Après les propos controversés de Nadine Morano, députée européenne, en octobre 2015, « Nous sommes un pays judéo-chrétien, le général de Gaulle le disait, de race blanche, qui accueille des personnes étrangères », Charlie Hebdo avait publié en couverture un dessin la caricaturant en « fille trisomique cachée » du général de Gaulle.
Relaxe pour Charlie Hebdo
Poursuivi ensuite pour « injure et provocation à la haine et à la discrimination » par le Collectif contre l'handiphobie, Laurent Sourisseau, alias Riss, auteur du dessin et directeur du journal, a été relaxé par la chambre de la presse du tribunal correctionnel de Paris le 10 janvier 2017. A travers ce dessin, son propos était de railler « l'audacieuse » filiation politique invoquée par Mme Morano, avait expliqué le dessinateur face aux juges de la 17e chambre lors de l'audience le 18 novembre 2016. Face à lui, Alexandre Varaut, président du Collectif contre l'handiphobie et père d'un garçon trisomique avait rétorqué : « Le rôle de bouffon est légitime quand il s'en prend aux puissants. Mais il ne faut pas se servir de la faiblesse de nos enfants pour taper sur quelqu'un ». Me de Beauregard, avocat de l'association, avait estimé que « ce dessin fait du trisomique un synonyme de sot. Et c'est vécu comme une invective, une gifle ». De son côté, le parquet avait dressé le constat suivant : « Les limites de la liberté d'expression n'ont pas été dépassées ».
Coluche pas poursuivi !
Le défenseur historique de Charlie Hebdo, Me Richard Malka, avait affirmé : « On demande au tribunal de considérer qu'il n'est plus possible de faire rire avec le handicap. Nous concevons que ce dessin puisse blesser. Tout comme les caricatures religieuses sont aussi blessantes. La cible de ce dessin est Morano, pas les trisomiques. Le moyen humoristique est le déficit de compréhension. Ce n'est pas un préjugé, pas une incitation à la haine, mais bien une réalité ». Il avait achevé sa plaidoirie en mentionnant une phrase de Coluche : « La hausse du prix du pétrole entraîne des inquiétudes chez les handicapés moteurs ». Et d'ajouter : « Il n'a pas été poursuivi… ». Deux ans après l'attentat qui a décimé la rédaction du journal, l'avocat a voulu rappeler « en cette période de triste anniversaire, que c'est la mission de ce journal d'interroger la société, parfois avec irrévérence. Et, paradoxalement, ce procès prouve aussi que Charlie est bien en vie, n'en déplaise aux Cassandre, et que l'équipe actuelle s'est relevée et continue à porter ses combats dans le journal comme devant les tribunaux ».
Trisomie 21 France pour la liberté d'expression
En octobre 2015, l'association Trisomie 21 France s'était montrée tolérante à l'égard de cette couverture (article en lien ci-dessous). « Les personnes avec trisomie 21 réfléchissent et avancent vers le plein exercice de leurs droits citoyens et des libertés individuelles, notamment la liberté d'expression, expliquait-elle à l'époque. C'est important et nous nous sommes battus pour cela après les attentats de Charlie. » De son côté, estimant qu'« une faiblesse ne doit être ni l'objet ni le moyen d'une moquerie », l'avocat du Collectif contre l'handiphobie a indiqué que l'association ferait appel.