20 avril 2017 : attentat sur les Champs-Elysées. Le débat des 11 candidats à la présidentielle sur France 2 est interrompu ; les interprètes en LSF (langue des signes françaises) présents en direct ne sont pas invités à poursuivre leur traduction. Pour les téléspectateurs sourds, c'est le silence… Le matin même l'association Sourds en colère avait manifesté devant le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) à Paris pour exiger l'accessibilité des programmes de télévision.
Le CSA lance une enquête
Au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 déjà, le CSA avait été saisi par de nombreuses associations au sujet de l'absence ou de la mauvaise qualité de l'accessibilité aux personnes sourdes et malentendantes des programmes ayant couvert ces événements. Il annonçait alors qu'il procèderait au cours de l'année 2016 à des opérations de contrôle (menée par Avamétrie auprès de 16 256 téléspectateurs sourds et malentendants) de l'ensemble des obligations d'accessibilité audiovisuelle pour en vérifier le respect et la qualité. L'enquête, publiée le 19 avril 2017, fait 5 constats.
Des sous-titrages insuffisants
Premier constat : la bonne qualité du sous-titrage des programmes diffusés en différé mais les difficultés persistantes lors des directs. 31% des téléspectateurs se plaignent d'une absence de sous-titrage, tous équipements et toutes chaînes confondus. La loi handicap de 2005 fait pourtant obligation à certaines chaînes majeures en termes d'audience (les 5 chaînes de France Télévisions, TF1, Canal+, M6, C8, W9 et TMC) de rendre accessibles La totalité de leurs émissions, à l'exception des messages publicitaires et de quelques programmes dérogatoires. Pour les autres, une convention fixe les proportions, entre 20 et 60%. Le taux de satisfaction s'agissant de la qualité du sous-titrage est au plus bas pour les chaînes d'information en continu et les programmes consacrés à l'actualité électorale.
LSF : 6h30 par semaine
L'enquête mentionne ensuite la qualité peu satisfaisante et un volume encore trop faible de programmes interprétés en Langue des signes française. Chaque semaine, seulement 6h30 ! Cette proportion est d'autant plus remarquable et critiquée en période électorale.
Audiodescription : peut mieux faire !
Des efforts restent également à fournir en matière d'audiodescription ; même si les 10 préconisations de la charte relative à l'audiodescription sont globalement respectées par l'ensemble des chaînes étudiées par Avametrie, cette charte est remise en question par la majorité des professionnels du secteur ainsi que par des associations de personnes aveugles ou malvoyantes. En effet, elle n'aborde pas de nombreux points pourtant essentiels à la production d'une bonne audiodescription, par exemple la prise en compte de l'univers sonore d'un film.
Maigre actualité électorale
Le quatrième constat fait état de la très faible proportion de programmes consacrés à l'actualité électorale rendus accessibles (sous-titres et LSF), notamment les débats politiques. De nombreuses saisines ont été adressées au CSA à ce sujet. Selon la loi, les principaux éditeurs de services de télévision sont tenus d'assurer l'accès, par sous-titrage ou langue des signes, à l'ensemble des programmes consacrés à l'actualité électorale. Enfin, cette étude constate la reprise relativement bonne des flux de sous-titrage et de LSF, contrairement au flux audiodécrits, par quatre fournisseurs d'accès à internet : Bouygues, Free, Orange et SFR.
Et maintenant ?
Comme il s'y est engagé, notamment lors de la réunion de la Commission nationale culture et handicap du 27 janvier 2016, le CSA va restituer les principaux résultats de cette étude, dans le courant du premier semestre 2017, aux chaînes de télévision concernées et aux principales associations de personnes en situation de handicap visuel ou auditif ainsi qu'au Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Par ailleurs, s'agissant de la charte relative à l'audiodescription, le Conseil envisage de rencontrer les auteurs ainsi que les associations afin de procéder, si nécessaire, à la révision de cette dernière. Enfin, s'agissant des quatre fournisseurs d'accès à internet, le CSA envisage de leur adresser un courrier afin de les informer des divers dysfonctionnements relevés et leur en demander les raisons.