Le 20 juillet 2016, le Soundflyer (version 2) a été testé par Patrice Radiguet lors d'un vol complet : du décollage à l'atterrissage. 45 minutes de « vol à l'ouïe » sans aucune aide de l'instructeur assis à ses côtés, seulement guidé par les directives sonores du dispositif. Patrice ayant la particularité d'être non-voyant, il a suivi les informations transmises automatiquement par ce dispositif pour gérer sa vitesse, son cap, corriger son altitude et se maintenir sur la pente d'approche, jusqu'à poser ses roues sur la piste.
Sensation étrange
« C'était étrange d'éprouver cette sensation de liberté mais aussi de devoir se conformer strictement aux informations transmises par l'appareil, sans le secours bienveillant d'une aide humaine ! », confie Patrice. Selon Thomas Baudin, gérant de l'entreprise SyNext qui a permis l'évolution de ce système, il s'agit d'une « première mondiale ». Ce président d'aéroclub a mis sa passion pour l'aviation et la créativité de sa société au service des « Mirauds volants », une association de pilotes aveugles et malvoyants fondée en 1999 par Patrice Radiguet. C'est avec l'aide de ses membres que SyNext a repris le développement de ce dispositif sonore et vocal de conduite de vol pour personnes handicapées de la vue, initialement imaginé par Thales.
Comment ça marche ?
Le principe est… simple ! A partir d'une centrale inertielle et d'un GPS, les données sont centralisées et traitées par un calculateur puis envoyées sous forme sonore et vocale dans le casque du pilote. Les variations d'assiette et d'inclinaison de l'aéronef enregistrées par le système sont codées sous forme de notes de musique, constituant une grammaire sonore spécifiquement étudiée pour le contexte aéronautique. Un clavier de commande placé sur la planchette de vol ou sur le volant permet au pilote d'obtenir des paramètres de vol en consultant son GPS, interrogeable par une synthèse vocale.
Un dispositif pour tous
« Je ne fais actuellement plus aucune différence entre mes élèves bien voyants et les mirauds ; les uns voient avec leurs yeux et les autres avec leurs oreilles, explique Habib, instructeur de vol. Mais dans l'un et l'autre cas, mon instruction est maintenant identique. ». La société SyNext industrialise ce prototype pour le proposer à tout pilote déficient visuel et poursuit l'amélioration des algorithmes pour rendre le plaisir de voler plus accessible. Et pourquoi pas à tous ? En effet, dans un futur très proche, cette technologie pourrait être utilisée par des pilotes « valides » pris dans des conditions difficiles : mauvais temps, atterrissage de nuit, posé d'hélicoptère dans la neige ou la poussière… Un vol à l'aveugle en somme !
Pilotes brevetés
Les « Mirauds volants » n'en sont pas à leur coup d'essai ! En effet, le 5 décembre 2016, cinq d'entre eux ont satisfait avec brio aux épreuves théoriques du brevet de Pilote privé (PPL-a), avec le concours de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) et de l'Institut aéronautique Jean Mermoz. Tout au long de l'année 2016, l'enseignement, les stages de préparation à cet examen et les modes d'évaluation et de contrôle des connaissances avaient été adaptés au handicap de ces pilotes « pas tout à fait comme les autres ». « Lorsqu'un avion passe au-dessus de votre tête, qui peut savoir s'il est piloté par une personne handicapée des membres inférieurs, porteuse d'un handicap visuel ou auditif ? Et pourtant, nous pilotons tous, désormais ! », conclut Patrice.
À noter dans vos agendas
Jeudi 27 et vendredi 28 avril 2017, à Montpellier : salon des métiers de l'aéronautique et de l'espace organisé par le rectorat de l'Hérault. Les Miraud volants seront présents avec un stand d'information et le simulateur de vol sonore et vocal Soundflyer.
© Mirauds volants