Handicap.fr : Laura Flessel, ministre des Sports, a annoncé le 4 septembre 2018 sa démission « surprise ». Une déception pour le mouvement paralympique ?
Emmanuelle Assmann : Laura Flessel portait une conviction personnelle forte en faveur des personnes handicapées, de longue date, puisqu'en tant qu'escrimeuse elle s'était elle-même entraîné en fauteuil, notamment durant sa grossesse. Il y a chez cette ex championne de haut-niveau une vraie volonté d'intégration et de prise en compte de la différence, y compris à la base. Dès son arrivée, elle a souhaité impliquer le mouvement paralympique dans toutes les concertations, lors des réunions. Nous étions toujours autour de la table, notamment pour le dossier Paris 2024. La lutte contre les discriminations dans le sport, c'était vraiment son cheval de bataille.
H.fr : Elle indique partir pour raisons personnelles mais a-t-elle eu toute latitude financière pour mener ses projets ?
EA : Il y des restrictions budgétaires depuis quelques années mais je ne sais pas si ce sont elles qui ont pesé dans sa décision. Une chose est certaine c'est que Laura Flessel a fait des arbitrages audacieux pour valoriser les actions anti-discrimination et promouvoir, notamment, la pratique sportive des personnes handicapées. J'espère que le gouvernement a pris conscience que le sport pour tous doit avoir une place majeure dans l'éducation et qu'il se donnera les moyens de n'investir pas seulement dans la performance en permettant, aussi, aux petits clubs de survivre et en formant des éducateurs spécialisés. Laura Flessel s'est battue pour cela. Nous n'avons pas eu à la persuader, c'était quelque chose d'acquis.
H.fr : C'est l'ex-nageuse Roxana Maracineanu, 43 ans, médaillée d'argent aux JO de Sydney en 2000, qui lui succède…
EA : Nous verrons quelles seront ses orientations mais je souhaite que la nouvelle ministre fasse également du développement du sport pour les personnes en situation de handicap une priorité.
H.fr : Avec Laura Flessel, vous étiez en terrain favorable. Redoutez-vous que les choses ne changent ?
EA : Non, je ne redoute rien. Cela fait cinq ans que je suis à la tête du Comité paralympique français et j'ai déjà vu passer quatre ministres. Alors, on va prendre le temps d'argumenter et de sensibiliser. Il est important que l'engagement de l'Etat s'inscrive dans la durée.
H.fr : Avez-vous le sentiment que la pratique des para sports s'est imposée dans le paysage sportif français ?
EA : Oui, en quelques années, nous avons tout de même fait du chemin et on ne peut pas nier que l'ensemble du mouvement sportif s'est mobilisé autour de ce sujet. En cinq ans, les choses ont changé et personne ne peut plus faire comme si le mouvement paralympique n'existait pas. On a gagné une reconnaissance qui est désormais bien ancrée alors je ne suis pas inquiète pour l'avenir…
H.fr : Le chantier des Jeux de Paris 2024 y est pour beaucoup, le volet paralympique ayant toute sa place…
EA : Oui, c'est un volet solide avec, à la tête du COJO (Comité d'organisation des jeux olympiques et paralympiques), un « patron », Tony Estanguet, très impliqué, qui maintiendra sa ligne de conduite et son autonomie de fonctionnement quel que soit le ministre en place. Cette aventure-là, elle continue de s'écrire …
Démission de Laura Flessel : coup dur pour le paralympisme?
Laura Flessel a démissionné. Très impliquée en faveur du sport pour tous, elle a su, en 16 mois, impulser une dynamique forte. Des raisons de la regretter ? Réponses d'Emmanuelle Assmann, présidente du Comité paralympique et sportif français.
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