Seuls 2,52 % des sites Internet respecteraient pleinement leurs obligations en matière d'accessibilité. La Fédération des aveugles et amblyopes de France (FAAF) publie les résultats de son Observatoire du respect des obligations en matière d'accessibilité numérique, lancé le 28 juin 2023, mettant en lumière « des carences profondes et systémiques ». « Alors que le numérique est devenu essentiel pour accéder aux services publics, à l'information et à la vie sociale, l'accessibilité des sites et applications reste dramatiquement insuffisante en France. »
Un outil pour favoriser la prise de conscience
Avec 4 253 sites analysés, répartis sur 71 secteurs d'activité, l'Observatoire est un « outil inédit en France », se félicite la FAAF. Les données étudiées portent sur trois obligations clés : l'affichage d'une mention d'accessibilité, la publication d'une déclaration d'accessibilité et l'existence d'un schéma pluriannuel de mise en accessibilité. Cette analyse vise à « mesurer le niveau d'engagement des organisations, dans une démarche d'amélioration de leurs pratiques, et leur volonté de se conformer au cadre réglementaire ». L'Observatoire permet de « suivre le plus petit dénominateur commun obligatoire par la loi », résultant dans obligations en vigueur en Europe pour les 27 pays de l'Union Européenne : les éléments déclaratifs. « C'est un premier indicateur qui aide à la prise de conscience collective en France. » Et cette étude montre à quel point elle est nécessaire...
Seuls 0,49 % des sites en conformité avec le RGAA
En effet, seuls 199 sites, soit 4,68 % respectent les trois obligations d'affichage listée plus haut et seuls 0,49 % déclarent être en conformité totale avec le RGAA (Référentiel général d'amélioration de l'accessibilité). Enfin, près de 95 % des sites analysés ne disposent pas d'un schéma pluriannuel, un document pourtant essentiel pour garantir une démarche d'amélioration continue. D'une durée maximum de trois ans, il présente la politique de l'entité concernée en matière d'accessibilité numérique. À ce titre, il contient notamment des informations sur les actions de formation et de sensibilisation des agents, les missions du référent accessibilité numérique, les ressources humaines et financières affectées à ce sujet...
Les services publics rarement conformes
Le constat est particulièrement préoccupant dans les services publics, « pourtant en première ligne pour garantir l'accès à tous ». Concernant les villes, sur 539 sites municipaux, seuls trois sont pleinement conformes, et 0,9 % ont établi un schéma pluriannuel. Et pour les bibliothèques publiques ? Sur les 293 sites analysés, seul un est conforme. Quant aux préfectures, aucune des 110 examinées ne respecte toutes ses obligations légales, malgré une mention d'accessibilité présente sur 105 d'entre elles.
Les MDPH ne montrent pas l'exemple
L'analyse des Maisons départementales des personnes handicapées, « structures pourtant au cœur de l'accompagnement de ce public, révèle également des résultats affligeants », déplore la Fédération. Sur les 90 MDPH étudiées, une seule plateforme se déclare totalement conforme. En réalité, seules neuf « maisons » sont conformes à leurs obligations d'affichages, et ce chiffre tombe à sept en incluant la validité de la déclaration.
Même galère dans le secteur privé
Le panorama n'est guère plus reluisant pour les entreprises, notamment dans des secteurs clés. Dans le e-commerce, seuls deux sites sur 89 respectent les obligations légales. Pour les banques et services financiers, cinq établissements sur 42 disposent d'une déclaration valide et respectent leurs obligations d'affichage.
Passer des recommandations aux actes !
Face à cette situation « accablante », le président de la FAAF interpelle le gouvernement sur la nécessité d'agir : « Le temps des constats est révolu ! L'accessibilité numérique n'est pas une simple question technique ou réglementaire : c'est un enjeu de société majeur, un combat pour l'égalité des droits et la dignité humaine ». Il prône notamment la mise en place d'un « véritable dispositif de contrôle doté de moyens humains et techniques, avec des sanctions effectives pour les organisations qui persistent à ignorer leurs obligations légales », à savoir la nomination d'un référent accessibilité disposant de réels moyens d'action, un portage politique fort au plus haut niveau, l'intégration de l'accessibilité dès la conception des projets, la formation continue des équipes techniques ET éditoriales, ainsi qu'un budget dédié et sanctuarisé.
En parallèle, la création d'un fonds de soutien à la mise en conformité pourrait permettre, selon la Fédération, d'accompagner les structures qui s'engagent sincèrement dans cette démarche.
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