Refuge de Rosuel en Vanoise : la montagne tout confort

A l'entrée du Parc de la Vanoise, le refuge de Rosuel ouvre grand ses portes aux visiteurs handicapés. Un bâtiment et des outils de découverte adaptés et des sorties accompagnées permettent à tous de partir à l'assaut de trésors vertigineux.

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Rendez-vous est pris au sommet, à l'entrée du vallon de Rosuel sur la commune de Peisey-Nancroix (Savoie). Un bout du monde pourtant facilement accessible par la D 87. Altitude 1 556 m et sensation garantie avec, pour écrin, le dôme de Bellecôte (3 416 m) et le mont Pourri (3 779 m).

Labélisé Tourisme et handicap

Drôle d'endroit pour une rencontre ce refuge-porte du Parc de la Vanoise que l'on peine à distinguer ; avec son toit végétalisé étudié pour résister aux avalanches, il se fond dans le décor. Ouvert au public du 1er juin au 30 septembre, avec une capacité totale de 48 couchages, il accueille 70 000 personnes chaque saison. Parmi elles, des visiteurs en situation de handicap ; ce refuge-porte, l'une des quatre entrées du "coeur" de Parc, a bénéficié, en 2009, de travaux de mise en accessibilité. Deux chambres ont ainsi été aménagées (une pour les personnes en fauteuil roulant, l'autre pour les personnes sourdes ou malentendantes avec alarme incendie lumineuse), ainsi qu'un élévateur. Depuis le parking, qui dispose de places réservées, un large cheminement carrossable permet d'accéder au point d'accueil. Deux circuits balisés "Rando confort" (800 m et 1,1 km) pour tous sont proposés autour du refuge. Une attention toute particulière est également portée aux personnes en situation de handicap psychique pour éviter la "perte de repères", explique Thierry Arsac, chef de secteur PN Haute-Tarentaise. Le refuge de Rosuel est ainsi labélisé Tourisme et handicap pour les 4 handicaps.

Des aménagements tous handicaps

Avec le soutien de GMF Assurances, qui a déjà financé une soixantaine d'initiatives pour permettre aux personnes en situation de handicap de profiter des trésors des 10 Parcs nationaux français (article en lien ci-dessous), plusieurs outils adaptés sont mis à la disposition des visiteurs pour partir à la découverte du site de Rosuel : un dispositif d'interprétation en braille et audio sur différents thèmes (le Parc, les gypaètes barbus de Peisey-Nancroix, les rapaces nocturnes, le rôle d'un refuge gardé...). Le support destiné aux visiteurs malvoyants est composé de planches textes et de schémas/carte en relief, ainsi que de planches en gros caractères tandis que les trois lecteurs audio sont disponibles sur demande à l'accueil du refuge. Une plateforme d'observation de la faune est également accessible aux personnes en fauteuil. Un programme de sorties adaptées est par ailleurs proposé par les gardes du Parc de la Vanoise.

A la force des bras

Pour le maire de Peisey-Nancroix, ces aménagements ont, certes, un surcoût et sont parfois perçus, au début, par certains, comme de "contraintes" mais cet engagement fait ensuite naître des réactions positives dans l'esprit des locaux. Il explique ainsi qu'une association locale a ouvert une section handiski et en a été récompensée par un titre de champion de France en biathlon handiski. Ce jour-là, le refuge de Rosuel reçoit justement Alain Marguerettaz, 55 ans, sportif de haut niveau. Victime d'un accident en 1985, il est le précurseur du ski assis avec cinq Jeux paralympiques d'hiver à son actif. "Il n'y a rien de plus frustrant, lorsqu'on a un handicap, que de ne pas pouvoir accéder à la nature", explique-t-il. Aux manettes de son handbike, propulsé à la force des bras, rien ne l'arrête. Pas même le chemin qui mène vers le fond du vallon de Rosuel et offre un panorama sublime sur les neiges éternelles.

Quelques précautions

Un groupe de personnes en situation de handicap mental, emmené par l'association Les Papillons blancs, déjeune sur la terrasse ensoleillée, avant de se jeter, elles aussi, dans l'aventure. Elles savourent cette sortie une dizaine de fois par an, avec une nuit programmée dans le refuge. Selon leurs encadrants, "l'intérêt, c'est de produire un effort commun avec des personnes dites "normales" ; lors de la soirée, cet échange permet d'abolir les différences." L'association souhaite pérenniser cette démarche avec l'objectif de "faire de la montagne ensemble, partager le savoir des agents du Parc et s'enrichir mutuellement"

Expertises multiples

A chacun ses compétences ; si les agents du parc ont l'expertise des milieux naturels, les éducateurs spécialisés connaissent, eux, parfaitement leur groupe. "La montagne a ses dangers, objectifs ou subjectifs, confie l'un d'eux. Ce peut être une passerelle à traverser ou un pierrier un peu délicat qui provoquent des réactions que l'on doit savoir modérer. Nous devons alors rester vigilants sur le risque de découragement ou une mauvaise lecture de la fatigue. Dans ce contexte, nous nous arrêtons aussitôt et expliquons que la fatigue n'est pas dangereuse et qu'on peut la dominer". Parfois, à l'inverse, il faut tempérer les ardeurs. "C'est une sortie assez sportive donc nos postulants ont tous de bonnes capacités physiques." Certains groupes traversent même la Vanoise avec des joëlettes (siège sur deux roues) qui permettent d'accéder aux sentiers les plus escarpés. 

Des gardes bien formés

Portés par l'implication des Parcs nationaux, ils sont désormais de plus en plus nombreux, venus de toute la France, à "oser" franchir le pas. Car si la montagne peut sembler assez peu handi-compatible, les freins viennent parfois des personnes elles-mêmes. "Nos guides proposent un accompagnement vraiment spécifique et encouragent les postulants, poursuit Thierry Arsac. Ils ont parfois peur, veulent se désister... Nous apprenons au fil des rencontres, ce qui nous permet de proposer des conseils de plus en plus pertinents. Les échanges sont si riches que les adieux sont réellement déchirants". Pas question, pour autant, d'en faire des tonnes... "Certains nous disent clairement : "Ce n'est pas parce que je suis handicapé que tu dois en faire plus !". Ils refusent même de se faire aider dans les montées un peu raides". Pour ce garde, la plus grande difficulté, c'est de prendre en compte plusieurs handicaps au sein d'un même groupe. "Nous n'avons pas le même registre de communication selon qu'on s'adresse à des personnes polyhandicapées ou trisomiques".

Avec les Montagnes du silence

L'association Les Montagnes du silence, située dans la vallée, à Bourg-Saint-Maurice, fait, elle aussi, partie des habitués. Des jeunes sourds et malentendants ont pu expérimenter cette aventure 4 jours durant, en pleine montagne, venus avec leurs interprètes. Ils ont éteint leur smartphone... "On offre quelque chose de différent dans une société hyper connectée où tout va très vite, se félicite Eva Aliacar, directrice générale du Parc de la Vanoise, qui se dit "émue" par ces expériences qui "donnent du sens à la vie"... "Ce groupe était d'une incroyable vivacité pour observer et a vu bien plus de choses que ceux qui les encadraient", poursuit-elle. "Les personnes sourdes ont une grande soif de connaissances, renchérit l'un des gardes. Nous leur proposons des balades en langue des signes dans le cadre du partenariat avec GMF."

Et pour les individuels ?

Si le Parc de la Vanoise concocte des animations à la demande pour les associations, un calendrier de sorties adaptées est également proposé aux individuels durant tout l'été. "Le plus difficile, c'est de faire connaître nos actions auprès de ce public, déplore Thierry, même si nous avons de plus en plus de contacts avec des familles en vacances. Nous les invitons à se rapprocher du Parc pour obtenir des conseils ou un projet sur mesure avec prêt de matériel adapté". Et de citer le cas d'une jeune fille qui a emprunté un module tout chemin ; une troisième roue fixée en deux minutes à l'avant du fauteuil manuel permet d'augmenter 8 fois sa capacité de franchissement et, ainsi, de se déplacer facilement en terrain varié. "Le tester, c'est l'adopter !", assure-t-il.

Des sorties l'hiver

Pour ceux qui ont raté le coche estival, des sorties sont également expérimentées l'hiver. En mars 2017, une première randonnée dans la neige, adaptée au handicap moteur, a été organisée au départ du refuge de Rosuel. Parce qu'il est impossible de réaliser le trajet dans des fauteuils manuels ou électriques, les participants ont pris place dans des pulkas ou hippocampes nordiques (fauteuils adaptés en position semi-allongée). "Une telle aventure oblige à être hyper vigilants sur les risques médicaux et suppose une logistique importante, explique Thierry Arsac. Il nous a fallu tout préparer avec précaution au moins un mois à l'avance. Mais, désormais, nous sommes au point." Un trajet de 2 km, un petit effort sur les premiers 500 m pour encaisser un léger dénivelé puis la glisse tout confort sur une piste enneigée damée. Décor blanc, immaculé. La Vanoise en majesté (album photo en lien ci-dessous).

En pratique

Refuge de Rosuel : 04 79 07 94 03
Ouvert du 1er juin au 30 septembre
Siège du Parc national de la Vanoise : 04 79 62 30 54

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
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