Par Jessica Lopez
En 2019, un enfant en situation de handicap, en particulier mental, a toujours 4 fois plus de probabilité de subir des violences sexuelles que les autres enfants ; 25% des collégiens déclarent encore être victimes d'atteintes en ligne ; près de 50% des mineurs accueillis dans les foyers de l'enfance ne reçoivent aucune visite durant 3 mois et 6% des collégiens ne se sont pas rendus au collège au moins une fois dans l'année car ils avaient peur de la violence, a fortiori en cas de handicap. "Vivre avec un handicap, c'est, aujourd'hui encore, être confronté à une multitude d'obstacles et de discriminations. Quel est le quotidien pour les enfants concernés dans une société encore inadaptée ? Que vivent et que ressentent-ils alors que la différence est souvent un sujet de moqueries voire d'insultes et de harcèlement ?", questionne APF France handicap. "Parce qu'en France, les enfants handicapés n'ont pas accès aux mêmes droits que les autres", l'association publie son plaidoyer "Tous pareils mais… le vécu et le ressenti des enfants en situation de handicap face à leurs droits", à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'enfant, marquée par le 30e anniversaire de la Convention internationale des droits de l'enfant. Avec 58 témoignages de jeunes handicapés de 7 à 18 ans, ce plaidoyer souhaite avant tout leur donner la parole, pour l'heure "trop peu entendue".
Un plan dévoilé par Macron
A cette même occasion, le président de la République s'exprimera le 20 novembre 2019 devant des jeunes et des acteurs du monde associatif. A l'invitation du Défenseur des droits Jacques Toubon et de l'Unesco (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture), il devrait dévoiler certaines mesures d'un plan pour "en finir avec les violences faites aux enfants", porté par le secrétaire d'Etat à la Protection de l'enfance, Adrien Taquet. Ce plan triennal (2020-2022), qui prendra la suite d'un premier plan sur ce sujet lancé en 2017 par la précédente mandature, comporte six objectifs et 22 mesures pour "libérer la parole" des enfants et "porter attention aux victimes", a indiqué à l'AFP M. Taquet.
Aujourd'hui, en France, on estime qu'un enfant meurt tous les cinq jours de la violence de ses parents, qu'un jeune est victime d'une agression sexuelle toutes les trois minutes et qu'entre 8 000 à 10 000 mineurs se prostituent, des chiffres probablement en deçà de la réalité du fait du silence entourant ce sujet. Les violences faites aux enfants, exercées huit fois sur dix dans un cadre familial, sont le premier facteur de risque de tentative de suicide, d'addictions et de décrochage scolaire. Pour repérer les situations, des équipes pédiatriques référentes seront identifiées en 2020 dans chaque région pour former, conseiller et soutenir les médecins confrontés à des cas.
Allo enfance en danger
Actuellement, seuls 5% des signalements aux services sociaux viennent des médecins, pourtant en contact régulier avec les enfants mais parfois frileux, par peur de dénoncer à tort. "Face à une suspicion de violence, il n'est pas question de dénonciation ou de délation, il faut alerter. Notre responsabilité, c'est de protéger un enfant", a poursuivi le secrétaire d'Etat, appelant à une "mobilisation de toute la société". Ainsi, le 119, numéro gratuit "Allo enfance en danger", verra en 2020 ses moyens augmentés de 8% pour recruter cinq nouveaux écoutants et ainsi pouvoir répondre immédiatement aux nombreux appels reçus, développer une plateforme numérique et se rendre accessible aux personnes sourdes et malentendantes. Pour "mieux recueillir et protéger" la parole, une "unité d'accueil pédiatrique" sera créée par département d'ici à la fin du quinquennat. Ces structures situées dans les hôpitaux (58 actuellement) permettent une prise en charge aussi bien médicale que judiciaire des mineurs victimes et favorisent les auditions filmées, évitant à l'enfant de répéter –et donc revivre– les faits subis.
D'autres pistes…
Pour protéger les enfants, le plan prévoit de renforcer la consultation du fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) pour les personnes travaillant auprès d'enfants, et d'expérimenter, dans cinq régions, un numéro d'aide pour les personnes attirées sexuellement par les enfants, inspiré d'une initiative allemande lancée en 2005, qui a traité depuis plus de 10 000 appels. En matière de prévention, des associations oeuvrant à la sensibilisation aux violences et au harcèlement scolaire seront labellisées par le gouvernement pour pouvoir être contactées par des municipalités pour des activités périscolaires.
Dans un communiqué, 35 associations, ONG et collectifs, dont l'Unicef, ATD Quart monde et SOS Villages d'enfants, ont demandé au gouvernement de passer "de la convention aux actes" en s'engageant sur un objectif de "zéro enfant à la rue d'ici 2022" et un "observatoire national de la non-scolarisation" pour détecter les jeunes vulnérables.