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Autisme, dys, TDAH : les bienfaits du jeu d'échecs?

Longtemps considéré comme un jeu élitiste, les échecs font de plus en plus d'adeptes et séduisent jusqu'aux professionnels de santé. La Fédération française lance un programme pour mesurer les bienfaits sur les troubles autistiques, dys et TDAH.

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Illustration article Autisme, dys, TDAH : les bienfaits du jeu d'échecs?

DERNIERE MINUTE DU 12 AVRIL 2023
Face au succès du programme pilote mené dans quatre centres médico-sociaux depuis septembre 2022, Infinite échecs sera élargi, dès septembre 2023, à 40 nouveaux centres spécialisés en autisme en Ile-de-France, Occitanie et Guyane.

De nouvelles études en perspective

Durant cette première étape, quatre groupes de quatre enfants ont suivi un parcours d'apprentissage adapté du jeu d'échecs dans des établissements spécialisés de la fondation Ellen Poidatz et de l'ADAPEI (Association départementale de parents et amis de personnes handicapées mentales) de Guyane. Amélioration de la concentration, capacité de mémorisation, construction logique, évolution des interactions sociales... « Les bienfaits observés lors de la phase pilote vont pouvoir être objectivés grâce à de nouvelles études, plus larges et suivies dans le temps », se réjouit la Fédération française des échecs (FFE).

Lancement officiel le 17 avril

Le programme Infinite autisme sera officiellement lancé le 17 avril à 18h, au sein du conseil régional d'Ile-de-France. Trois tables-rondes seront également organisées : Infinite autisme dans le monde, bilan du programme en IDF et en Guyane et perspectives envisageables (déploiement, enrichissement de la méthode et de l'évaluation). L'événement se tiendra notamment en présence de Laurent Fressinet, l'un des secondants (personne chargée d'aider un joueur dans sa préparation) du champion du monde Magnus Carlsen et parrain d'Infinite autisme.

ARTICLE INITIAL DU 16 MARS 2022

Handicap.fr : Franck Droin, en tant que président de la Commission santé et handicap de la Fédération française des échecs (FEE), vous développez, en partenariat avec la Fédération internationale des échecs (FIE) et l'Institut Imagine, « Infinite », un programme inédit dont le but est de mesurer les bénéfices des échecs chez les enfants avec autisme, troubles dys  et de l'attention (TDAH). Pourquoi les échecs ?
 
Franck Droin : Nous avons remarqué que jouer aux échecs pour un enfant autiste, dys ou avec des troubles de l'attention avec ou sans hyperactivité (article en lien ci-dessous) peut avoir des effets positifs en termes relationnel, de repérage dans l'espace, de concentration, de sociabilisation car, assez naturellement, ils vont s'ouvrir plus facilement aux autres. Grâce à sa grammaire commune, c'est un jeu universel et intergénérationnel. Le joueur va également apprendre la gestion du temps et des priorités. Ce jeu « borné » est très séquentiel, divisé en 64 cases blanches et noires, les formes de pièces sont plutôt bien découpées. Enfin, dans la conscience collective, il s'agit d'un jeu d'intelligence socialement valorisant. C'est forcément bien pour l'enfant, il y a un a priori très positif. Par exemple, si un élève en difficulté se lance dans cette activité, le regard du corps enseignant va changer.

H.fr : Les jeux d'échecs sont d'ailleurs déjà très répandus dans les écoles…
FD : Oui, la FFE a signé en mars 2022 une nouvelle convention avec le ministère de l'Education nationale pour l'introduction du programme « Class'Echecs » dont le but est de renforcer la pratique en milieu scolaire. Pour en revenir à notre sujet, dans l'équipe que j'anime, l'un des professionnels de santé a l'intuition que plus tôt ces enfants utiliseront les jeux d'échecs, notamment avant la lecture, plus tôt les troubles dys seront corrigés.
 
H.fr : Vous parlez d'intuition… S'agit-il de constats empiriques pour le moment ou existe-t-il des études ?
FD : On est effectivement pour l'instant dans le constat intuitif. Nous ne disposons pas de mesures d'impact réel. C'est justement tout l'enjeu du programme Infinite, approcher ces constats de manière plus mesurée. Il faut désormais s'inscrire dans une démarche scientifique d'évaluation. En Espagne, par exemple, cela fait dix ans qu'ils utilisent les jeux d'échecs auprès d'enfants TDAH et ont constaté de vrais progrès, notamment sur la concentration. A contrario, la France est assez en retard même si on rattrape vite l'Espagne. Avec ce programme, une première mondiale dans la logique d'évaluation, nous sommes déjà considérés comme le partenaire de référence ; désormais, nous ferons les choses de manière plus structurée et complète.
 
H.fr : En quoi consiste concrètement ce programme ?
FD : Il verra le jour en avril 2022 et va courir jusqu'en 2024. Il s'inscrit dans une approche globale, basée à la fois sur des études scientifiques cliniques et des événements de sensibilisation. Pour l'aspect clinique, une phase pilote va être menée dès le mois d'avril 2022 dans quatre centres spécialisés en France, avec la participation de seize enfants qui suivront un parcours d'apprentissage adapté du jeu d'échecs, bénéficiant d'un suivi médical et scientifique, afin de valider la pertinence du dispositif : amélioration de la concentration, capacité de mémorisation, construction logique, évolution des interactions sociales… Pour la première fois, ce parcours sera réalisé directement au sein des instituts médico-éducatifs et non dans les clubs d'échecs.
 
H.fr : Quels sont les objectifs à terme ? Proposer les échecs en consultation médicale, par exemple ?
FD : Pourquoi pas ! Une fois qu'on aura trouvé les éléments de démonstration après cette phase pilote, le dispositif sera amené à être déployé partout en France. Grâce à des relais de communication, dans le cadre de réunions régionales de médecins libéraux, grâce à des sociétés savantes pour la partie hospitalière et via les autorités, avec, nous l'espérons, l'appui de la Haute autorité de santé (HAS), ces dispositifs pourront être intégrés dans l'arsenal thérapeutique et deviendront des interventions non-médicamenteuses, au même titre que le sport, pouvant être adossées à des traitements avec des pharmacopées. Ainsi, quand un parent emmènera son enfant chez le médecin pour quelques troubles identifiés ou pré-identifiés, le professionnel de santé pourra se dire : « Je vais proposer le jeu d'échecs parce que c'est adapté et scientifiquement prouvé ». Les parents pourront ensuite se tourner vers un club d'échecs dont les professionnels encadrants seront formés à la question du handicap grâce à l'obtention d'un module de formation prérequis. Mais ce sera probablement assez long.
 
H.fr : On sait que les jeux d'échecs se pratiquent aujourd'hui de plus en plus en ligne, est-ce que ce n'est pas justement un frein à la sociabilisation recherchée ?
FD : Les nouvelles technologies permettent, certes, d'étendre et de diffuser la pratique mais nous devons être vigilants en la matière, notamment par rapport aux questions de concentration. Il est prévu, d'ici 2023, que nous mettions en place des dispositions de prévention, par exemple des mécanismes d'alerte qui imposent des pauses régulières lors de la pratique du jeu en ligne.

H.fr : Vous envisagez également de développer un outil de suivi innovant combinant télésanté et apprentissage des échecs ?
FD : Nous comptons en effet nous appuyer sur un dispositif de télésuivi du nom de Telma, déjà utilisé par certains médecins pour assurer le suivi des enfants ayant eu un diagnostic d'autisme. Concrètement, dans le cadre de notre programme, ils seront observés à des moments réguliers grâce à une caméra disposée dans une salle où le jeu d'échecs sera enseigné. Le médecin pourra alors, d'une séance à l'autre, analyser le comportement de l'enfant en situation et observer ses progrès.

H.fr : Dernier point, vous menez également des actions en faveur des personnes déficientes visuelles ?
FD : Effectivement, nous sommes sur le point de signer un partenariat avec l'association Valentin Haüy dans le cadre des prochains championnats du monde d'échecs dédiés (jeunes et femmes) qui auront lieu en France en juillet 2022, à Castelnaudary (Aude) précisément. Double objectif : à la fois faire découvrir cette pratique à 3 000 personnes déficientes visuelles, adultes comme enfants, mais également sensibiliser les pratiquants qui pourraient avoir des problèmes de vue dans le futur sur le fait qu'il existe des outils et aménagements adaptés pour poursuivre leur passion.

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"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Clotilde Costil, journaliste Handicap.fr"
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