Grands consommateurs d'anxiolytiques, antidépresseurs, psychotropes, les Français déprimés ne vont pas mieux mais les hôpitaux manquent de psychologues. De nombreux patients sont laissés sans écoute. Face à ce constat, l'Assurance maladie lance une expérimentation qui propose le remboursement de séances chez des psychologues libéraux agréés.
Dans 4 départements
Ce dispositif est réservé aux patients de 18 à 60 ans présentant des troubles en santé mentale « d'intensité légère à modérée ». Le test, initié en février 2018 dans le Morbihan, a démarré le 1er mai dans les Bouches-du-Rhône et en Haute-Garonne puis sera déployé à l'automne dans les Landes. Ce n'est que dans trois ans qu'une éventuelle généralisation pourra être décidée sur l'ensemble du territoire. L'objectif, pour la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam), est d'améliorer la prise en charge des patients et de permettre une baisse de la consommation d'antidépresseurs et d'anxiolytiques. En 2015, l'un de ses rapports juge que ces médicaments, qui représentent une dépense de 19,3 milliards d'euros cette année-là, « ne sont pas toujours prescrits de façon efficiente du fait d'un diagnostic et/ou d'un suivi insuffisant ».
Psychiatrie saturée
Jusqu'à maintenant, seules les consultations chez les médecins psychiatres sont prises en charge. Mais, face à un afflux de demandes, la plupart ne sont plus en mesure d'accepter de nouveaux patients. Même pénurie dans les centres médico-psychologiques où les délais d'attente peuvent aller jusqu'à plusieurs mois. Dans ce contexte, les patients doivent se résoudre à consulter en libéral et assumer des consultations entre 50 et 60 euros de l'heure, encore rarement prises en charge par les mutuelles. Cette mesure était donc réclamée depuis plusieurs années par les professionnels et les associations de patients.
20 séances maxi
Le dispositif expérimental propose un parcours en plusieurs étapes. Le patient doit d'abord consulter son médecin traitant. Celui-ci doit lui délivrer une ordonnance pour une séance d'évaluation de 45 minutes chez un psychologue. Si des troubles sont diagnostiqués, le professionnel a la possibilité de prescrire dix séances de 30 minutes chez un psychologue ou un psychothérapeute. Si les troubles persistent, dix autres séances de 45 minutes peuvent être ajoutées. Au total, 20 séances maximum peuvent être réglées par la Cpam, sans dépassement d'honoraire possible. Le psychologue entrant dans le dispositif accepte alors une rémunération de 22 euros pour une séance « d'accompagnement psychologique de soutien » et de 32 euros pour une séance de « psychothérapie structurée ».
Pétition pour un accès libre
« De qui se moque-t-on ? », interroge le Syndicat national des psychologues (SNP) qui dit refuser « l'expérimentation telle qu'elle est proposée ». Il a mis en ligne une pétition pour un « accès libre aux psychologues » qui a recueilli 8 600 signatures. Il dénonce, entre autres, l'obligation d'obtenir une prescription auprès de son généraliste pour se rendre chez un psychothérapeute ou un psychologue. La profession juge cette étape inutile au motif que « la compétence diagnostique est inscrite dans la profession même et fait partie de l'exercice de la praxis psychologique ». Elle conteste également le tarif des séances. In fine, le syndicat exige « le respect de l'autonomie professionnelle des psychologues ».