Dans un document, qu'elle prévoyait de commenter le 7 mars 2016 à Paris lors d'une conférence de presse, l'ONG française dresse un bilan de cinq ans de conflit qui « fait froid dans le dos » : 250 000 morts, 1 million de blessés, 13,5 millions de personnes dépendant de l'aide humanitaire à l'intérieur de la Syrie et 4,6 millions de réfugiés dans les pays voisins. « La population syrienne est quotidiennement prise pour cible par les bombardements », souligne-t-elle : « tirs de mortier, de roquettes, de missiles, d'engins explosifs improvisés, bombes barils larguées par hélicoptère, bombes à sous-munitions...»
Besoin de prothèses et de rééducation
Les armes explosives « tuent et blessent aveuglément », « provoquent des blessures sévères (brûlures, amputations, fractures complexes...), génèrent des handicaps et des troubles psychologiques durables ». Selon Handicap International, qui appareille notamment les victimes, « des dizaines de milliers de personnes ont besoin de prothèses et de rééducation fonctionnelle ». Ces armes laissent par ailleurs « des résidus appelés 'restes explosifs de guerre', qui risquent d'exploser à tout moment, rendant impossible un retour à la vie normale dans les quartiers touchés. Une mobilisation sans précédent de la communauté internationale sera indispensable pour déminer la Syrie. Il faudra sans doute plus de 30 ans pour parvenir à éliminer les risques », estime Emmanuel Sauvage, coordinateur régional de Handicap International en déminage et prévention.
10 munitions par mètre carré
Parmi les « particularités » du conflit, « les charges associées aux engins explosifs improvisés sont considérablement supérieures à celles utilisées pour les mines antipersonnel », explique ce spécialiste. Les équipements de protection des démineurs « sont inutiles face à des charges si puissantes », il faut donc « adapter les techniques de déminage ». Emmanuel Sauvage évoque aussi l'existence d'un « millefeuille explosif » dans les zones urbaines touchées. Lors d'une étude menée en avril 2015 à Kobané, Handicap International a observé « une présence moyenne de 10 munitions par mètre carré dans le centre » de cette ville dévastée du nord de la Syrie. Il y a « une première couche de bombes à désamorcer, puis une couche de gravats sous laquelle se trouve une couche potentielle d'engins explosifs ». « Cela constitue des risques énormes pour la sécurité et prolongera les opérations de dépollution », prévient l'ONG, qui évoque un préalable « impératif » aux opérations de déminage : « l'arrêt des hostilités ».
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