Une cinquantaine de personnes se sont réunies pour la soutenir le 14 septembre 2016. Lucie Carrasco a été reçue en urgence par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) du Rhône, à Lyon. Créatrice de mode de 35 ans, elle est atteinte d'une amyotrophie spinale, qui se caractérise par une atrophie des muscles. Depuis 2012, elle est en conflit avec la MDPH, qui ne lui accorde plus d'auxiliaires de vie. Plus récemment, depuis juillet 2016, son AAH (Allocation Adultes Handicapés) ne lui est plus versée. Le 6 septembre 2016, elle décide d'entamer une grève de la faim. Son jeûne est aujourd'hui terminé : à la suite d'un entretien avec Thérèse Rabatel, adjointe au maire déléguée à la politique du handicap à Lyon, Lucie peut à nouveau bénéficier d'auxiliaires de vie ainsi que de son allocation.
Une notoriété qui dérange ?
Le conflit démarre en 2012, lorsque Lucie ne reçoit plus l'aide d'auxiliaires, qui intervenaient habituellement toute la semaine, plusieurs heures par jour. « Lorsque j'ai demandé ce qu'il se passait, on m'a reproché de me pavaner à la télévision et de gagner de l'argent grâce à mon livre, raconte-t-elle. Au téléphone, des standardistes m'ont même répondu que si je ne voulais rien coûter à personne, je n'avais qu'à me faire hospitaliser ». Personnalité très médiatisée, Lucie a fait de multiples apparitions dans les médias aux côtés de vedettes nationales. En 2011, elle a publié un livre, Plus forte que la maladie, qui lui a rapporté 3 000 euros. Sans auxiliaires de vie, c'est son compagnon qui lui apporte les soins nécessaires. Un rôle d'aidant à temps plein qui l'empêchait jusqu'à présent de trouver un emploi.
Zéro justificatif envoyé
Lucie a également contracté une dette de 77 000 euros, somme qui correspondrait à un trop-perçu de deux ans. « Elle recevait une PCH (prestation de compensation handicap) de 3 900 euros par mois, souligne Thérèse Rabatel. Bien sûr, nous ne contestons pas son handicap. Mais Lucie n'a jamais envoyé aucun justificatif. Même si c'est un travail administratif lourd, il doit être appliqué à tous de façon égalitaire. » Sceptique face au dossier, l'élue assure avoir essayé d'aider la jeune femme : « En 2015, je lui ai écrit en lui laissant toutes mes coordonnées pour lui dire de revenir vers moi si elle rencontrait le moindre problème. Elle ne m'a jamais contactée ».
Un dossier à réévaluer
En juillet 2016, son AAH de 800 euros ne lui est plus versée. D'un point de vue administratif, Lucie n'est plus considérée comme « personne handicapée ». L'origine de cette « erreur » ? Un dossier médical pas renouvelé. La CAF (Caisse d'allocations familiales), qui verse les prestations sans être décisionnaire, aurait dû lui adresser une notification pour qu'elle entame les démarches de renouvellement. « Ils ne m'ont jamais rien envoyé », assure-t-elle. Si la situation est aujourd'hui débloquée, la question de son trop-perçu devra être réglée auprès du Département. « Lucie a droit à ses aides mais elle se doit de les justifier, insiste Mme Rabatel. Concernant sa PCH, son dossier doit être réévalué. C'est désormais au Conseil général de statuer sur ses prestations ».
Un projet impossible à financer
Si, comme tous, Lucie doit veiller à effectuer les démarches administratives nécessaires, elle se retrouve, comme beaucoup de personnes en situation de handicap, face à l'impossibilité de mener à bien ses projets professionnels. « Je refuse de travailler en ESAT parce que j'aimerais monter ma société et vendre mes créations, mais c'est impossible, déplore-t-elle. Il faudrait des mécènes, un apport de départ. Mais les banquiers vous rient au nez lorsque vous demandez un prêt alors que vous êtes malade ».
© Aimée Le Goff