54, c'est le nombre de départements où il n'existe aucun établissement ou service proposant un accompagnement spécifique aux personnes déficientes visuelles. Autre constat : on dénombre 3 708 places dans des structures dédiées à l'accompagnement pour adultes déficients visuels ou sourdaveugles. Pour les enfants atteints du même handicap, c'est à peine plus : 5 865. Or, en France, 207 000 personnes sont considérées comme « aveugles profondes ». Cherchez l'erreur…
Un constat édifiant
Dans le « Panorama de l'offre d'accompagnement et de réadaptation pour les personnes déficientes visuelles », publié le 20 avril 2023 et mené au cours de l'année 2022, la Fédération des aveugles et amblyopes de France (FAAF) dresse « un constat édifiant » : l'offre de soins adaptés semble particulièrement insuffisante au regard des besoins. Une enquête qui n'est pas sans rappeler Homère : la plus grande étude sur la déficience visuelle, publiée en février 2023. Etablissements et services médico-sociaux, soins de suite et de réadaptation... au cours de leur vie, les personnes avec un handicap visuel peuvent être amenées à suivre une « réadaptation » loin de leur domicile et dans un environnement qui ne leur est pas familier. C'est pourtant dans un « cadre sécurisé que la personne aveugle apprend par exemple les trajets qu'elle sera amenée à emprunter au quotidien », explique la FAAF.
Offre insuffisante et inégalités territoriales
Or comment bénéficier de ce type d'accompagnement lorsque le seul établissement disponible se trouve à des centaines de kilomètres et que l'on n'est, par définition, pas véhiculé ? Car, en plus d'une offre insuffisante, celle-ci est marquée par des inégalités territoriales. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Ile-de-France et Aquitaine semblent être les mieux pourvues, proportionnellement à leur densité de population. En revanche, la Corse, la Bourgogne-Franche-Comté ou encore la Normandie sont les moins bien loties. Les départements d'Outre-Mer apparaissent systématiquement à la marge.
Départements familiers des déserts médicaux
Du côté de l'offre pédiatrique, ce n'est guère mieux. Seize départements, familiers des déserts médicaux (Ariège, Cantal, Creuse, Gers, Jura, Lozère), sont dépourvus de services spécialisés. L'étude a réalisé un focus sur les services d'accompagnement pour adultes (SAMSAH et SAVS), les établissements d'hébergement (foyer d'accueil médicalisé, maisons d'accueil spécialisées…) et les établissements de travail protégé et de formation professionnelle (Esat, entreprises adaptées…) dont la capacité d'accueil dédiée aux personnes déficientes visuelles est, là encore, réduite. Avec seulement 157 places et neuf structures, « les entreprises adaptées au handicap visuel restent à ce jour minoritaires », s'alarme la Fédération.
Créer des lieux de ressources adaptés
Quant aux centres ressources, qui apportent aide, soutien, conseils, expertise, services de proximité, de dépistage, là aussi, les lieux adaptés au handicap visuel se font rares. Deux centres spécialisés dans la déficience visuelle, un centre expert en surdicécité et un autre qui accompagne spécifiquement les enjeux liés à la parentalité des personnes en situation de handicap sont recensés, soit « seulement » quatre. Enfin, indispensable pour réapprendre la mobilité et l'autonomie au quotidien avant que des services médico-sociaux ne prennent le relais, l'offre de « soins de suite et de réadaptation » apparaît également amoindrie, avec 212 lits disponibles seulement.
Pour Bruno Gendron, président de la FAAF, « les personnes déficientes visuelles ne peuvent compenser leur handicap au quotidien, vivre de façon autonome et être des citoyens à part entière ». Face à cette inégalité territoriale « criante », la Fédération réclame la « création d'un maillage territorial efficace avec des lieux ressources adaptés avec des experts et professionnels ». Pour retrouver les structures près de chez soi, rendez-vous sur le site de la Fédération des aveugles et amblyopes de France, qui a publié un annuaire détaillé.