« Je ne peux plus m'arrêter de maigrir, c'est plus fort que moi... », « Manger est devenu une obsession ». Anorexie mentale, hyperphagie boulimique, boulimie... En France, 900 000 personnes présentent des troubles des conduites alimentaires (TCA), des maladies méconnues qui sont sources de complications parfois très sévères mais aussi de préjugés. « La moitié d'entre elles ne seront jamais dépistées ni n'accèderont à des soins spécialisés, faute d'un repérage efficace et d'une offre de soin suffisante », gronde la Fédération française anorexie boulimie (FFAB). Pour changer la donne, elle organise, avec le soutien du ministère de la Santé, le 2 juin 2021, la première Journée mondiale de sensibilisation et de prévention à l'échelle nationale. Au programme : conférences, webinars, témoignages, « insta lives », animations et de nombreux événements pour déstigmatiser et mettre en lumière les aides et les traitements existants. #NoMoreTCA... à consommer sans modération.
Les signes d'alerte
Ces maladies psychiatriques touchent aussi bien les enfants que les adolescents et les adultes. Comment les repérer ? Chez les adolescentes -la majorité des personnes touchées sont des femmes-, des variations brutales de poids (perte de 10 % ou plus) et de comportement, mais aussi une aménorrhée, une préoccupation excessive de l'image du corps, de l'alimentation et de la diététique, ainsi qu'une mauvaise estime de soi, doivent être considérés comme des signes d'alerte d'un comportement anorexique ou boulimique. Quand surgissent des crises de boulimie sans comportement compensatoire pour prévenir la prise de poids, on parle d'hyperphagie boulimique, qui s'accompagne souvent d'obésité. D'autres signes comme les vomissements, le suivi « à la lettre » de régimes avec une perte de poids significative, une activité physique intense, peuvent mettre en alerte.
Des idées reçues contre-productives
« Dangereuses, symptomatiques d'un mal-être plus profond, ces pathologies peuvent être mortelles. Passagères ou perdurables, elles sont souvent l'expression physique d'une souffrance psychologique, d'une douleur, d'un dérèglement que la bouche ne peut pas dire et que le corps exprime. Le tabou, la honte, les présupposés, la raillerie qui les entourent empêchent parfois une prise en charge sérieuse », déplore Line Papin, auteure, notamment, de L'éveil et Les os des filles, qui traite de l'impact dévastateur des TCA sur trois générations de femmes, et ambassadrice de la Journée mondiale. « Il suffit d'un peu de volonté pour arrêter les crises de boulimie », « Les TCA, c'est la faute des parents », « Une personne souffrant d'hyperphagie boulimique est forcément en surpoids », « Une personne qui souffre de TCA, ça se voit »... Autant d'idées reçues contre-productives qui altèrent la pose d'un diagnostic et auxquelles la FFAB entend mettre fin le 2 juin.
Une intervention précoce et personnalisée
Pour ce faire, la fédération plaide pour une intervention précoce et un traitement fondé sur des données probantes et souligne la nécessité d'expliquer que les parents/familles/aidants sont des acteurs clés du traitement et du rétablissement de leur proche. Autres objectifs ? Supprimer les obstacles aux soins, surtout chez les jeunes, les étudiants et les populations les plus précaires mais aussi permettre aux personnes atteintes de TCA de pouvoir en bénéficier, quels que soient leur âge et le stade de la maladie. « Près d'un million de personnes sont concernées ; pourtant, c'est seulement en 2021 qu'un événement d'ampleur, impliquant toutes les régions, est organisé au niveau national », conclut Line Papin, espérant qu'il apportera « un éclairage et une écoute qui mèneront les patients vers la guérison ».