Santé mentale: quand la pollution met le cerveau en danger

Malformation génitale, retard intellectuel, autisme... Les perturbateurs endocriniens sont à l'origine de nombreux handicaps. Qui sont-ils et où les trouve-t-on ? Focus sur l'impact de ces substances sur notre santé mentale.

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Dans la vie courante, les occasions de s'exposer aux perturbateurs endocriniens sont légion. Substances étrangères à l'organisme, ces polluants chimiques entravent le fonctionnement hormonal de l'individu et sont responsables de déficiences mentales. « Les perturbateurs endocriniens sont ubiquitaires ; on les trouve dans des centaines d'objets de consommation, dans les cosmétiques et l'alimentation, dans certaines peintures, mais également dans l'air lorsqu'il est pollué, explique Stéphane Horel, journaliste et réalisatrice du documentaire Endoc(t)rinement, qui traque la bataille d'influence livrée par les groupes d'intérêts industriels. Mais cette problématique n'a « que » 25 ans. Parce qu'ils sont ubiquitaires, il est difficile de mettre en place des mesures de prévention. »

Des dommages massifs sur la santé

Des études se penchent tout de même sur les effets produits sur la santé mentale. Aux États-Unis, des chercheurs ont observé que la suppression du plomb dans l'essence a été suivie d'une hausse de cinq points du QI (quotient intellectuel) sur plusieurs années. En plus d'affecter les hormones thyroïdiennes, qui jouent un rôle primordial sur le développement du cerveau pendant la grossesse, les perturbateurs endocriniens agissent sur les œstrogènes et les cellules adipeuses, qui stockent la  graisse. On les soupçonne également de jouer un rôle dans la baisse de fertilité masculine, en plus d'influer sur le fœtus. « Les molécules qui composent les objets qu'une femme enceinte manipule, les aliments dont elle se nourrit et l'air qu'elle respire peuvent agir directement sur le développement de son enfant », précise Stéphane Horel.

Plus de troubles mentaux et autistiques

Barbara Demeneix, biologiste et auteur de l'ouvrage Cerveau endommagé : comment la pollution altère notre intelligence et notre santé (Odile Jacob, mai 2016), est spécialiste de la question. « La pollution chimique quotidienne peut interférer avec le développement cérébral et les capacités intellectuelles, écrit-elle dans le Journal du CNRS. D'ailleurs, dès les années 1970, une poignée de produits chimiques furent pointés comme étant à l'origine de nombreux cas répertoriés de baisse de QI chez les populations exposées. » En agissant sur les hormones thyroïdiennes pendant la grossesse, ils entravent donc le développement du cerveau. « Ce dérèglement peut être associé à une intelligence réduite mais aussi à des troubles mentaux et comportementaux de l'enfant, tels que les troubles du spectre autistique et le TDAH (trouble de l'attention avec hyperactivité) », poursuit la scientifique.

Une législation qui déçoit

Pour faire face à ces enjeux, « il est possible d'adopter des mesures individuelles, explique Stéphane Horel. Mais le plus important est de mettre en place une législation qui protège tout le monde. » En juin 2016, la Commission européenne a proposé des critères d'identification des perturbateurs endocriniens, qui n'ont pas satisfait les équipes scientifiques (ni l'industrie chimique qui, elle, trouve la définition trop contraignante).

« La baisse du QI coûte cher »

Une exposition prolongée signifie qu'à long terme, les personnes souffrant de troubles mentaux et intellectuels seront de plus en plus nombreuses. En conséquence, des enjeux de santé publique colossaux s'imposent et des coûts énormes sont à envisager. « C'est tout le système de santé qui serait à revoir, puisque la baisse du QI entraîne des dépenses considérables », relève la journaliste. En 2015, plusieurs études ont évalué le coût des maladies liées aux perturbateurs endocriniens pour la société. Les estimations varient entre 157 et 288 milliards d'euros par an pour l'Union européenne, sans compter la prise en charge des cancers ! La plus grosse part de ces dépenses est d'ailleurs consacrée aux dégâts causés sur le cerveau suite à une exposition aux pesticides. Selon ce scénario, les politiques de prise en charge du handicap devront réviser leur budget…

Des solutions pour diminuer les risques

En prévention de ces dégâts, que peut-on mettre en place ? Une chimie moins toxique ? Une meilleure information sur l'origine des produits ? Si les scientifiques sonnent l'alarme, la situation est réversible, à condition que les institutions responsables fassent les bons choix législatifs. D'ici là, quels conseils donner pour diminuer le risque d'exposition quotidienne à ces polluants ? Barbara Demeneix préconise, entre autres, le recours à une alimentation biologique afin de maintenir un bon niveau d'hormones thyroïdiennes.
L'ASEF (Association santé environnement France), auteur de nombreuses études sur le sujet, a également publié, en 2016, son « Mini-guide santé de la femme enceinte » rédigé par une équipe de médecins. L'association conseille par exemple d'éviter le plastique et les conserves, de ne pas approcher son ordinateur ou sa tablette près de son ventre, de ne pas faire de gros travaux pendant sa grossesse, d'utiliser des bio-cosmétiques... Et, plus globalement, de s'informer davantage sur la composition des produits consommés au quotidien, pour un environnement plus sain.

© adimas et Gino Santa Maria / Fotolia

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Aimée Le Goff, journaliste Handicap.fr"
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