Dernière minute du 17 mai 2018
L'Assemblée nationale a adopté cette proposition de loi le 17 mai 2018 (article en lien ci-dessous). Elle va maintenant être soumise au Sénat.
Article initial du 10 mai 2018
La commission des Affaires sociales examinait le 9 mai 2018 la proposition de loi de Philippe Berta, député du Gard, relative à la prestation de compensation du handicap (PCH). Elle vise deux objectifs (en lien ci-dessous), qui ne font pas forcément l'unanimité du côté des associations.
1ère objectif : la limite d'âge
Tout d'abord supprimer la barrière d'âge de 75 ans au-delà de laquelle il n'est plus possible, en cas de handicap, d'accéder à cette prestation. Cette limite est jugée « injuste » par Philippe Berta, qui poursuit : « Elle pénalise ceux qui n'ont pas demandé la PCH avant 75 ans mais qui, passé cet âge, sont en difficulté en raison d'un changement dans leur environnement. Par exemple, une personne en situation de handicap peut n'avoir jamais demandé la PCH parce qu'un proche lui apportait toute l'aide dont elle avait besoin. Or, le jour où ce proche n'est plus en mesure de subvenir à ses besoins, elle se retrouve dans l'impossibilité d'en bénéficier. » Attention, cette mesure ne concernerait que les personnes qui sont malgré tout en mesure de justifier, certificats médicaux à l'appui, que leur handicap est apparu avant l'âge de 60 ans (ou de départ à la retraite) ; dans le cas contraire, elles ne peuvent prétendre à la PCH mais uniquement à l'APA (Allocation personnalisée d'autonomie) dédiée aux personnes âgées.
2ème objectif : le reste à charge
La seconde urgence est de réduire le reste à charge des bénéficiaires. Cette proposition prévoit d'organiser, à compter du 1er janvier 2018, une expérimentation sur trois ans, dans les départements volontaires, pour rendre effectif le dispositif garantissant un niveau de reste à charge maximum pour les bénéficiaires de la PCH. Initialement prévue dans la loi de 2005, cette limitation via les Fonds départementaux de compensation n'a jamais pu être appliquée car le décret qui permet de l'appliquer n'a jamais été publié par les gouvernements successifs ! « Cette proposition vise à sortir de l'impasse et à mettre fin aux inégalités qui découlent de la mauvaise application de la loi », conclut Philippe Berta.
Un combat collectif
De son côté, un collectif inter associatif rend public, le 9 mai, un communiqué (en lien ci-dessous) dans lequel il juge « indigne » « la manœuvre engagée par le gouvernement pour contourner la décision du Conseil d'État le condamnant sous peine d'astreinte financière à publier un décret attendu depuis 13 ans, décret prévoyant que le reste à charge pour les ayants droit devant financer l'acquisition d'une aide technique, l'adaptation du logement ou d'un véhicule, n'excède pas 10 % de leurs ressources ! » Le 14 mars 2018, l'association Handi-social avait, pour sa part, déposé une saisine auprès du tribunal pour enjoindre le Premier ministre, Édouard Philippe, à prendre les mesures dans ce domaine (article en lien ci-dessous). Une première en France !
Un recul majeur selon des asso
Handi-social, par exemple, se dit favorable à l'article 1 sur la barrière d'âge même si elle la considère comme une « micro mesure », le vrai combat étant, selon elle, de faire tomber la barrière d'âge de 60 ans pour permettre à toute personne confrontée à un handicap de percevoir cette prestation, quel que soit son âge. Elle est nettement plus arqueboutée sur l'article 2 qui, « contrairement à ce que dit monsieur Berta », est un « recul majeur ». Elle conteste le fait de tester ce dispositif sur trois départements (seulement ?) : « Il n'est pas admissible de vouloir expérimenter une loi votée il y a 13 ans sur un territoire limité », s'indigne sa présidente, Odile Maurin. Elle juge également inacceptable la notion énoncée : « dans la limite des financements de ce fonds ». Selon elle, « si les choses sont faites avec le budget actuel, il devient impossible de respecter cette condition de 10% des ressources nettes de la personne comme reste à charge maximum ». « Cela revient à remplacer l'article de loi tel qu'il était prévu par la loi de 2005 par un autre », poursuit-elle. Elle cosigne une lettre ouverte adressée par un collectif de cinq associations aux 577 députés le 11 mai afin de les alerter sur ce sujet, estimant qu'il n'est plus temps d'« expérimenter » mais de « faire appliquer la loi ». Ce collectif rappelle qu'une telle impasse laisse les personnes handicapées dans des situations financières désespérées, l'acquisition d'un fauteuil roulant pouvant entraîner, par exemple, un reste à charge de 10 000 euros ou tout simplement ne pas être pris en compte par les Fonds dédiés.
Et maintenant ?
La proposition de loi de Philippe Berta a été adoptée en commission par tous les groupes politiques qui la composent. Elle sera présentée le 17 mai 2018 en séance publique dans le cadre de la niche parlementaire du Mouvement démocrate et apparentés -une niche parlementaire permet à un groupe minoritaire de présenter des propositions de loi ; celle sur la PCH fera partie des quatre textes proposés-. Elle a été votée à l'unanimité, preuve, selon son auteur, « de l'urgence qu'il y a à proposer des dispositifs d'amélioration de cette prestation ». Cette adhésion collective devrait lui permettre d'être adoptée par l'Assemblée. Suivra alors le processus de navette parlementaire, système d'allers-retours entre l'Assemblée et le Sénat. Sera-t-elle plébiscitée en l'état ? Le collectif associatif demande, pour sa part, aux députés de rejeter l'article 2. Affaire à suivre…