Handicapé, pas d'IRM : les mésaventures de Didier !

Passer un IRM lorsqu'on est tétraplégique, c'est courant. Mais lorsque la clinique ne dispose d'aucun moyen humain et technique, le patient retourne chez lui, bredouille. Le cas de Didier relance le débat sur l'inaccessibilité des lieux de soin.

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Didier Letraut est handicapé, en fauteuil roulant électrique et, comme tout un chacun, a besoin, parfois, d'être soigné. A fortiori parce qu'il est handicapé. Alors quoi de plus logique que de trouver un lieu de soins adapté… D'autant que la clinique dans laquelle il se rend dans le Val d'Oise affiche en toutes lettres : « Avec la robotique, la chirurgie du 21e siècle entre à la clinique Claude Bernard ». Un établissement qui vit avec son temps, plutôt encourageant ! Sauf que… Si la médecine moderne se dessine un avenir fécond, il n'en va pas de même pour l'accessibilité…

Retour à la maison, sans IRM

En ce samedi 17 octobre 2015, Didier vient « juste » passer un IRM (imagerie par résonance magétique). Mais surprise en ce début de 21e siècle pourtant prometteur… Il est reçu par un technicien qui lui pose la question qui fâche : « Vous ne marchez pas ? ». Eh bien non, Didier est tétraplégique depuis 43 ans. Pas de lève-personne pour aider les patients à mobilité réduite à se hisser sur le lit ? Il n'est pourtant certainement pas le premier « tétra » à passer ce type d'examen. En l'absence de solutions humaine et technique, Didier est contraint de retourner chez lui, bredouille. Il lui faudra attendre une semaine pour trouver une solution auprès de l'hôpital Simone Veil d'Eaubonne. Un ami qui l'accompagne parfois interpelle l'accueil de la radiologie quelques jours plus tard. Réponse peu amène : « Il faut avertir à l'avance » et, pour le samedi, elle ne sait pas.

La clinique se dédouane

Refroidi par cet accueil, Didier se fend d'une lettre adressée à cette clinique privée du groupe Capio. Il y mentionne le fait qu'il existe des « lève-personne, très faciles d'utilisation, qui éviteraient ce « refus de soin » qui peut être considéré comme de la discrimination et pourrait avoir des suites sur le plan légal ». Il ne souhaite pas en arriver à de tels extrêmes et se contentera volontiers d'une réponse. Qu'il reçoit trois jours plus tard. Deuxième douche froide ; le directeur-adjoint botte en touche en se dédouanant de toute responsabilité : « Les praticiens de la clinique sont indépendants. Ils y consultent et exercent à titre libéral, certes dans les locaux de la clinique qui sont mis à leur disposition, mais sous leur entière responsabilité personnelle. » Et de mentionner qu'une copie du courrier a été transmise aux médecins radiologues, à qui il a « personnellement demandé qu'ils y répondent ». « Inacceptable, selon Didier ! Cette clinique ne serait donc responsable de rien ? Le groupe Capio serait en quelque sorte un investisseur ou prometteur immobilier qui construit des bâtiments, des cliniques et les « louent » à des praticiens. »

Des médecins pas contents

Une deuxième lettre est donc envoyée à la société Medika-Ermont 95, qui assure le service IRM. Elle s'empresse d'adresser ses excuses au plaignant qui « n'a pas reçu les services qu'il était en droit d'attendre ». Précisant que « dans le cadre de l'amélioration de la qualité de service aux patients », le centre « va étudier » sa « suggestion » et assurant que « à l'avenir, un tel incident ne se reproduira pas ».
Une prise de conscience sincère ? S'il y a bon espoir que ce cas précis soit réglé grâce à la mobilisation d'un usager mécontent et entêté, on peut redouter une absence de prise en compte plus générale. Rappelons qu'en septembre 2015, un syndicat de médecins généralistes lançait une grande campagne « anti-accessibilité » (article en lien ci-dessous), invoquant le fait que certains confrères seraient bientôt obligés de « déplaquer ». La faute aux règles imposées pour l'accueil des patients handicapés, trop contraignantes et coûteuses ! Dans son cas précis, Didier suggère : « Au fond, puisqu'il y a la pratique du dépassement d'honoraires (50 €), au fil du temps, l'investissement dans un lève-personne aurait pu (dû?) se faire aisément, non ? L'accessibilité est une chose mais l'accessibilité aux soins en est une autre. »

Une accessibilité extérieure à l'arrache

Non content de ne pas avoir été aidé à l'intérieur des locaux, le patient lésé a également tenu à alerter la direction sur les carences d'accessibilité du parking. Photos à l'appui… Pot de fleurs sur les accès PMR, places de stationnement réservé pas assez larges, occupées par des véhicules sans carte, peinture au sol délavée, pas de signalisation verticale, donc peu visible… Cinq mois plus tard, toujours pas de réponse. Les patients handicapés devront donc, en toute logique, « patienter » !

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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