Sport et handicap sont-ils pleinement compatibles ? Pour le savoir, la Fondation FDJ (Française des jeux) a mené une enquête (Étude TNS Sofres auprès de 1 127 Français âgés de 16 à 64 ans, en situation de handicap moteur, visuel ou auditif en mars-avril 2015) qui dessine les contours de la pratique des personnes en situation de handicap et analyse les freins rencontrés. Elle permettra d'orienter les actions de la Fondation visant à encourager leur pratique sportive et de loisirs et pourquoi pas à faire émerger cette question dans l'opinion publique où les préjugés ont encore la vie dure. N'en déplaise aux idées reçues, oui, sport et handicap promettent un mariage heureux…
70 % se disent intéressés
En effet, il apparait que le sport est tout aussi important dans la vie des personnes handicapées que dans celle des Français en général, 70% d'entre elles se déclarant intéressées par ce domaine. Leur pratique est également proche de celle des Français puisqu'une personne sur deux s'adonne à une activité sportive au moins une fois par semaine. Pour 31%, cette activité permet de limiter les effets du handicap, notamment par le biais de la rééducation. Près de 9 personnes handicapées interrogées sur 10 déclarent que faire du sport ou avoir une activité physique est essentiel ou important. Mais 56% avouent également avoir été limitées dans leur pratique sportive à cause de leur situation de handicap et 49% avoir été obligées d'arrêter pour ce même motif. Un parcours semé d'embuches ! On constate donc un léger décalage entre l'opinion communément répandue de l'importance du sport et sa pratique effective. Quels sont les sports les plus pratiqués par les personnes handicapées ? La marche et la randonnée arrivent en tête avec 42 % de suffrages. Puis la natation (30%), la gymnastique d'entretien (16%), le cyclisme (15%) et la course à pied ou le footing (14%).
Un élément secondaire pour les pros du médico-social ?
Pour les personnes vivant avec un handicap mental, à qui cette étude consacre un vaste volet qualitatif, le sport rime avec socialisation et engendre des effets positifs sur leur comportement, leur équilibre corporel ; il procure à certains un sentiment d'accomplissement et de fierté. « On s'est rendu compte qu'auprès de personnes perturbées qui avaient d'importants troubles du comportement, cela a permis de les réduire considérablement, se félicite un éducateur interrogé lors de cette étude ». Or le sport semble être considéré comme un élément secondaire pour les associations en charge des personnes de situation de handicap mental et, trop souvent, le personnel médico-social ou les enseignants ne se montrent pas convaincus de son impact positif sur la santé. Ils gardent en tête l'image de deux univers a priori incompatibles. « Dans les institutions, explique un des participants à cette étude, il y a très peu d'activité physique. Mon petit-fils est dans un IME, et c'est laissé au bénévolat de l'éducateur sportif d'organiser des choses, la pratique régulière et ensuite des tournois… Si lui n'en a pas le souhait, ça ne se fait pas.»
Entre désirs et freins
Malgré un désir affirmé, il existe encore de nombreux freins dans l'accès à la pratique. Ce sont tout d'abord des raisons liées à des facteurs exogènes (50%), par exemple le manque de temps, d'argent ou de motivation. Mais la santé ou le handicap eux-mêmes imposent, pour 43 %, des limites que les personnes handicapées ont du mal à dépasser. La réticence ou la difficulté à entrer en relation avec les autres sont également invoquées (17%), ce qui peut expliquer que les sports énoncés ci-dessus soient surtout « solitaires ». Sans oublier, évidemment, des considérations plus matérielles liées à l'inaccessibilité des infrastructures sportives (16%). Elles sont en effet jugées peu accessibles, loin derrière les magasins ou commerces (36%), les lieux administratifs (33%) ou même les transports en commun (21%). C'est pourquoi 77 % des sondés disent pratiquer un sport à domicile, dans « leur » univers, et non dans des structures sportives. La question de l'accompagnement est centrale puisque le manque d'autonomie de certaines personnes impacte indéniablement leur pratique. Le coût et la disponibilité du matériel constitue également un frein. Assister à des compétitions sportives est en revanche perçu comme plus facile, puisque 70% des personnes handicapées s'y sont déjà rendues. Dernier argument, pour 10 % des personnes interrogées : le refus de l'esprit de compétition !
17 février, 1ers rendez-vous du sport solidaire
Face à ce constat, que faire ? Le développement de la pratique sportive passe par un double effort : permettre au sport de mieux s'inscrire dans la vie des personnes en situation de handicap et stimuler leur envie de pratiquer. Pour rendre publics les résultats de cette étude et surtout impulser cette dynamique, la fondation FDJ organisait le premier volet de ses « Débats du sport solidaire » le 17 février 2016 à Paris. Ils ont réuni politiques, sportifs de haut niveau, représentants d'associations sportives avec l'objectif de créer un rendez-vous régulier pour échanger autour du sport et du rôle qu'il joue dans la société (lire interview du président de la Fondation FDJ, Charles Lantieri, en lien ci-dessous). Pour initier cette démarche, une table ronde réunissant plusieurs experts a permis d'identifier certaines barrières et de définir quelques leviers. Ce travail collectif, auquel est associé Handicap.fr, entend réaffirmer la place du sport dans la société en tant qu'acteur d'intégration sociale, notamment dans le cas du handicap mental. Il va également permettre de valoriser les bonnes pratiques en France comme à l'étranger, tout en développant des collaborations avec des organisations du monde du sport. Objectif final : cesser de distinguer la pratique sportive des « valides » de celle des personnes handicapées et proposer une même matrice et des aménagements communs. Le sport en all inclusive, c'est son credo !