Dans un arrêt marquant de 2002, la Cour suprême des États-Unis a conclu que le Huitième amendement de la Constitution qui prohibe « tout châtiment cruel et inhabituel » interdisait l'exécution d'un condamné en situation de déficience mentale. Mais elle a laissé à chaque État la discrétion d'établir les critères pour déterminer le seuil de ce handicap. Un grand nombre d'entre eux ont ainsi fixé la limite à 70 points ou moins de quotient intellectuel (QI).
Le cas de l'Alabama au cœur du débat
En Alabama (sud), Joseph Smith a vu sa peine capitale pour un meurtre commis en 1997 annulée par un tribunal fédéral puis une cour d'appel, bien que cinq tests aient établi son quotient intellectuel entre 72 et 78. Ces juridictions ont tenu compte, pour le déclarer handicapé cognitif, à la fois de l'inévitable marge d'erreur des tests de QI et de témoignages d'experts sur ses capacités cognitives, notamment son niveau scolaire.
Des résultats variables aux tests de QI
Les juges de la Cour suprême se sont longuement interrogés, le 10 décembre 2025, sur la fiabilité et l'interprétation de multiples tests de QI aux résultats parfois variables. Le représentant de l'Alabama, Robert Overing, leur a demandé de s'en remettre à la décision du jury qui l'a condamné sur la base de son score de 72, le plus bas des cinq qu'il a obtenus, soit « le plus en sa faveur ». « Et ce qu'il s'est passé pendant les décennies suivantes n'a fait que confirmer ce que le jury savait déjà, à savoir qu'il n'est pas handicapé mentalement », a-t-il assuré.
Le handicap ne se résume pas à un test
Mais une des trois juges progressistes, Ketanji Brown Jackson, lui a reproché de « modifier les critères » d'évaluation du handicap cognitif pour « tout faire reposer sur les tests de QI ». Le handicap cognitif ne peut pas se réduire aux « résultats de tests de QI » parce que c'est un état médical, « pas un résultat de test », a également plaidé l'avocat du condamné, Seth Waxman. Il a exhorté la Cour suprême à ne pas « édicter une règle contraignante » qui interdirait aux États de prendre en compte « des éléments que ces États et la communauté médicale considèrent comme probants en matière de facultés cognitives ».
Vers une jurisprudence unifiée ?
Mais plusieurs des juges conservateurs ont paru désireux de parvenir à une règle « générale » pour qu'un condamné puisse invoquer la déficience mentale. Cette solution présenterait l'avantage d'apporter « davantage de cohérence et de prévisibilité, un des principes cardinaux de la jurisprudence de la Cour suprême en matière de peine capitale », a ainsi estimé l'un d'entre eux, Samuel Alito. La décision de la Cour est attendue d'ici le terme de sa session annuelle, fin juin.
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