Par Bouchra Berkane
"On est en colère", a éclaté Sandra, sœur de Jérome Watremetz, décédé à l'âge de 38 ans lors de l'incendie de Wintzenheim, en Alsace. "On ne laisse pas des handicapés sans surveillance dans de telles circonstances", a-t-elle déclaré à l'AFP à l'issue d'une cérémonie commémorative sur les lieux de la catastrophe. Trois familles sur onze ont accepté de commémorer sur place l'anniversaire de l'incendie. "On ne pouvait pas ne pas venir", a affirmé la sœur endeuillée, accompagnée de trois proches, venus de Nancy, à plus de deux heures de route.
11 morts sur 28 vacanciers
Le 9 août 2023, un violent incendie ravageait ce gîte alsacien, où était organisé un séjour pour des adultes en situation de handicap. Très rapidement, la mairie indiquait que le bâtiment, une ancienne grange rénovée, n'était ni déclaré, ni conforme aux normes. Le bilan de onze morts, dix personnes en situation de handicap et un accompagnateur, était le plus lourd enregistré en France dans un incendie depuis celui d'un bar à Rouen en 2016. Vingt-huit personnes se trouvaient sur place lorsque le feu s'est déclenché à l'aube. Celles qui logeaient au rez-de-chaussée ont pu s'échapper mais la plupart des pensionnaires hébergés à l'étage sont morts.
La commémoration : "pas envisageable"
Pour la mère de Thibaud Roth, l'accompagnateur de 33 ans qui avait donné l'alerte lors du drame et mort asphyxié, se rendre à la commémoration n'était pas envisageable. "Je sais que j'irai un jour voir ce site mais je ne peux pas, c'est trop difficile", a-t-elle déclaré à des journalistes avant la commémoration. "C'est au-dessus de mes forces pour le moment. Mais je sais que j'irai un jour. Parce que c'est comme s'il était resté là-bas", a confié cette enseignante d'histoire-géographie de 61 ans.
Emotion nationale
L'incendie avait engendré une émotion nationale sur la sécurité des séjours adaptés aux personnes handicapées, lorsqu'il était apparu que le gîte n'était pas conforme aux normes. Sarah et Candy, les sœurs de Jimmy Michel décédé à 33 ans, partagent la colère de Sandra. "Si les contrôles avaient été correctement faits, il serait encore là. Comment ont-ils pu laisser un endroit pareil sans sécurité ?", questionne l'aînée Sarah. "Je ne comprends pas, je ne comprends sincèrement pas comment ça a pu arriver, ça n'aurait jamais dû se produire", regrette-t-elle.
Une stèle en hommage aux victimes
La colère des familles présentes se porte contre la propriétaire du gîte, mais elles regrettent aussi que les noms des défunts n'aient pas été gravés sur la stèle inaugurée devant le gîte. "A la mémoire des victimes de l'incendie survenu à La Forge le 9 août 2023", peut-on simplement lire sur la pierre en grès rose des Vosges. "En inaugurant ce monument, nous nous engageons à (...) mettre tout en œuvre pour éviter qu'une ligne de plus vienne à être gravée sur le livre des victimes" a déclaré le maire de Wintzenheim, Serge Nicole.
Gérante mise en examen pour homicide involontaire
La gérante du gîte a été mise en examen en octobre dernier pour "homicide involontaire" et placée sous contrôle judiciaire par le pôle des accidents collectifs du parquet de Paris. Il lui est reproché d'avoir exploité "un établissement recevant du public sans autorisation" et de ne pas avoir déclaré "la destination du bâtiment ni la capacité d'accueil du public lors du dépôt des permis de construire ou déclarations de travaux auprès de la mairie". Sollicité par l'AFP, le parquet a indiqué que l'information judiciaire était toujours en cours et qu'il n'y avait pas de nouvelle mise en examen.
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