DERNIERE MINUTE DU 12 SEPTEMBRE 2023
A la demande de l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament), le comité de pharmacovigilance (PRAC) de l'Agence européenne des médicaments (EMA) a évalué les nouvelles données sur le risque de troubles neurodéveloppementaux lors de l'exposition au topiramate au cours de la grossesse. A l'issue de cette évaluation le PRAC recommande le 11 septembre 2023 dans un communiqué, de nouvelles mesures pour limiter l'utilisation du topiramate pendant la grossesse. Ces médicaments étaient déjà contre-indiqués dans la migraine chez la femme enceinte et chez celle en âge de procréer n'utilisant pas de méthode contraceptive hautement efficace.
Dorénavant, ces médicaments ne pourront également plus être utilisés dans le traitement de l'épilepsie chez : les filles, adolescentes, femmes en âge de procréer n'utilisant pas de méthodes de contraception efficace et les femmes enceintes (sauf exceptionnellement en cas d'absence d'alternative thérapeutique et seulement après une information de la patiente).
Les conditions de prescription et de délivrance déjà mises en œuvre en France (ordonnance initiale annuelle établie par un neurologue ou un pédiatre, signature annuelle d'un accord de soins et dispensation conditionnée à la présentation de ces 2 documents) restent en vigueur.
ARTICLE INITIAL DU 1ER JUILLET 2022
Un risque d'autisme accru lié à un antiépileptique ? Le topiramate inquiète de plus en plus les autorités sanitaires. Elles appelaient déjà à restreindre drastiquement son usage chez les femmes enceintes, elles reviennent à la charge face à des risques encore plus larges qu'estimé pour le bébé. Ce médicament, vendu sous la marque Epitomax par le laboratoire Janssen mais aussi comme générique par d'autres fabricants, est prescrit contre les crises d'épilepsie et les migraines. On sait qu'il est aussi parfois donné par certains médecins comme amaigrissant, mais cet usage n'est pas prévu par les indications officielles contrairement aux Etats-Unis, où une forme du traitement est approuvée contre l'obésité.
Risques de malformation pour le bébé
« Chez la femme enceinte (...), le topiramate ne doit pas être utilisé dans l'épilepsie sauf en cas de nécessité absolue » et ne doit être prescrit sous aucun autre prétexte, a rappelé dans un communiqué l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) qui estime que ce traitement présente de nombreux risques. Ce n'est pas une nouveauté et l'agence du médicament insiste, en fait, sur des recommandations déjà en place. On sait, en effet, depuis plusieurs années que le topiramate démultiplie les risques de malformations (bec de lièvre, mauvais placement de l'urètre sur le pénis) chez l'enfant à naître. Il lui fait aussi courir le risque de peser un poids très faible à la naissance.
Des revendications de 2019
L'autorité du médicament avait donc déjà mis en garde en 2019, dans un contexte marqué par le scandale de la Dépakine du laboratoire Sanofi, un autre antiépileptique impliqué dans de nombreux troubles chez des enfants exposés lors de la grossesse (article en lien ci-dessous). L'ANSM, pour l'heure, ne fait donc essentiellement qu'insister à nouveau sur ces précautions... Avec toutefois une nouveauté : elle a demandé à son homologue européenne, l'Agence européenne du médicament (EMA), de réévaluer les conditions de prescription du topiramate.
Déficience intellectuelle et autisme triplé
« Pourquoi on revient sur ce médicament maintenant ? Ça fait suite à la publication d'une large étude nordique », explique Philippe Vella, spécialiste des traitements neurologiques à l'ANSM, estimant qu'une décision de l'EMA pourrait intervenir d'ici à quelques mois. Publiée fin mai dans la revue JAMA Neurology, cette étude, réalisée à partir des données de santé de plusieurs millions de femmes scandinaves, montre que le risque de déficience intellectuelle est plus que triplé chez les enfants dont la mère a pris du topiramate lors de la grossesse. Le risque de troubles de l'autisme est aussi multiplié, quasiment par trois. « Ces risques-là sont nouveaux ; ils étaient jusque-là considérés comme non exclus mais pas caractérisés », a précisé Philippe Vella. Il faut donc plus que jamais « limiter au maximum l'exposition des femmes en âge de procréer et bien évidemment des femmes enceintes à ces médicaments », a-t-il insisté. Si vraiment on n'a pas le choix de prescrire du topiramate, il faut informer la femme sur ces risques. »
Une décision en concertation avec son médecin
Car c'est toute la difficulté du sujet. Chez certaines femmes, seul ce traitement se révèle efficace contre l'épilepsie. A charge, donc, pour leurs médecins d'évaluer si les risques représentés par les crises sont suffisamment élevés pour compenser ceux que le traitement fait courir à l'enfant à naître. A ce titre, l'agence du médicament prévient les patientes sous traitement qu'il faut évoquer la situation avec leur médecin et, surtout, ne pas décider seule d'arrêter de prendre du topiramate. Car « on s'expose à une recrudescence des crises, voire à des crises plus sévères, a noté Philippe Vella. C'est un risque pour la mère elle-même et c'est un risque pour l'enfant. »