Par Jessica Lopez
Quinze candidats, une quinzaine d'entreprises et douze minutes pour se plaire, c'est le principe du « jobdating ». Pour débuter la 20e Semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées (SEEPH), travailleurs handicapés et employeurs étaient face à face le 14 novembre 2016. L'occasion d'« ouvrir des portes » aux moins valides, durement touchés par le chômage.
Défendre ses compétences
« Le fauteuil, ça fait peur », soupire en attendant un entretien Hamza Hamdi, étudiant de 25 ans à la recherche d'un contrat d'alternance dans la logistique depuis plus d'un an. Comme quatorze autres participants à ce rendez-vous organisé par Ladapt (Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées) au Centquatre, à Paris, le jeune homme peine à trouver une activité. « A compétences égales, tous mes potes de fac sont déjà en alternance, c'est rageant », poursuit-il. « En juin, j'ai réussi deux entretiens mais on m'a clairement dit qu'on ne pouvait pas me prendre à cause de problèmes d'accessibilité. Ici, au moins, je peux défendre mes compétences avant tout ». Face à eux, des représentants de Dassault Systèmes, Lagardère Active, Bouygues, Korian, Generali et d'une dizaine d'autres entreprises. Pendant plus de deux heures, ces potentiels recruteurs ont tourné de table en table à la rencontre de chacun dans le cadre de ce jobdating. Avec douze minutes, montre en main, pour mener chaque entretien.
Un bon CV
« On m'a demandé quel était mon parcours, ce que j'aime faire, ce que j'envisage, sans vraiment s'intéresser à ma maladie », raconte Coraline, 34 ans, à la recherche d'un emploi dans la communication. Atteinte d'une maladie dégénérative depuis un an et demi, elle vient d'obtenir la Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), un statut « difficile à assimiler » pour cette jeune femme active, restée plusieurs mois en arrêt maladie. « Quand la maladie est arrivée, je venais de quitter une entreprise. Maintenant elle est là et on essaye de cohabiter. Il est important que je retrouve une activité, d'ouvrir de nouvelles portes », poursuit-elle. Le jobdating l'a « revalorisée à mort » ; « Une recruteuse m'a regardée dans les yeux et m'a dit : 'Wahou, vous avez un bon CV'. Ça m'a fait du bien ».
Une embauche dans les 6 mois
Selon Ladapt, entre 60 et 70% des participants, selon les années, concrétisent ces rendez-vous par une embauche dans les six mois. Pour Sonia Mouihi, chargée de mission handicap pour le groupe Synergie, l'une des entreprises présentes, pour faire évoluer les choses il faudrait davantage sensibiliser les patrons à l'embauche de salariés handicapés car cela « représente la diversité et la richesse humaine d'une entreprise ». « Le CV d'une personne handicapée a beaucoup de trous, qui démontrent son parcours de vie, ses difficultés rencontrées pour trouver un emploi. Quand il n'est pas formé, un patron va tout de suite dire non », estime-t-elle.
Annonces de la ministre du travail
A fin juin 2016, 480 000 demandeurs d'emploi handicapés étaient inscrits à Pôle emploi (+2,3% par rapport à juin 2015), soit 8,6% de l'ensemble des demandeurs d'emploi (petite activité comprise). Souffrant d'un manque de formation, un quart des demandeurs d'emploi handicapés ont un niveau inférieur au CAP et restent en moyenne plus longtemps que les autres sans activité. Pour « renforcer l'accès à la formation », la ministre du Travail, Myriam El Khomri, a rappelé le 14 novembre que « les droits à la formation seraient doublés à partir du 1er janvier 2017 pour les personnes les moins qualifiées, via le compte personnel d'activité », l'un des mesures de la loi travail. Elle a par ailleurs indiqué, dans un discours prononcé à l'issue du jobdating, que, dans le cadre du « plan 500 000 », qui doit doubler à un million le nombre de formations pour les demandeurs d'emploi en 2016, 39 000 personnes handicapées avait intégré une formation à fin août. La 20e SEPH se tient dans toute la France jusqu'au 20 novembre 2016 (article en lien ci-dessous).