Le pot de terre contre le pot de fer ? Odile Maurin, représentante départementale de l'APF (Association des paralysés de France) en Haute-Garonne depuis 2013, a fait l'objet d'une procédure d'exclusion par le Conseil d'administration national de l'APF en décembre 2015.
69 frondeurs dans la bataille
Elle dénonçait les dysfonctionnements démocratiques de l'association et avait été, avec 69 élus et militants, à l'origine de la diffusion d'un manifeste interne (en lien ci-dessous) appelant l'association à transformer ses pratiques et à respecter son projet associatif. Or, selon Odile et ses camarades, « en dépit des proclamations de bonnes intentions, l'association a décidé d'essayer de faire taire ceux qui remettent en cause des procédés autoritaires et peu respectueux des règles élémentaires de la vie associative, et un militantisme de façade ». Ces 69 frondeurs ont décidé, pour alerter les adhérents APF, de lancer une pétition publique (en lien ci-dessous). Odile Maurin a par ailleurs fait appel à la justice en saisissant le Tribunal de grande instance de Toulouse d'une requête pour faire annuler son exclusion (article en lien ci-dessous). Il s'est déclaré incompétent et a renvoyé le « bébé » vers celui de Paris, mais l'avocat de la plaignante a saisi la cour d'appel de Toulouse qui jugera sa contestation le 13 septembre 2016.
Une autre affaire similaire
D'autres affaires internes ressortent des tiroirs, et notamment celle d'un élu APF de Savoie qui avait été exclu en 2011 et avait obtenu la condamnation de l'association en 2012 par un TGI et en 2014 par la cour d'appel de Chambéry. « Sans que jamais les adhérents et les élus APF n'en aient été informés, s'étonne Odile Maurin. » Ce qui vaut pour la Savoie ne vaudrait-il pas ailleurs ? La justice jouant la montre, la militante ne pourra donc pas être réintégrée pour l'Assemblée générale de l'association qui a lieu le 25 juin 2016 à Clermont-Ferrand. A cette occasion, 25 élus, ex-élus et adhérents de l'association ont décidé de soumettre une motion pour « défendre une réforme de la gouvernance et pour une démocratie participative » aux votes des adhérents. Pourtant, le Président et le CA refusent, selon elle « sans motif valable » de soumettre cette motion, « empêchant les adhérents de trancher et d'exprimer leurs positions ».
Une AG désertée
Les signataires ont adressé un recommandé au Président pour contester, demeuré sans réponse. Et de regretter que tout soit organisé pour « limiter et restreindre l'expression de la volonté des adhérents, avec une démocratie de façade ». Selon les chiffres avancés par Odile Maurin, l'AG réunit seulement 400 participants (présents et représentés) sur 23 000 adhérents. Sans possibilité de voter à distance. « Un comble pour des personnes à mobilité réduite, selon elle ». Odile et ses fondeurs feront le voyage et appellent « les adhérents présents à l'AG à manifester leur colère » sur le fonctionnement et les réformes en cours en votant contre les différents rapports 2015. Ces élus et ex-élus APF, révoltés, se disent « prêts à témoigner de ce qui se passe ».
Militant de terrain contre tour d'ivoire ?
Odile Maurin sera à Clermont-Ferrand non pas en tant qu'élue mais bénévole. Elle redoute que l'entrée ne lui soit refusée mais a prévu de prendre place dans le hall pour informer les adhérents. Et de conclure : « S'agissant d'une association reconnue d'utilité publique, dont le fonctionnement est contrôlé par le ministère de l'intérieur, on peut s'interroger sur le silence des pouvoirs publics sur ce fonctionnement anti-démocratique. » Plus globalement, cette bataille juridique alimente le débat sur la place des bénévoles et élus au sein des grandes associations gestionnaires de personnes handicapées… Ces forces vives qui donnent de leur temps au quotidien sur le terrain sont-elles assez entendues par un pouvoir centralisé, qu'Odile prétend « enfermé dans sa tour d'ivoire » ?