On l'appelle « la maladie du contorsionniste » mais le syndrome d'Ehlers Danlos (SED) fait encore peu parler de lui. Si aucun traitement n'existe, les recherches des dernières années ont permis de l'identifier avec plus de précision. Il en existe 24 types répertoriés, dont le plus commun, le SED hyper mobile, se caractérise par une hyperlaxie articulaire et une peau fine, très élastique. Valérie Gisclard, présidente et fondatrice de l'association AMSED Génétique, qui finance la recherche depuis 2011, est atteinte du SED. Elle organise, le 30 septembre 2016 à Lyon (Novotel Lyon-Part-Dieu, de 8h15 à 17h30), le 2e Congrès international sur la maladie, qui se tiendra en présence de nombreux spécialistes européens. L'occasion de mettre en lumière des témoignages concrets et de faire le point sur les protocoles de soin actuels.
Dix à quinze luxations par jour
Symptôme principal du SED, l'hyper mobilité (à ne pas confondre avec une grande souplesse) des personnes qui en souffrent induit une grande instabilité articulaire. « Il m'est déjà arrivé de me luxer l'épaule jusqu'à 10 ou 15 fois en une journée », raconte Valérie Gisclard. Mais cette maladie héréditaire se manifeste de nombreuses autres façons : troubles digestifs, hématomes spontanés, dents fragiles, déchirures de tendons, de muscles et de ligaments ... « Nous assimilons également l'anesthésie très rapidement, ce qui explique que nous pouvons nous réveiller durant une opération », poursuit Valérie. Comme les tissus conjonctifs et collagènes sont affectés, l'ensemble du corps est atteint. « Aujourd'hui, on nous bricole, on nous prend pour des personnes douillettes parce que très peu de professionnels de santé connaissent la maladie ».
Un nouveau test génétique
Chaque année, AMSED Génétique finance la recherche à hauteur de 20 000 euros par an. Grâce à cette somme, un des cinq projets soutenus par l'association, « le séquençage de l'exome », permet désormais d'effectuer une prise de sang sur les membres d'une même famille, issus de différentes générations, pour étudier les nouvelles machines à séquençage (20 000 gènes peuvent être analysés). Une avancée non négligeable, même si les gènes responsables de l'hyper mobilité ne sont toujours pas détectés.
Vers un protocole de soin national
En 2016, l'association se lance dans un nouveau combat : la mise en place d'un Protocole national diagnostic et soins (PNDS) pour une prise en charge et un parcours de soin établis par des experts au niveau national. Ce « label », mariage constitutif pour lequel le centre de référence de Garches (région parisienne) est mandaté, fait partie du Plan national maladies rares du Ministère de la santé. Une fois défini, il garantira un service de soins pluridisciplinaire, composé de spécialistes répartis dans tout le pays. « Grâce au PNDS, il sera possible d'obtenir un suivi personnalisé après le diagnostic et de bénéficier d'un protocole de soins reconnu en France », affirme Valérie. Pour le mettre en place, des professionnels de santé tentent de définir ensemble les besoins réels d'un patient qui présente des symptômes d'hyper mobilité. « Tout sera établi par écrit. Les soins pourront, bien sûr, être améliorés en fonction de l'avancée des recherches mais la prise en charge, au moins, ne sera plus à remettre en question ».
Trop de diagnostics erronés
Comme le gène à l'origine de la maladie n'est pas identifié, le diagnostic reste clinique ; mais cette mesure d'envergure nationale mettrait fin au calvaire enduré par des milliers de malades pendant des années pour arriver à une prise en charge adaptée. Complexe à analyser, le SED est chronophage : « Il peut se passer 20 ans avant que tous les symptômes puissent être associés à un diagnostic d'Ehlers Danlos », précise Mme Gisclard. Parfois, des parents d'enfants malades sont accusés de maltraitance par le corps médical, mal informé, qui ne voit pas d'autre explication à des hématomes spontanés ou à des luxations à répétition. Des patients sont considérés comme dépressifs et redirigés vers une thérapie psychologique. En plus de faire avancer les recherches, il est donc primordial d'informer les professionnels de santé mais aussi les écoles et le grand public… afin de faire sortir de l'ombre cette pathologie aux multiples facettes.
© Valérie Gisclard