Monsieur le Président, je vous fais une lettre...

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Michel Orhuh est en colère. Sa fille, Mégane, s'est fait renverser par une voiture il y a dix ans. Paralysée, muette... Mais au fil du temps, grâce à une prise en charge soutenue des ses parents, elle reprend peu à peu possession de son corps et peut même être scolarisée dans l'école de son village. En 2003, ses parents divorcent. Mégane est confiée à sa mère et intègre un IME. Depuis, Michel se bat pour qu'elle puisse retourner dans le système scolaire ordinaire. Dur dilemme que connaissent bien des parents : intégrer ou ne pas intégrer, that is the question ! Le point avec un papa indigné, combatif, prêt à tout.

Pourquoi vouloir scolariser votre fille dans un collège ordinaire ? Certains enfants handicapés souffrent de cette intégration à tout prix !
Toute la différence, c'est que Mégane clame haut et fort qu'elle souhaite quitter son IME. Au point qu'elle a même pris un avocat pour se faire entendre. Mais voilà ce que répond le tribunal : « Compte tenu des explications fournies par l'avocate de Mégane et du handicap de l'enfant, son audition ne saurait être considérée comme étant de droit. » Mon ex femme refuse également d'entendre le point de vue de sa fille et tous prétendent que c'est moi qui l'influence.

Et c'est peut-être un peu le cas, même si cela part d'une bonne intention ?
Très honnêtement, non ! Mégane est partie en colonie, elle va dans un centre aéré, reçoit plein de lettres de ses copines. J'ai même trouvé un club de danse qui acceptait de l'intégrer, en fauteuil, dans sa chorégraphie. Mais la maman a refusé pour une question d'emploi du temps ! Mégane adore vivre au milieu des autres enfants. Elle n'est pas handicapée mentale et ne souffre pas de cette différence. C'est son choix. Et si vraiment, elle devait être rejetée, je serais là pour l'entendre et capable de revenir sur ma décision.

Vous êtes seul à défendre ce point de vue ?
Bien sur que non. La MDPH a reconnu ses aptitudes, la psychologue qui la suit depuis 2006 appuie son choix, le collège a tout mis en place pour favoriser son intégration dans le cadre d'une classe UPI tandis que la Commission des droits et de l'autonomie lui a attribué une Assistante de vie scolaire individuelle (AVS) à temps plein. Et malgré cela, le juge des affaires familial a ordonné, en octobre 2008, son maintien en institution.

Alors pourquoi, dans ce cas, n'arrivez-vous pas à vous faire entendre ?
Je suis devenu « l'emmerdeur » ! Ma femme a le dernier mot parce qu'elle sait jouer des sentiments. En fait, je crois qu'elle a été soulagée de trouver une place en institution et qu'elle ne veut pas prendre le risque de la perdre. J'ai également proposé une garde alternée mais elle m'a été refusée. L'enquête sociale a révélé que tout le travail de socialisation se faisait avec moi. Il n'y a aucune raison objective à ces refus, à part la méconnaissance de la justice par rapport au handicap. Allez chercher un juge des affaires familiales qui connaisse un tant soit peu ce domaine !

Pensez-vous que, dans ce genre d'affaire, la parole des pères est souvent moins entendue ?
C'est évident. La société a toujours tendance à penser que les mères savent davantage ce qui est bon pour leur enfant. J'ai contacté l'association SOS papa et je ne suis évidemment pas le seul dans ce cas. Mais il est vrai que ma situation est encore plus singulière car je connais peu de papas d'enfants handicapés qui luttent à ce point. Beaucoup quittent le navire ! Je crois qu'on veut me coller l'image du mari qui veut juste embêter son ex-femme.

Quand voyez-vous votre fille ?
Elle habite à 60 km de chez moi. Je la prends un mercredi et un samedi sur deux. Elle vit chez sa mère et intègre l'IME en tant que demi-pensionnaire.

Comment en vient-on à s'adresser au Président ?
Cela fait six ans que je lutte et je me suis dit que c'était mon ultime espoir. J'ai pris cette initiative sur les conseils de l'association CHA (Coordination handicap autonomie) qui gère notamment les problèmes de maintien à domicile des personnes handicapées. Ils avaient déjà écrit à la Présidence.

Quelle est votre plus grosse rancœur dans ce combat ?
La cécité de la justice mais surtout les six années perdues par Mégane. Elle ne bouge plus, est devenue obèse et perd chaque jours un peu plus le moral.

Michel Orhuh

Tél : 03 88 94 20 99

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