Avec ce titre, « Ces malades mentaux livrés à eux-mêmes », Le Parisien n'y va pas de main morte sur la couverture de son édition parisienne du 16 janvier 2019 (en lien ci-dessous). Il fallait oser ! Une photo en majesté pour un sujet majeur : la santé mentale. Mais un titre « caricatural » qui donne encore une fois une image stéréotypée du handicap psychique selon l'Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et ou handicapées psychiques), qui compte alerter ce media sur le poids des mots. La dépression touche 4,7 à 6,7 millions de personnes en France (7 à 10 % de la population), les troubles bipolaires 800 000 à 3,7 millions de personnes (1,2 à 5,5 %) et la schizophrénie environ 670 000 (1 %).
Des cas concrets
L'article illustre son propos par des situations concrètes mais trop restrictives... Dans un tunnel du métro parisien de la ligne 6, un homme, seul, nage dans un jogging trop large. Comme s'il jouait, il va et vient, en riant, dans le sens contraire de la foule. Quelques jours plus tôt, une femme, élégante, chapeau rouge digne des courses hippiques, se met à taper du pied, dans un wagon de la ligne 1, avant de se mettre à hurler, en furie. Le sol tremble, la rame retient son souffle. Une autre erre toute la journée, le regard vide, le long de la rue Rambuteau, dans le 4e arrondissement. « Pourquoi tant de 'fous' dans nos rues ? », interroge la journaliste Elsa Mari, avec le sentiment que l'on voit de plus en plus de personnes atteintes de troubles psychiques déambuler sans destination et surtout sans soutien, comme perdus, livrés à eux-mêmes.
Un système à bout
Pour y répondre, elle donne la parole à Antoine Pelissolo. Ce chef du service de psychiatrie de l'hôpital Henri-Mondor de Créteil (94) lance un cri d'alarme. Dans cette interview, il dénonce une « prise en charge insuffisante des patients ». En trente ans, le nombre de lits dans les hôpitaux a été divisé par deux alors que la population augmente. Il parle, au nom des professionnels, d'un « combat de tous les jours ». Et au nom des patients ? On estime, dans ce public, à 10 000 le nombre de suicides par an et à 220 000 celui des tentatives. L'espérance de vie des personnes avec une maladie psychique est réduite de 10 à 20 ans.
50 millions en secours
Antoine Pelissolo a remis une lettre à la ministre de la Santé, signée par plus de cent professionnels, pour l'alerter sur le problème des budgets. Le 22 décembre 2018, Agnès Buzyn, ministre de la Santé, a pourtant annoncé qu'elle débloquait une rallonge budgétaire de 50 millions d'euros pour le secteur psychiatrique (article en lien ci-dessous) mais qui reste insuffisante par rapport aux besoins. Elle souhaite également dans le cadre de l'objectif Ma santé 2022 « que tous les généralistes fassent un stage en psychiatrie, pendant leur internat, parce qu'ils sont confrontés aux pathologies mentales dans leur quotidien ». Agnès Buzyn donnera des précisions sur sa stratégie lors d'une réunion le 24 janvier.
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