et pourquoi pas des sensations fortes avec des chiens de traîneaux ?
Eh bien oui, justement. Depuis trois ans, à l'occasion de la Grande odyssée Savoie-Mont-Blanc, une course mythique qui traverse les Alpes sur plus de 1 000 kilomètres, est organisée une « Odyssée pour tous ». Elle rassemble des adolescents handicapés mentaux qui conduisent eux-mêmes leur traîneau. Pendant un an, au sein de leur établissement, ils travaillent sur ce projet et leurs éducateurs affirment que cette expérience les transforme et leur donne une immense confiance en eux. Et une dizaine de chiens, il faut pouvoir maîtriser car c'est de la bombe !

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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