Pekin, 11 sept 2008 (AFP)
Par Julie DUCOURAU
"Certaines personnes abandonnent facilement. Pas moi. Je me suis battu, et encore battu pour atteindre mon but", explique-t-il.
"C'est un accomplissement dans ma vie", reconnaît-il, avec un fort accent, fier d'être désormais membre à part entière de cette communauté qui l'a accueilli à bras ouverts il y a dix ans.
A 38 ans, Fekadu doit tout à l'Australie. "J'étais un réfugié politique" sans travail, ni revenu, ni protection sociale. "Les Australiens ont tout fait pour moi, physiquement, matériellement, émotionnellement", glisse-t-il d'une voix douce et posée qui contraste avec la taille de ses biceps.
Réunions pro-démocratie
"C'est un bon peuple, ils sont gentils et généreux", poursuit-il.
Désireux de tirer un trait sur le passé, Fekadu explique que pour lui,"une nouvelle vie a commencé, un nouveau voyage, vers de nouveaux objectifs". "Ce qui est passé est passé, il faut regarder vers le futur", insiste-t-il.
Aujourd'hui, "je suis Australien".
Abebe n'a que huit ans lorsque son père est exécuté par la dictature marxiste de Mengistu, aujourd'hui en exil au Zimbabwe et condamné à mort par la Cour suprême d'Ethiopie en mai dernier. "Ils n'aimaient pas les hommes d'affaires", dit-il.
Sa famille est alors une "cible" pour le gouvernement mais reste en Ethiopie n'ayant "pas de moyens de quitter le pays".
Adulte, Fekadu participe à des réunions secrètes pro-démocratie, que la police ne tarde pas à découvrir. En 1997, c'est lors d'une course-poursuite avec les forces de l'ordre qui s'achève en accident de voiture que Fekadu perd l'usage de ses jambes, atteint d'une lésion de la moelle épinière.
Départ pour l'Italie où il rejoint son frère et se fait soigner. Au bout d'un an et demi, ils partent ensemble comme réfugiés politiques en Australie, un pays qui a déjà accueilli leur soeur.
Représenter "mon pays"
Peu après son arrivée, Fekadu entre dans un gymnase à Brisbane, sur son fauteuil roulant. "Il voulait faire un peu d'exercice", explique son entraîneur de toujours, Ramon Epstein. "Il a la bonne attitude et il est très déterminé", confie-t-il. "Il travaille dur, il n'y a pas de recette magique", sauf peut-être "un bon entraîneur !", dit-il en riant.
Champion d'Australie de 2004 à 2007, Abebe remporte la médaille d'argent à la Coupe asiatique d'haltérophilie à Kuala Lumpur en 2007, "content et très excité" de représenter son nouveau pays pour la première fois lors d'une compétition internationale.
Avec un record personnel à 160 kg, Fekadu, qui concourt chez les moins de 56 kg, n'a pas réussi à soulever plus de 155 kg lors de la finale à Pékin jeudi, et termine à la 10e place. Mais pour lui, les récompenses sont accessoires, c'était "déjà un rêve d'être aux Paralympiques pour représenter mon pays".
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