École à 3 ans dès 2019 : le handicap bienvenu ?

La maternelle devient obligatoire à 3 ans dès la rentrée 2019. Plus question, donc, d'opposer de refus aux enfants en situation de handicap. Un engagement défendu par Emmanuel Macron.

• Par
Illustration article École à 3 ans dès 2019 : le handicap bienvenu ?

« J'ai décidé de rendre obligatoire l'école maternelle, et ainsi d'abaisser de 6 à 3 ans en France l'obligation d'instruction dès la rentrée 2019. » C'est ce qu'a annoncé Emmanuel Macron le 27 mars 2018 à l'occasion des Assises de l'école maternelle, jugeant que cette dernière « n'occupe pas toute la place qu'elle devrait occuper ». Cette obligation était fixée à 6 ans par la loi Ferry depuis le 28 mars… 1882 ! Dans les faits, est-ce vraiment une révolution puisque 97 % des enfants y sont d'ores et déjà admis ? « Parce que ça n'est pas obligatoire, ce chiffre moyen couvre des réalités profondément diverses et des inégalités profondément réelles », nuance le chef de l'Etat dans son discours. Ces « inégalités réelles » concerneraient-elles, entre autres, les enfants en situation de handicap ?

Lieu de socialisation

Le chef de l'Etat insiste sur le fait que « les trois années de maternelle sont celles où se créent les affects, l'attachement, la socialisation », la fabrique du langage aussi grâce à une étonnante plasticité du cerveau. L'école maternelle occupe ainsi une place particulière dans son rôle d'accueil de l'enfant en très grande difficulté ou en situation de handicap. Pour certains, lourdement handicapés, elle sera parfois leur seule expérience de scolarisation ordinaire. Et, pour leurs camarades « valides », elle offre l'opportunité d'être confrontés à la différence dès le plus jeune âge. Selon Emmanuel Macron, cette « école de la bienveillance » doit mieux « accueillir, intégrer, tous les enfants en difficulté et vivant en situation de handicap ».

La loi du côté des parents

Une bonne nouvelle pour les parents qui, pour certains, se voient refuser une inscription au motif que l'école n'est obligatoire qu'à partir de 6 ans ? Et ce en dépit des instructions écrites noir sur blanc sur le site servicepublic.fr : « Chaque école maternelle a vocation à accueillir tous les enfants, quel que soit leur handicap. Les parents peuvent demander l'inscription dès l'âge de 2 ans. Ils ne peuvent se voir opposer un refus au motif que leur enfant est en situation de handicap ou que la scolarité n'est pas obligatoire avant l'âge de 6 ans ». Mais, dans les faits, pour 97 % d'écoliers « valides » qui prennent chaque jour le chemin de la maternelle, combien en situation de handicap ? Difficile de le savoir vraiment. Parce que, à cet âge-là, le handicap n'est pas toujours diagnostiqué. Parce que, lorsqu'il l'est, des temps partiels sont souvent « négociés », concédant quelques heures par semaine. Ce nouveau texte de loi permettra-t-il de contrer les réticences, voire la mauvaise volonté, de certains établissements ? Un plan personnalisé de scolarisation (PPS) devra être rédigé. Une opportunité également pour certains parents, parfois contraints d'abandonner leur emploi faute de solution d'accueil pour leur enfant.

Du personnel en renfort

Pour autant, l'inclusion dès la maternelle ne se fera pas sans un renfort de personnel, là où l'école primaire et secondaire peine encore à recruter. Reste à définir la place des AVS dans ces classes qui accueillent déjà des Atsem en soutien de l'enseignant. « C'est une bonne chose à condition de savoir dans quelles conditions vont être accueillis ces élèves, confirme Agnès Duguet, représentante FSU (Fédération syndicale unitaire) au sein du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées). Il va falloir mettre les moyens correspondants, et notamment abaisser les effectifs. Sophie Cluzel (ndlr : secrétaire d'Etat au handicap) a lancé un vaste chantier de l'école inclusive et une mission sur l'accompagnement des élèves. Nous attendons de voir. »

Et en matière d'autisme ?

En ce début du mois d'avril tout entier absorbé par la question de l'autisme (journée mondiale le 2 et annonce du 4ème plan le 6), Sophie Cluzel a plus spécifiquement axé ses propos sur ce trouble. « A trois ans, âge de l'école maternelle, les enfants autistes doivent avoir été repérés, accompagnés. Ils doivent rentrer à l'école, et par la même porte que tous les enfants de la République. » Rappelons que, depuis 2014, des Unités d'enseignement maternelle autisme (UEM) accueillent sept enfants de 3 à 6 ans au sein d'une école « classique ». Il en existe 112 en France en 2018. Dans le cadre du 4ème plan autisme dévoilé le 6 avril 2018, le gouvernement prévoit de « tripler » le nombre de places dans ces unités. L'objectif est d'y porter le nombre d'enfants accueillis à 2 100.

Des économies d'argent

Lors d'un déplacement au CHU de Rouen le 4 avril 2018 (article en lien ci-dessous), Emmanuel Macron a précisé son propos sur la situation des enfants atteints de troubles ou de pathologies, réaffirmant l'objectif « d'une école inclusive ». Il a ainsi expliqué que le but de la stratégie du gouvernement était de leur « permettre d'avoir une scolarité normale, pour que cette génération (d'enfants autistes nés en) 2018, que l'on pourra dépister le plus tôt possible, puisse rentrer en maternelle à trois ans en 2021. Et qu'on puisse faire rentrer tous les enfants dys ou qui souffrent d'un trouble ou d'une pathologie 'neurodégénerescente', soit dans une unité spécialisée, soit à l'école avec des auxiliaires de vie scolaire. ».

© Dessin : Peter Patfawl

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Emmanuelle Dal'Secco, journaliste Handicap.fr"
Commentaires2 Réagissez à cet article

Thèmes :

 
2 commentaires

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.