Je vois la vie comme un éternel défi contre la maladie

Témoignage d'une trentenaire en fauteuil roulant profitant au maximum de la vie malgré la maladie au quotidien.

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Illustration article Je vois la vie comme un éternel défi contre la maladie

 

Je suis une jeune femme de trente ans, atteinte d'une maladie neuromusculaire depuis l'âge de 11 ans. Peu à peu, le fauteuil roulant est entré dans ma vie. Aujourd'hui, il ne me quitte plus et me permet d'explorer le monde autant que je veux. La maladie a forcément changé ma vie. Mais elle a surtout changé ma façon de l'aborder. Je crois qu'elle m'a appris à attraper les instants de bonheur au vol, là où ils sont. Le quotidien est parfois contraignant alors il faut savoir apprécier de petites choses, des choses simples. Ce que je sais, c'est que la maladie ne m'empêchera jamais d'être libre de faire ce que que je veux, comme tout le monde. Même si cela est un peu plus compliqué parfois... Cela vaut le coup de se battre chaque jour ! Mon blog   (lien en bas de l'article) me permet d'ailleurs d'y raconter mes aventures, bonnes ou mauvaises.

J'ai appris que j'étais malade à l'âge de onze ans. Les premières années n'ont pas été faciles du tout. C'est douloureux de voir son corps changer à cause de la maladie. Se dire qu'il ne sera plus jamais le même. Et que ça peut encore évoluer dans le temps. L'incertitude fout les boules. Un médecin te dit qu'un jour tu ne marcheras plus. Mais ne te dit pas quand. Du coup, quand tu sens ton corps fatiguer, tu te voiles la face et te dis que ce n'est pas possible. Tu vas même jusqu'à pousser tes limites de plus en plus loin. Pourtant, c'est le cas. Tu te fatigues chaque jour de plus en plus et ne peux plus faire les mêmes choses qu'avant.

Un jour, ce même médecin t'annonce que tu devras prendre un fauteuil roulant pour te déplacer.Là, ça en est trop. Tu pètes les plombs. Tu refuses catégoriquement. Il n'en est pas question. D'ailleurs, tu ne comprends même pas de quoi il te parle. Un fauteuil ? Non, pas pour moi. Pas besoin. Pourtant, ce fauteuil débarque dans ma vie. Malgré moi. Contre moi. Parce qu'accepter cet objet dans ma vie est, pour moi, accepter que la maladie prend de plus en plus de place. Et ce constat m'a longtemps mise en colère. C'est simple, vous m'auriez rencontrée à l'époque, vous n'auriez eu qu'un seul mot à l'esprit: colère.

C'est le premier des sentiments négatifs que la maladie a apporté dans ma vie. Je vivais très mal sa présence. Je ne comprenais pas pourquoi cela m'arrivait à moi. Je me demandais ce que j'avais fait de mal pour mériter cela. Je souffrais beaucoup de voir mon corps changer et l'acceptais encore moins. Comment accepter cela à un âge où l'apparence compte énormément ?Je me sentais différente et cela ne me plaisait pas du tout. Les autres étaient debout et moi, j'étais obligée de me déplacer assise, en fauteuil roulant. Croyez-moi, voir le monde assis n'a rien à voir. Le rapport aux autres est très différent. Ne plus se mettre debout du tout fait très mal. Sentir son corps dans l'incapacité de le faire est insupportable. Tu as beau essayer de toutes tes forces, rien n'y fait. Nada. Rien ne se passe. C'est fini.

C'est là que la phase d'acceptation a du commencer pour moi. Sans que cela soit forcément conscient sur le moment. Je réalise aujourd'hui que j'ai du faire le deuil de ma personne debout. Pour accepter la nouvelle personne assise. Quelque part, je pourrais considérer qu'il y a moi avant et moi après. Il a fallu faire un long travail sur moi. J'ai du réapprendre à vivre différemment. Car ne plus pouvoir se mettre debout du tout complique considérablement le quotidien. Tu commences à ne plus pouvoir te lever le matin seule, ne plus pouvoir te laver, t'habiller seule. Faire des courses, faire le repas seule devient vraiment compliqué. C'est à partir de ce moment là que j'ai du faire appel à des auxiliaires de vie pour m'aider. Je l'ai très mal vécu au début. Très mal. La dépendance est très difficile à accepter. Cela me rendait triste de ne plus pouvoir faire les choses seule. J'avais mon corps en horreur. Parce que j'avais l'impression qu'il ne me servait plus à rien. J'avais honte de devoir me faire aider. Ne plus faire seule sa toilette est humiliant, au début. C'est très gênant. Même si tu sais que ces personnes sont habituées, que c'est leur métier. Tu as honte, tu n'es pas à l'aise avec cela.

Et puis un jour, tu t'habitues. Le fait de te faire aider au quotidien ne te dérange plus trop. Beaucoup moins en tout cas. C'est comme ça. C'est la vie. C'est ta vie. Tu dois faire avec. Il le faut pour te sentir bien. Aujourd'hui, à trente ans, je n'ai plus honte de mon corps. Je suis en phase avec lui. J'ai appris à accepter mon image. Alors bien sûr, ce n'est pas forcément facile tous les jours. Il y a des jours avec et puis il y a des jours sans. Ce que je sais, c'est que malgré la maladie, j'aime la vie. Même dans les moments difficiles à traverser, j'essaie toujours de m'accrocher à toutes ces choses, petites ou grandes, que je suis capable de faire. Malgré tout. Je me battrai toujours pour ce droit à la vie, au bonheur, au bien être, malgré la maladie. Même si cela demande beaucoup de patience et de volonté, certains jours. Toutes ces choses n'ont pas de prix.

J'au récemment pris conscience que grâce au fait de tenir mon blog (lien en bas de l'article)  grâce au fait d'écrire régulièrement, je suis plus à l'aise avec mon corps. Plus à l'aise face à mon handicap. Je n'ai plus honte. Je me sens, au contraire, plus forte. Plus en phase avec moi même. Je sais aujourd'hui qui je suis. J'ai grandi grâce à ces mots posés sur le clavier. J'ai comme l'impression de m'être construite petit à petit. Au fil des mois. Au fil des écrits. J'ai trouvé dans l'écriture un compagnon de route. Un compagnon qui me suit chaque jour et m'aide à me battre à chaque instant. Les mots me donnent du courage et surtout m'empêchent de baisser les bras quand les épreuves se font trop lourdes. L'écriture a changé ma vie, comme si les mots devenaient le remède contre la maladie...

 

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