Le Gouvernement a dévoilé le 9 septembre 2016 une mesure fiscale qui vise à étendre à l'ensemble des citoyens, qu'ils soient imposables ou non, le crédit d'impôt de 50% des dépenses au titre des services à la personne (notamment handicapée). Cette mesure, qui devrait coûter un milliard d'euros par an dès 2018 et être effective sur les impôts payés en 2018, pourrait permettre de créer 30 000 emplois en équivalent temps plein dans le secteur. Au total, elle bénéficiera à « 1,3 million de ménages » et « permettra une baisse du reste à charge sur les dépenses de service à la personne de l'ordre de 20% en moyenne », selon le dossier de presse du Gouvernement.
Crédit d'impôt pour tous
Jusqu'à maintenant, seuls les particuliers employeurs eux-mêmes actifs, qu'ils soient salariés ou à la recherche d'un emploi, avaient droit à ce crédit d'impôt remboursable. Les autres, inactifs, et notamment les retraités et personnes handicapées, pouvaient uniquement demander une réduction d'impôt. Or nombre d'entre eux n'étant pas imposables, ce dispositif ne leur était donc d'aucun secours. Désormais, tous les particuliers employeurs pourront y prétendre ; ils recevront alors la somme due soit par chèque de l'Etat soit par virement bancaire. Un geste important puisque le fisc rend ainsi à l'employeur la moitié du montant qu'il a dépensé pour payer son employé (salaires et charges). Le hic, c'est l'avance de trésorerie puisque ce dispositif suppose de devoir attendre au minimum un an entre le moment où les dépenses sont engagées et celui où le crédit d'impôt est versé.
Lutter contre le travail illégal
Le même jour, Myriam El Khomri (ministre du Travail) et Christian Eckert (secrétaire d'Etat auprès du ministre des Finances) signaient par ailleurs avec les partenaires sociaux une convention inédite pour lutter contre le travail dissimulé dans le secteur de l'emploi à domicile entre particuliers, devant permettre de mieux informer et sensibiliser les employeurs à l'importance de ne pas recourir au travail dissimulé. Grâce aux exonérations sociales et fiscales mises en place par le Gouvernement, il revient dès lors moins cher de déclarer un salarié que de ne pas le faire. Ainsi, par exemple, l'employeur qui verse un salaire net de 10 euros ne supporterait, après application des exonérations sociales et fiscales, qu'un coût réel à peine supérieur à 8 euros.
Bémol des associations de personnes handicapées
Deux bonnes nouvelles pour « booster l'emploi à domicile », se félicite la Fepem (Fédération des particuliers employeurs de France). Selon elle, « ces deux mesures installent durablement les conditions du doublement du secteur dans les dix prochaines années, pour répondre aux besoins du quotidien des Français. » L'emploi à domicile, qui avait reculé depuis 2012 en nombre d'heures déclarées est d'ailleurs reparti à la hausse au premier trimestre 2016. Mais certaines associations réunies au sein du Comité d'entente des associations représentatives de personnes handicapées) mettent néanmoins leur bémol, et avaient déjà alerté le Gouvernement dès janvier 2016. C'est notamment le cas de l'Unapei qui demande que les aides humaines dont a besoin la personne handicapée puissent être entièrement solvabilisée par une hausse du montant de la Prestation de compensation du handicap (PCH). Les restes à charge (la PCH ne couvrant pas l'intégralité des dépenses) sont parfois si importants que certaines se voient dans la situation d'y renoncer faute de pouvoir les financer immédiatement. La plupart d'entre elles vivent largement en dessous du seuil de pauvreté. « Rétablir une équité entre ménages imposables et non imposables, est une bonne chose, selon Christel Prado, présidente de l'Unapei, mais prendre en compte les besoins de tous les citoyens en appliquant la loi c'est encore mieux. »
Et pour les aidants familiaux ?
Une autre revendication est sur la table. Aujourd'hui, les aidants familiaux sont les principaux intervenants qui assurent la prise en charge de leur proche en situation de handicap. Par choix pour certains, par obligation pour d'autres lorsque leurs moyens financiers ne leur permettent pas de faire appel à une aide extérieure. Leur indemnisation en PCH aide humaine s'élève alors de 3,70 à 5,54 euros de l'heure (selon que l'aidant a cessé son activité professionnelle ou pas) pour une durée limitée à 6 heures par jour (plus éventuellement sur dérogation), contre de 13,61 à 17,77 euros pour un prestataire extérieur (en emploi direct ou service prestataire) (tarifs depuis le 1er avril 2016).
Une imposition incompréhensible
Or, ce montant est aujourd'hui imposable. Selon l'Unapei, « cette imposition est incompréhensible et vécue comme une humiliation supplémentaire par les familles. » Elle en demande le retrait et appelle une nouvelle fois le président de la République à engager « un réel débat sur la compensation du handicap et des ressources des personnes handicapées ». Le chef de l'Etat s'y était engagé, à l'été 2014, à l'Elysée, devant l'ensemble des associations représentatives du secteur. Selon l'Unapei, il devient urgent de « répondre aux besoins vitaux des personnes handicapées ». L'association dit ne pas vouloir se contenter de cette « sucette fiscale qui a des airs de mesure de précampagne ».
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